Quel budget pour 2012 et quelle sera la politique économique que mènera le prochain gouvernement ? On ne peut s'empêcher de poser la question. Ici et maintenant. Certes, sur l'agenda, après le référendum sur la constitution, la priorité était aux échéances électorales ; un dossier urgent - qui a mobilisé autorités publiques et formations politiques pour dégager un consensus, fixer une feuille de route. Chose faite aujourd'hui: les élections législatives auront bien lieu le 25 novembre 2011. Maintenant, sur le plan économique, quel est l'état de santé du Maroc ? Qu'on ne s'y trompe pas. La situation est grave. Loin de l'optimisme ambiant, l'économie du pays est menacée de faiblesse, par son endettement, ses déficits budgétaire et commercial, son chômage et son insuffisante croissance. La Loi de finances pour 2011 prévoit une croissance supérieure à 5% et un déficit budgétaire limité à 4%. Il faut dire qu'à mi-chemin, une fois encore, la conjoncture internationale se joue de nos prévisions. La hausse vertigineuse des factures alimentaire et pétrolière -comme l'année dernière- pose un gros problème : celui de l'augmentation du déficit public. En effet, les charges de compensation dépasseront la barre des 42 milliards DH, soit 25 milliards de plus que ce qui est prévu initialement. Il faudrait y ajouter d'autres dépenses additionnelles en relation avec le dialogue social, notamment une augmentation généralisée des salaires des fonctionnaires, dont le coût avoisinerait les 3 milliards DH. Au final, ces dépenses non prévues, atteindraient 28 milliards DH. Ainsi, le déficit public évoluerait près à des 57 milliards DH, soit l'équivalent de 6,8% du PIB, selon les économistes d'Attijariwafa bank. Une situation que certains observateurs n'hésitent pas à qualifier de «difficile et insoutenable». Au-delà des stigmates de la crise économique et financière mondiale, l'économie marocaine reste fortement vulnérable et moins compétitive. Les chiffres officiels pour le premier semestre laissent planer le doute quant à la capacité de préserver les équilibres macroéconomiques. La balance des paiements commence, cette fois-ci, à pencher dangereusement. Pourtant, notre pays continu à se payer le luxe d'importer toujours plus, y compris des accessoires superflus, alors que nos exportations, principal levier de croissance, étant de faible teneur technologique, couvrent à peine notre déficit commercial. Résultat : le déséquilibre de la balance commerciale se creuse davantage et nos réserves en devises se vident au fil de l'eau. Autrement dit, le pouvoir d'achat du pays faiblit. Et alors, diriez-vous, ce n'est pas la fin du monde ! Après tout, le Maroc ne manquera pas de pain ni de beurre... Sans doute. Mais cette fois-ci, la donne a changé : l'équilibre budgétaire est désormais constitutionnalisé. L'article 77 de la nouvelle constitution consacre cette responsabilité. C'est un retour à l'orthodoxie budgétaire. Un changement de taille. Se pose alors cette question : quelle sera la marge de manœuvre du prochain gouvernement ? Aura-t-il des outils dans sa musette ? Quelle politique économique à suivre pour être en adéquation avec les attentes du pays et des Marocains ? D'ores et déjà, de nombreux risques pointent le bout de leur nez, dans le contexte économique mondial d'aujourd'hui : hausse continue des prix des matières premières; aggravation du déficit public et problème de l'endettement de l'Etat… sans oublier l'emploi des jeunes diplômés, la sécurisation des caisses de retraite, la généralisation de l'accès aux soins de santé, la lutte contre l'habitat insalubre, la modernisation de l'enseignement, la mise à niveau du monde rural, etc. Des chantiers qui nécessitent de nouveaux investissements, donc de nouvelles dépenses. Or, sur ce point, l'avis des experts du FMI est différent : la maîtrise des dépenses est une priorité. De leur point de vue, les dépenses budgétaires ne doivent pas augmenter plus vite que l'inflation. Cette stabilisation du niveau de la dépense publique suppose une baisse de la masse salariale dans la fonction publique. Autrement dit, une réduction des effectifs des fonctionnaires. Dans ses conclusions préliminaires, la mission du FMI, qui a séjourné au Maroc au mois de juillet dernier, souligne qu' «une réforme de la fonction publique devrait ramener la masse salariale à environ 10% du PIB dans les prochaines années. De même, une réforme de subventions aux produits pétroliers remplaçant la subvention universelle par un programme de transferts ciblés réduirait sensiblement la charge budgétaire et éliminerait les vulnérabilités des finances publiques face aux fluctuations des cours internationaux de matières premières tout en rationalisant la consommation». La mission du FMI estime qu'en 2012, «les autorités marocaines devraient considérer la réorientation des dépenses publiques et retrouver un niveau de déficit budgétaire soutenable à moyen terme». Le défi principal pour le Maroc, aux yeux des missionnaires du FMI, est «de ramener le déficit budgétaire à moyen terme à environ 3% du PIB, ce qui permettrait de ramener l'endettement total du Trésor à environ 50% du PIB». Faut-il comprendre que le FMI préconise plus de rigueur budgétaire voire un plan d'austérité ? Car, dans son rapport, rendu public la semaine dernière, la politique budgétaire du gouvernement est formellement épinglée. La hausse des déficits et de la dette y est décrite comme un péché, une sorte de dépassement des repères. Le FMI ne s'empêche pas de préconiser une réforme fiscale dans le sens d'une augmentation du produit des prélèvements. Un point qui risque de rendre plus tendues les relations entre le gouvernement et les milieux d'affaires marocains. Ces derniers, depuis deux années déjà, réclament une baisse significative de la pression fiscale. C'est un élément clé de la compétitivité de l'économie marocaine, précisait Mohamed Horani, président du patronat marocain. Alors baisse des dépenses ou hausse des impôts ?