Début avril, le Groupe Outsourciaest choisi par le London Stock Exchange Group pour intégrer le projet «Companies to inspire Africa». L'été dernier, son fondateur, Youssef Chraïbi, met la main sur le Groupe SCEMI SA à Madagascar, après s'être implanté au Niger en 2015, et avoir séduit le fonds d'investissement début 2016 pour rejoindre son tour de table. Retour sur les facteurs clés de succès de ce nouveau fleuron de l'outsourcing marocain. Outsourcia, opérateur spécialisé dans les métiers de l'outsourcing et principalement dans les centres d'appels ne s'est pas fait remarqué par le London Stock Exchange Group pour rien. Depuis sa création en 2003, Outsourcia a soigneusement mis sur pied sa croissance presque sans faire de bruits avant de prendre tout le monde de court en 2010 avec l'acquisition du français As-Com. Cette acquisition a constitué un tournant dans la stratégie d'internationalisation du Groupe et a permis devalider la pertinence d'un modèle mixte «Offshore/Onshore», qui est en quelque sorte sa marque de fabrique, permettant un partage de la valeur ajoutée en fonction des atouts de chaque pays. Outsourcia avait été aussi le premier acteur marocain à s'implanter en France dans ce secteur, initiant ainsi cette logique de délocalisation inversée et offrant de réelles opportunités avec un modèle économique innovant. Une stratégie visionnaire «Cette installation en France nous a permis d'abord d'accéder à de nouveaux marchés jusque-là exclusivement réservés aux acteurs locaux français. C'est notamment le cas des marchés publics français. Ensuite, de proposer à nos clients des solutions «best cost», avec d'une part un traitement offshore pour les appels les plus standardisés et d'autre part une solution onshore pour les traitements les plus sensibles nécessitant par exemple la maîtrise d'un environnement juridique ou culturel local. Enfin, de mettre en place différents niveaux d'expertise avec un processus d'escalade entre le Maroc et la France en temps réel grâce aux solutions techniques que nous avons déployées entre les deux pays», détaille Youssef Chraïbi, PDG d'Outsourcia. Une opération qui a été bancable pour Outsourcia, mais aussi intéressante pour ses clients français en leur permettant de réduire leurs coûts via une migration partielle vers l'offshore. La conjoncture difficile en Europe offre ainsi des opportunités uniques en termes d'investissements, à partir du moment où cette approche de colocalisation compétitive peut constituer une véritable stratégie de sortie de crise. L'Allemagne l'a compris il y a bien longtemps en investissant dans les pays de l'Est, devenus aujourd'hui une composante majeure de la compétitivité allemande. « Nous pourrions reproduire le même modèle entre l'Europe du Sud et le Maghreb, et le Maroc en particulier », poursuit Chraïbi. Avant d'ajouter : «Nous avons apporté des engagements fermes en termes de création d'emplois. Le Groupe Outsourcia a déjà fait ses preuves en France en ayant créé plus de 150 emplois nets depuis son implantation, démontrant clairement que notre projet s'inscrit dans une véritable stratégie industrielle et non dans une stratégie financière». En effet, de plus en plus de donneurs sont à la recherche de solutions mixtes, combinant offshore pour des prestations à forte volumétrie et onshore pour des prestations plus sensibles nécessitant une proximité. Cette implantation en France a permis notamment de répondre à de nouveaux clients comme GDF Suez, qui privilégient un traitement en France. Ainsi, bien que les coûts de production soient nettement supérieurs en France, il ne se s'agit pas de l'unique critère de sélection d'un prestataire. La maîtrise d'un environnement local fait aussi quelquefois la différence. Aussi pour parvenir à réussir dans un premier temps son implantation en France et dans un second temps l'acquisition d'AS Com, Youssef Chraïbi a également mis en place une organisation et un management porteur. Ainsi, l'ensemble des fonctions supports sont centralisés au siège à Casablanca et, chaque directeur de site conserve une autonomie dans la gestion de ses ressources ce qui nous a permis de conserver une gestion à