Une victoire pour l'Association démocratique des femmes marocaines (ADFM) et donc pour le Maroc. La rencontre initiée par l'Association vendredi 9 juin, à laquelle ont été conviées les associations féminines du monde arabe et les ligues des droits de l'Homme, aura été, de l'avis des participantes et des organisatrices une réussite. D'abord en termes de présence. «Rassembler à la fois des associations féminines et de droits humains a été une véritable gageure», avoue Rabea Naciri, présidente de l'ADFM. Il s'agit pour elle d'une prise en compte encore plus grande du problème des droits des femmes. La présence d'officiels marocains – et pas des moindres- dont le Premier ministre Driss Jettou et Mohamed Bouzoubaâ, ministre de la Justice, est un gage supplémentaire de l'engagement du Maroc en faveur de l'égalité hommes/femmes. «Il nous reste toutefois encore beaucoup à faire», rétorque Naciri. Mais ce sont surtout les débats au cours de la journée et les recommandations adoptées qui constituent la véritable réussite de la rencontre. Toutes les femmes, qu'elles soient marocaines, tunisiennes, saoudiennes ou koweïtiennes se sont mises d'accord sur la nécessité de lever les réserves sur la convention Cedaw. En clair, cela signifie la revendication de l'égalité dans tous les domaines de la vie politique, économique, sociale ou culturelle. Les termes de la convention sont pourtant clairs. Les pays signataires, au nombre de 179 jusqu'à présent, sont tenus de respecter les termes de la convention internationale. Celle-ci prône l'élimination de toutes formes de discrimination à l'égard des femmes. Il existe également un protocole de la convention dont la signature reste toutefois facultative. Théoriquement, tout pays ayant ratifié la convention ne procède à aucune discrimination fondée sur le sexe. Donc aucune différence dans le domaine du mariage, de la vie politique, de la liberté de circulation… «Ce qui est loin d'être le cas de nombreux pays», estime la grande majorité des féministes. Le Maroc, considéré pourtant comme «largement avancé» en la matière, devant l'Arabie saoudite et même la Tunisie, est loin de se conformer à la législation internationale prônée par la convention. Les inégalités persistent en effet dans plusieurs domaines. Et, malgré la levée des réserves en mars dernier (www.leconomiste.com), la vie au quotidien ne semble pas avoir assimilé ces principes d'égalité. L'adoption du code de la famille est un des éléments moteurs fondamentaux dans l'initiative de lever ces réserves. Les articles de la convention concernés par cette levée de réserves sont principalement les articles 2, 9, 16 et 29. Chacun d'entre eux consacre le principe de l'égalité dans un domaine précis: code de la nationalité, égalité au sein du couple… «Le Maroc a encore beaucoup à faire. Regardez, ne fût-ce qu'en ce qui concerne le code de la nationalité, il n'y a aucun texte qui est prêt», insiste Naciri. Il n'empêche. Le pays a accompli des pas de géant. Malgré les résistances, certaines forces conservatrices qui s'opposent à cette «ouverture», il a réussi à proclamer des lois égalitaires. L'ADFM va à présent procéder à une campagne régionale de levée des réserves. La date n'est pas encore fixée. L'initiative est de taille. Le monde arabe est aujourd'hui confronté à un dilemme entre les souhaits d'adoption de lois égalitaires et la montée d'intégrismes opposés à toute modification des textes en vigueur. C'est sans doute la raison pour laquelle les recommandations finales de la rencontre ont précisé que les discussions pour la levée des réserves devaient se faire en tenant compte du «contexte politique». «Il est certain que certains pays avanceront plus rapidement que d'autres eu égard à leur système politique», explique la présidente de l'ADFM. Certains points de l'égalité demeureront cependant difficiles à mettre en place. A moins que des décisions de très haut niveau ne soient prises. C'est le cas de l'héritage. Une chose est sûre : le combat pour l'égalité est loin d'être gagné. Associations féminines et ligues des droits de l'homme s'engagent dans ce combat, désormais commun. L'héritage en débat Avec les codes de la famille et de la nationalité, le Maroc a effectué un grand pas en avant dans l'égalité hommes/femmes. Les lois de l'héritage n'ont par contre subi aucune modification. Le seront-elles un jour? «Il faudra de toute façon s'attaquer à cette question»,estime Fouzia Assouli, secrétaire nationale de la Ligue démocratique des droits des femmes, puisque «on ne peut imaginer l'égalité dans tous les domaines sauf dans celui de l'héritage». Source: