Juger des cas des délits, comme le viol collectif de la jeune Khadija à Oulad Ayad, où sont impliqués des mineurs, interpelle la justice marocaine et les institutions en charge des mineurs à plus d'un titre. Quelle procédure judiciaire doit-on suivre pour appliquer la loi, quand il s'agit d'un mineur? Peut-on le faire passer par le même circuit judiciaire que les adultes, sans courir le risque de violer les droits des enfants? Pour améliorer sa protection des mineurs en conflit avec la loi, le ministère de la justice préparerait une réforme dans le domaine. Le système judiciaire en matière des mineurs au Maroc devrait connaitre une réforme sous peu. Selon Hicham Mellati, directeur de la direction des affaires pénales et des grâces, au ministère de la justice, qui intervenait mercredi lors d'un séminaire sur la justice des mineurs organisé par l'association prison-relais, des projets de loi sont en cours pour mieux protéger les mineurs en conflit avec la loi.Au menu des réformes, le renforcement du rôle des assistants sociaux. Il s'agira de créer un bureau pour ces agents et les doter de moyens nécessaires leur permettant de remplir pleinement leurs missions au profit des mineurs. Autre réforme,la révision du Code de procédures pénales. Si la précédente réforme avait permis d'installer un juge spécialisé pour les mineurs, la prochaine réforme devra quant à elle permettre d'instaurer une chambre spécialisée de la justice des mineurs. A en croire le responsable, des discussions seraient en cours avec le ministère de la famille et du développement social pour l'élaboration du texte, qui sera par la suite présenter en Conseil de gouvernement.Toutefois, l'annonce de ces réformes est loin de rassurer les acteurs associatifs qui craignent la lenteur dans la concrétisation d'une réforme aussi importante. En effet, quand il s'agit de justice pour les délinquants marocains, c'est un tableau noir que dressent les avocats, chercheurs, acteurs associatifs, familles, Les témoignages des uns et des autres s'accordent à dire que la justice telle qu'appliquée au Maroc, quand il s'agit des mineurs, est « punitive et baser sur la sanction», au lieu d'être «corrective, réparatrice et basée sur la réhabilitation». Puisque, comme l'a mentionné Mohamed Sghir, président de l'association Relais Prison-société, «avant d'être conflit avec la loi, le mineur est avant tout une victime de la violence dans la maison, la rue et l'école». Les mineurs délinquants sont généralement traités comme des adultes au niveau des instances de justice marocaines. Bien souvent, leur immaturité intellectuelle et émotionnelle n'est pas souvent prise en compte, sans oublier les facteurs psychologiques, familiaux et sociaux qui peuvent les conduire à certains comportements. Et pourtant le Maroc est signataire de plusieurs conventions internationales en matière de délinquance juvénile. Entre autres, les « Règles de Beijing » qui édictent les règles des Nations Unies pour protéger les mineurs privés de liberté. Selon ces textes internationaux, dont la Convention internationale pour la protection des droits de l'enfant, il est admis que des règles précises doivent être développées pour la prise en charge juridique des mineurs. Elles doivent prendre en compte les facteurs sociaux et psychologiques, familiaux, qui peuvent déterminer le comportement du mineur. La convention relative aux droits de l'enfant exige dans ce sens, un procès équitable du mineur, pour garantir un équilibre entre ce qui est légal et ce qui est psychologique. En plus, elle doit embrasser le principe de la réparation et de la réhabilitation et non de la sanction. Avec sa ratification de la Convention internationale des droits de l'enfant et la réforme constitutionnelle de 2011, le Maroc a introduit de nombreuses règles procédurales pour un traitement distinct des mineurs en conflit avec la loi. Ainsi, l'âge de la majorité pénale a été relevé à 18 ans. Un poste de juge des mineurs a été créé au sein du Tribunal de première instance. En outre, une catégorie d'officiers pour mineurs a été mise en place, conformément aux règles de Beijing sur la délinquance juvénile. De même, une justice réparatrice et alternative a été instaurée pour juger les délits des mineurs. La peine prévue pour l'infraction a été réduite de moitié des peines encourues par les adultes, sans excéder 10 ans à 15 ans d'emprisonnement. D'autres mesures ont été introduites, comme l'interdiction de publier tout texte, dessin ou image sur l'identité et le caractère des jeunes délinquants… Si l'arsenal juridique semble étoffé, l'application sur le terrain fait toutefois défaut.