Un enjeu de santé publique Les dangers du tabac sont un sujet qui a été traité en long et en large depuis des années. Il a fait l'objet de plusieurs campagnes de sensibilisation. C'est un sujet qui s'impose de lui -même au regard des conséquences sanitaires souvent dramatiques dues directement ou indirectement au tabagisme. Tout le monde en est aujourd'hui conscient. Et tout le monde connait les effets nocifs sur la santé qu'entraine la consommation de cigarettes. Mais aussi paradoxal que cela puisse paraître, les fumeurs sont de plus en plus nombreux... On ne le dura jamais assez. Le tabac tue un fumeur sur deux. Le nombre de celles et ceux qui fument augmente de minute en minute. Le tabac est consommé partout dans le monde, c'est un produit très accessible à tous, petits et grands, hommes et femmes. Et il est à la portée de tous surtout dans un pays comme le notre où les cigarettes sont vendues à l'unité, au détail à chaque coin de rue au vu et su de tout le monde. Ses dangers sont parfois ignorés et les politiques publiques antitabac sont souvent incohérentes. La plupart des effets nocifs du tabac sur la santé n'apparaissent que plusieurs années voire plusieurs décennies après la première cigarette. Donc, si la consommation de tabac augmente partout dans le monde, la mortalité et morbidité liées au tabac n'ont pas encore atteint son maximum. Deux études au Maroc permettre de mesurer l'ampleur de ce fléau au Maroc. L'une a été faite par le ministère de la Santé en 2001 auprès des médecins cardiovasculaires et qui a relevé une prévalence au tabagisme chez l'homme de 32% et chez la femme de 1%. Et puis en 2006, il y a eu une autre étude MARTA ou de l'étude Maroc Tabac, qui a été conduite par le service d'épidémiologie au niveau de la faculté de médecine de Fès. Il en est sorti une prévalence au tabagisme chez l'homme de 31,2% et chez la femme de 3% et une prévalence au niveau de la population marocaine de 18,7%. Globalement donc le tiers des hommes au Maroc fument alors que 3% des femmes consomment du tabac. Et ce dernier chiffre reste discutable vu que beaucoup de femmes n'aiment pas communiquer sur leur statut tabagique. Ces deux études sont certes dépassées mais elles montrent à quel point nous sommes concernés par le fléau du tabagisme et les conséquences dramatiques des affections inhérentes à la cigarette. Les coûts économiques du tabagisme sont tout aussi dévastateurs et ne se limitent pas aux dépenses de santé publique pour traiter les maladies provoquées par le tabac. Les victimes meurent pendant la période la plus productive de leur vie, privant les familles de leur soutien et les nations d'une main d'œuvre en bonne santé. Quand ils sont encore en vie, les fumeurs sont aussi moins productifs en raison de l'augmentation de la morbidité. Il y a un lien indissociable entre le tabac et la pauvreté. De nombreuses études ont montré que, dans certains pays à faible revenu, les ménages les plus pauvres consacraient jusqu'à 10 % de leurs dépenses au tabac. Cela signifie que ces familles ont moins d'argent pour satisfaire des besoins essentiels comme l'alimentation, l'éducation ou les soins. En plus des effets directs sur la santé, le tabac conduit à la malnutrition, à une augmentation des dépenses de santé et à des décès prématurés. Il contribue également à augmenter l'illettrisme, en détournant de l'argent qui aurait pu être dépensé pour l'éducation. Dans les deux domaines, les chercheurs ont largement ignoré le rôle du tabac dans l'aggravation de la pauvreté. L'expérience montre qu'il y a de nombreuses mesures efficaces de lutte antitabac que l'on peut appliquer dans diverses situations et qui ont un effet significatif sur la consommation de tabac. La stratégie la plus efficace au moindre coût consiste à prendre des mesures politiques applicables à l'ensemble de la population : interdiction des publicités directes ou indirectes pour le tabac, taxation du tabac, augmentation du prix, interdiction de fumer dans tous les lieux publics et au travail, messages ressortant clairement et en gros sur les conditionnements. Toutes ces mesures sont traitées dans les dispositions de la Convention-cadre de l'OMS pour la lutte antitabac. Le paradoxe marocain Le problème chez nous c'est que se sont les jeunes qui sont aujourd'hui concernés par le problème du tabagisme. Il suffit de regarder autour de soi pour s'en apercevoir. Ce sont parfois des gamins au collège, des lycéens (filles et garçons) qui grillent des tiges