Le Parti du progrès et du socialisme se recueille ce samedi sur la tombe d'Ali Yata, à l'occasion du XIVè anniversaire de sa disparition. L'acte ne relève pas seulement de la fidélité aux idéaux communs et de la reconnaissance à la vie militante d'un grand dirigeant politique. Une bonne partie de son combat demeure d'une actualité brûlante. Fondateur du Parti auquel il est resté fidèle jusqu'à la mort, l'homme avait marqué le Maroc d'avant comme d'après l'indépendance, par son patriotisme hors pair, sa lutte inébranlable pour l'indépendance et son combat inlassable pour la démocratie et la justice sociale. Engagé jeune dans le mouvement nationaliste, Ali Yata avait adhéré au Parti communiste du Maroc, composé, à l'époque, presqu'exclusivement d'Européens particulièrement de Français, dès sa création en 1943. Durant la période postindépendance, il avait milité, avec une pléiade de militants dévoués à la cause patriotique et populaire, sur deux fronts : la lutte inébranlable contre l'occupation étrangère et le combat constant pour l'émancipation sociale de la classe ouvrière marocaine, qui ne devait pas « attendre l'arrivée au pouvoir des partis ouvriers » dans les pays capitalistes et colonisateurs. Pour cette fin, il parviendra, quelques années plus tard, à « marocaniser » la direction du Parti communiste, tout en étant un farouche adepte de l'internationalisme prolétarien. Ce changement allait donner un véritable coup de fouet à l'action du PCM et son fer de lance armé le « Croissant noir », qui allaient donner du fil à retordre à l'occupant, malgré la répression féroce des patriotes. Les dirigeants du PCM payèrent un tribut lourd de leur engagement révolutionnaire (clandestinité, emprisonnement, torture). C'est d'ailleurs à la prison de Fresnes qu'Ali Yata apprit en 1952 la naissance de ses deux enfants gémeaux, alors que le Parti était interdit et ses dirigeants et militants traqués. Feu Sa Majesté Mohammed V avait reconnu le rôle joué par les communistes marocains dans la lutte pour l'indépendance du Maroc, en recevant, après son retour d'exil, une délégation de la direction du PCM. Mais les peines du PCM continuèrent après l'indépendance. Le PCM sera interdit en 1959 et le Parti de la libération et du socialisme, continuateur des luttes des communistes marocains, n'aura une vie légale que de 14 mois pour être dissolu en 1969. Il va falloir attendra l'avènement du processus démocratique en 1974 pour que le Parti du progrès et du socialisme voit le jour pour poursuivre le combat de la concrétisation des contenus de l'indépendance nationale et de la marche vers la démocratie revendiquée dès la libération du pays du joug colonial. Mais dans tous ces combats, Ali Yata avait une faculté inouïe d'adaptation, malgré la rude répression, et n'a renié, à aucun moment, ses convictions idéologiques, en faisant preuve de réalisme et d'innovation. Il laissera l'image du combattant inlassable de la liberté et de la démocratie, de défenseur intraitable des démunis et de militant internationaliste qui plaide les causes des peuples. Les populations amazighes se souviennent encore de son intervention historique en faveur de la constitutionnalisation des droits et de la langue amazigh, devant le Parlement il y a presque trois décennies. Dans ce sens, il faudra rendre un hommage particulier à Ali Yata pour avoir été l'un des grands artisans de l'alternance démocratique qui amena Abderrahmane Youssoufi et la Koutla démocratique au gouvernement en 1997, quelques mois après la disparition cruelle du vétéran du PPS. Aujourd'hui, quatorze années après, le Maroc poursuit cette marche consensuelle qui fait sa force et forge le respect à l'échelle internationale, en s'appuyant sur les acquis de la génération des contemporains d'Ali Yata. A l'heure des grandes mutations que le pays s'apprête à opérer, une pensée particulière est à adresser à tous ses compagnons, ces hommes et ces femmes qui ont tout donné et sacrifié pour que le peuple marocain puisse acquérir sa dignité et avancer sur le chemin de la liberté, de la démocratie et du progrès social. La génération nouvelle peut s'enorgueillir de poursuivre le chemin tracé par ces aînés qui ont tout donné sans rien réclamer en échange, en puisant sur ce legs inestimable de modestie, de responsabilité et de sérieux. Bel exemple d'altruisme qui fait cruellement défaut par les temps qui courent.