taille humaine et une forte proximité avec nos ressources. Au niveau technique également, un centre unique à Casablanca pilote les sites distants, y compris en France, au Niger et à Madagascar. Car l'Afrique a été l'autre carte maîtresse jouée par Outsourcia. L'Afrique pour une offre de service complète Après une installation à Madagascar en juillet 2015, Outsourcia renforce sa présence en Afrique subsaharienne et s'installe au Niger : un centre d'appels à Niamey nec plus ultra suite à la signature d'un nouveau contrat avec Orange Niger et qui après 1 mois d'activité emploie plus de 50 collaborateurs. En août dernier, le Groupe passe à la vitesse supérieure. Youssef Chraïbi annonce sa prise de participation majoritaire dans le capital du Groupe SCEMI SA : une société française à Madagascar spécialisée dans l'externalisation de services en offshore disposant d'une forte expertise dans les métiers de back office (BPO et qui emploie 650 personnes. Il s'agit ainsi de la troisième opération de croissance externe réalisée par le Groupe Outsourcia en cinq ans, qui lui permettra désormais d'être présent dans 4 Pays (Maroc, France, Niger et Madagascar), d'employer 1500 collaborateurs sur 9 sites de production et de réaliser un chiffre d'affaires consolidé de 16,3 millions d'Euros.« Le principal challenge est de maintenir un fort niveau de croissance en poursuivant notre logique de diversification géographique et sectorielle. Nous avons démarré avec les centres d'appels et nous avons aujourd'hui trois autres métiers : les services digitaux et social media avec notre filiale Alias Community, les métiers de back office (Outsourcia BPO) et la formation avec Offshore Academy. Donc, l'outsourcing est déjà assez large en termes de métiers pour continuer à se diversifier. Naturellement, l'Afriquesubsaharienne était l'étape suivante afin de proposer des solutions à moindres coûts à destination de certains types de clients », argumente Chraïbi. En clair, Youssef Chraïbi voit en l'Afrique un complément d'une solution nearshore au Maroc et onshore en France. Autrement dit, l'Afrique comble un besoin d'une solution offshore encore plus compétitive en termes de prix pour certains types de besoins. Selon lui, il y a des clients qui peuvent avoir des besoins très complexes qu'ils veulent faire traiteren France; des besoins un peu plus standardisés qu'ils veulent faire traiter au Maroc et d'autres besoins qui vont répondre uniquement à une logique de coût, d'où l'intérêt d'une implantation en Afrique. Toutefois, ce n'est pas l'unique et seule raison. En réalité il y a le coût, mais également l'existence d'un bassin de l'emploi francophone. D'ailleurs Outsourcia emploie environ 10% de ressources issues d'Afrique Subsaharienne. En cause, un marché de l'emploi tendu avec des besoins qui sont supérieurs à ce que peut offrir le marché de l'emploi aujourd'hui et un turnover assez important allant de 20% par an à 30% pour certaines activités ; ce qui impacte les niveaux de salaire, mais également le niveau de turnover intra-sectoriel. « Malheureusement, au lieu de créer des emplois nets, il y a encore beaucoup de prestataires qui vont chercher leurs ressources chez des confrères », regrette le PDG d'Outsourcia. La croissance à l'internationale d'Outsourcia est venue parer cette carence du marché et elle n'est pas prête de s'arrêter là. Car désormais le Groupe a aussi les reins solides financièrement. Il y a un an AfricInvest, leader panafricain dans le privateequity et Outsourcia ont annoncé leur partenariat capitalistique. A travers son fonds Maghreb Private Equity III, AfricInvest veut accompagner le Groupe Outsourcia dans son modèle innovant de développement «Acquire & Migrate». Sans donner de détails sur le montant de la transaction, le PDG d'Outsourcia a confirmé sa volonté d'aller plus loin dans sa conquête à travers de partenariat. «Après 13 années de forte croissance organique autofinancée, Outsourcia a choisi d'intensifier sa stratégie de croissance externe en vue d'étendre sa présence géographique et de développer son expertise en Europe et en Afrique...», a-t-il affirmé. En d'autres termes, que le spectacle commence!