et que l'on retrouve malheureusement dans les cafés à chicha. En parlant de narguilé, il faut savoir qu'une heure de consommation de chicha équivaut entre 40 et 100 cigarettes fumées. Les jeunes qui fument de plus en plus le narguilé pensent que du moment que la fumée passe par la pipe où il y a de l'eau, les produits toxiques vont être bloqués. Mais c'est faux. L'eau n'arrive à bloquer que les grosses particules, mais les plus dangereuses vont continuer à être inhalées par le fumeur. Le problème du narguilé aussi c'est qu'il peut donner d'autres maladies parce que la pipe passe d'une bouche à l'autre et donc il y a la possibilité d'attraper toutes les maladies transmissibles : la tuberculose, l'hépatite virale... Ce qui est aberrant dans cette histoire c'est le silence complice des autorités qui ferment les yeux et qui laissent faire. C'est à la limite de la non assistance à personnes en danger, car le tabac tue, on ne cesse de le dire et de le répéter, auquel cas pourquoi ameuter les gens par les spots de sensibilisation véhiculant des messages très forts et d'un autre côté faire le contraire, c'est-à-dire laisser la vente des cigarettes de contrebande fleurir à tous les coins de rue, permettre aux vendeurs de cette mort lente d'écouler leur poison devant les portes des écoles et lycées sans que ces derniers ne soient inquiétés. Pourtant il y a une loi anti-tabac que l'on pourrait appliquer au moins pour permettre d'empêcher la consommation du tabac dans les lieux publics, notamment dans les cafés. Mais il semblerait que cela ne soit pas possible car le tabac apporte une contribution importante au financement de certains comptes sociaux. Les ressources tirées de la fiscalité du tabac sont importantes, mais cela ne peut pas justifier un tel laxisme qui place le gouvernement dans une situation paradoxale de dépendance à l'égard d'une ressource dont le niveau est directement lié au maintien d'une addiction que celui-ci est supposé combattre. En attendant des jours meilleurs contentons-nous des mesures de lutte antitabac préconisée par l'OMS. L'exigence de grandes mises en garde sanitaires explicites fait partie des six mesures préconisées par l'OMS pour réduire la demande. Les autres mesures consistent à surveiller le tabagisme, à protéger les gens contre la fumée du tabac, à faciliter le sevrage tabagique, à faire appliquer les interdictions sur la publicité, la promotion et le parrainage en faveur du tabac et à augmenter les taxes sur le tabac. Chaque mesure correspond à au moins une disposition de la Convention-cadre de l'OMS pour la lutte antitabac, en vigueur depuis 2005 et à laquelle plus de 170 pays et l'Union européenne sont devenus Parties. Ces mesures sont définies comme étant «les meilleures» ou «avantageuses» dans le cadre de la lutte antitabac. On compte un milliard de fumeurs dans le monde et plus de 80% vivent dans des pays à revenu faible ou intermédiaire. Jusqu'à la moitié d'entre eux finiront par mourir d'une maladie liée au tabagisme. Plus de la moitié de la population mondiale, 3,8 milliards de personnes, bénéficie désormais d'au moins une des mesures susmentionnées visant à réduire la demande. Il y a eu des progrès dans chacun des domaines grâce aux mesures efficaces prises par les pays en 2009 et en 2010. 8 millions de décès par an d'ici 2030 C'est un chiffre qui fait froid au dos surtout quand on sait que dans ces décès il y a des personnes qui ne fument pas mais qui meurent prématurément en raison du tabagisme passif et dont le nombre est évalué à 600.000 personnes. Le tabagisme est à l'origine de cancers, de cardiopathies, d'asthme et d'autres pathologies. Si aucune mesure n'est prise, on aura dénombré plus de huit millions de décès par an attribuables au tabac d'ici 2030. Le tabagisme est un facteur de risque pour six des huit premières causes de décès dans le monde. Il est responsable d'un décès d'adulte sur dix. Parmi les cinq principaux facteurs de risque de mortalité, c'est la cause de décès le plus facilement évitable. 11 % des décès dus aux cardiopathies ischémiques, la première cause de mortalité au niveau mondial, sont attribuables à la consommation de tabac, de même que plus de 70% des décès par cancer du poumon, de la trachée et des bronches. Si les tendances actuelles se poursuivent, le tabagisme tuera plus de 8 millions de personnes par an d'ici 2030. Sur plus d'un milliard de fumeurs dans le monde, plus de la moitié mourront prématurément d'une maladie liée au tabac.