Le projet de loi portant réforme du livre V du Code du commerce est passé comme une lettre à la poste. Les députés l'ont adopté, à l'unanimité, mardi lors de la séance plénière consacrée à l'ouverture de la session extraordinaire, rompant ainsi avec la lenteur qui marque traditionnellement le Parlement. C'est en fait le gouvernement qui a fait le forcing pour faire adopter la réforme. Les enjeux sont de taille, surtout qu'ils sont liés à l'image et à la réputation du Maroc. En adoptant ce projet, qui introduit de nouvelles mesures en faveur des entreprises en difficultés, le gouvernement espère améliorer la position du Maroc dans les classements internationaux. Le ministre de la Justice, Mohamed Aujjar, l'a lui-même souligné devant les députés. Pour lui, ce projet constitue un outil d'évaluation de l'indice d'amélioration de l'environnement des affaires. Le Maroc veut surtout récupérer des points dans le classement Doing Business dans lequel il est passé de la 67ème place en 2012 au 137ème rang en 2017. A en croire le ministre, cette régression serait due à la révision de la plupart des pays du monde de leurs législations sur les entreprises en difficultés, alors que le Maroc a enregistré du retard pour franchir le pas. En effet, la réforme traine depuis huit ans, avec une première mouture rejetée par le Secrétariat général du gouvernement en 2011. Concrètement, la réforme vise à renforcer la procédure de redressement, à rééquilibrer les pouvoirs entre le chef de l'entreprise et les créanciers, à augmenter l'efficacité de la procédure de la liquidation judiciaire, à réviser les dispositions générales applicables aux voies de recours. Ainsi, une nouvelle procédure dite de sauvetage a été introduite afin de réduire le risque d'insolvabilité de l'entreprise. Il s'agit d'une procédure volontaire pouvant être actionnée par le chef de l'entreprise avant même la cessation de paiement. Le dirigeant présente son plan de sauvetage, en y incluant un diagnostic précoce des contraintes auxquelles l'entreprise est confrontée. Il dispose d'un délai de cinq ans pour exécuter les actions prévues. A défaut de paiement des dettes, le tribunal interrompra le plan de sauvegarde pour déclencher le processus de liquidation. En effet, le président du tribunal dispose de la prérogative de résilier l'accord conclu entre l'entreprise et ses créanciers par une décision qui ne peut faire l'objet d'aucune voie de recours. Notons toutefois que la réforme privilégie la conciliation qui vient en fait remplacer l'appellation «règlement amiable». Le but est de mettre fin à la confusion entre règlement amiable et liquidation. Le but est d'aplanir les tensions entre le dirigeant et les créanciers en créant notamment une association regroupant les deux parties pour adopter des mesures nécessaires au redressement de l'entreprise. A noter que le projet de loi a quitté les tiroirs de la Chambre des représentants avec 35 amendements de forme. Prochaine étape : adoption en plénière au niveau de la Chambre des conseillers.