Le philologue espagnol Pablo Beineiro, a publié l'édition espagnole du manuscrit d'Ibn Al Arabi «Kitab Kachf Al maana ân sirri amaa allah al housna» sous le titre «Le secret des noms de dieu». Une initiative qui témoigne de l'intérêt grandissant des intellectuels de l'Occident de comprendre à travers les écrits d'Ibn Al Arabi, les enseignements de l'islam. Il y a une quinzaine d'années, le philologue espagnol Pablo Beineiro, a publié l'édition espagnole du manuscrit d'Ibn Al Arabi «Kitab Kachf Al maana ân sirri amaa allah al housna» sous le titre «Le secret des noms de dieu» (Tres Fronteras, 1997). Cette initiative témoigne de l'intérêt grandissant des intellectuels de l'Occident de comprendre à travers les écrits d'Ibn Al Arabi, les enseignements de l'islam, la générosité des soufis dans l'encadrement de la société et la persévérance du musulman dans l'enrichissement de sa culture. Muhyiddïn Ibn Al Arabi de Murcie (1165-1240) représente pour les intellectuels espagnols le symbole de la cohérence de la pensée islamique dans Al Andalous et au Maghreb, de la tolérance et du sacrifice dans la recherche de la vérité. L'édition espagnole, intitulée «El secreto de los nombres de Dios», la première du genre éditée en 1997, invite à une lecture des 99 « plus beaux noms de Dieu » à partir de la perspective du soufisme. Il s'agit en fait de la traduction de 99 chapitres révélant la signification de chacun des noms que «Dieu a enseignés à l'être humain» pour les apprendre et pour l'invoquer. La traduction des œuvres (ou traités) du grand soufi andalou par des intellectuels espagnols constitue, en outre, une louable initiative dans l'explication de la pensée arabo-musulmane et la revalorisation de la philosophie soufie à l'époque de la splendeur de la civilisation musulmane dans la péninsule ibérique. «Le secret des noms de Dieu» est, à ce titre, un ouvrage qui fait partie des traités élaborés par le penseur arabe pour aider le fidèle à approfondir la connaissance des préceptes de l'islam. La version espagnole du «Le secret des plus beaux noms de Dieu» est une œuvre qui représente une approche globale de la culture islamique du fait qu'Ibn Al Arabi offre dans son traité « certains secrets de le l'idée que l'homme se fait de son créateur, du bien et de la grâce et de tous les attributs divins qui aident le lecteur à comprendre les fondements de la culture islamique et de sa dimension mystique. La lecture des «plus beaux noms de Dieu», tels qu'Ibn Al Arabi les avait présentés, invite à connaître l'homme et la réalité du l'univers. Le traité a aussi une mission pédagogique dans la mesure où il aide à appréhender l'importance accordée dans la philosophie soufie aux plus beaux noms de Dieu dans la pratique et la remémoration (al dikr). Selon Ibn Al Arabi, Dieu a enseigné à l'homme, à travers la lecture du coran, ses «plus beaux noms» qui désignent en réalité «l'unique Dieu» et se réfèrent à une « seule essence ». «Attassaouf» (le soufisme) est l'adhésion à la grâce spirituelle, aux bonnes manières (Al adab) prescrites dans la révélation aussi bien externe (Adhahir) qu'interne (Albatine). Ces bonnes manières sont les traits divins du caractère (Al akhlaq al ilahya), écrivait Ibn Al Arabi. En général, l'ensemble de l'œuvre d'Ibn Al Arabi, également dénommé Ech-Cheikh Al Akbar, se considère aussi comme un commentaire permanent et actuel des 99 noms de Dieu. Toutefois, seuls deux écrits réunissent la totalité de ces noms : «Kitab kachf al maâna as – sirri ân asmaa Allah al housna» et «foutouhate makyah». « Kitab kachf al maâna as – sirri ân asmaa Allah al housna » est le titre d'un traité d'Ibn Al Arabi préparé en quatre parties qui peut être traduit littéralement comme suit : « Livre de la révélation de la signification du secret des plus beaux noms d'Allah». Dans la traduction espagnole, l'auteur a élu un titre plus simplifié : « Le Secret des noms de Dieu». C'est d'ailleurs le même titre adapté à la version française, faite par le même traducteur en compagnie de Nassim Motebassem (Al-Bouraq, 2010). Dans le titre du manuscrit originel, Ibn Al Arabi a employé les termes «Kachf al maâna» ou «révélation» (dévoilement aussi) de la signification pour avertir le lecteur qu'il n'est pas en présence d'une «œuvre érudite, de recueil ou de transmission traditionnelle exotérique» mais d'un traité proprement soufi. La signification de «sïr ân asmaa Allah al housna» complète l'idée que voulait transmettre Ibn Al Arabi à ses disciples selon laquelle le traité ne va pas réunir tous les noms de Dieu en général mais seulement 99 qui reviennent le plus souvent et qui sont «puisés dans le coran et la sounna». Ibn Al Arabi écrivait d'ailleurs dans un traité postérieur, intitulé «Tadbirat Ilahya» (Démarches divines) : «nous avions déjà expliqué la signification de l'adoption des noms divins (Asmaa rabbanya) dans notre livre «kachf al maâna as – sirri ân asmaa Allah al housna». « Al Moukaddima » (Introduction) constitue la présentation thématique et structurelle des plus beaux noms de Dieu, lesquels sont accompagnés d'une «classification et définitions». La troisième partie traite de «la connaissance des noms : dépendance, précision et adoption» (Maârifate al asmaa al ilahya ân tarik attaâlloum oua tahaqouq oua attakhallouk) est la plus longue et constitue le corps du livre. Dans ce triptyque, Ibn Al Arabi se serait inspiré de la structure d'un traité intitulé «Ouns Al wahid oua nouzhat al mourid» (La compagnie du solitaire et la ballade du mouride) d'Abou Madiane Chouaib, autre grand soufi du Maghreb qu'Ibn Al Arabi, dont les nombreuses œuvres ont été largement diffusées dans Al Andalous par ses disciples. Chacun des soufis andalous avait commenté «Les noms divins» d'après une perspective determinée , tel Ibn Abbad de Ronda qui avait insisté sur la notion de «Taallouk» (attachement) dans l'invocation (Addâwa) ; Abderrazzak Al koussani à partir de la perspective exclusive de «Tahakkouk» (precision et spécification), Al Ghazzali, Ibn Barrayane ou Al Kounaoui qui avaient utilisé des dénominations unissant le « tahakkouk » et le «takhallouk» (les bonnes manières). La «Khatima» (Conclusion), quatrième et dernière partie, apporte uniquement et en peu de mots des indications sur les lieux et la date de la rédaction du manuscrit. La traduction de ce manuscrit s'est faite sur la base de six copies manuscrites de «Kitab kachf al maâna as – sirri ân asmaa Allah al housna» qui sont conservées á la bibliothèque Solaymania d'Istanbul. L'œuvre a été écrite au mois de ramadan de l'an 621 de l'hégire (1124) à Damas, ville où fut enterré Ibn Al Arabi en l'an 638 de l'hégire (1240). L'immense œuvre d'Ibn Al Arabi, qui compte plus de 300 titres, constitue une valeureuse référence pour l'étude de la pensée islamique et continue actuellement d'être une matière à commentaire dans le monde musulman et occidental. Les traductions de «Kitab kachf al maâna as – sirri ân asmaa Allah al housna» est un hommage à titre posthume rendu à Ibn al Arabi par les intellectuels occidentaux, particulièrement ceux de Murcie qui en ont fait un symbole de leur histoire. A suivre ...