La police russe a interpellé dimanche des homosexuels défendant leur droit d'organiser une "gay pride" dans le centre de Moscou, où des nationalistes ont roué de coups des manifestants en criant "mort aux homosexuels". La police anti-émeutes a arrêté ces manifestants - au nombre desquels se trouvaient deux députés européens - alors qu'ils tentaient de remettre au maire de la ville, Iouri Loujkov, une pétition réclamant la levée de l'interdiction pesant sur ce type de défilés, qu'il avait qualifié par le passé d'"acte satanique". Des nationalistes et des ultra-orthodoxes russes ont manifesté en brandissant des icônes et en dénonçant l'homosexualité. Un groupe de jeunes gens solidement bâtis se sont présentés équipés de masques chirurgicaux, destinés selon leurs termes à les protéger de la "maladie homosexuelle". "Nous défendons nos droits", a déclaré un jeune homosexuel qui saignait du nez après avoir été brutalisé par un homme hurlant "les homosexuels sont des pervers", devant les bureaux du maire de la capitale. L'agresseur a été interpellé. "C'est atroce, mais cela ne me fait pas peur. C'est un endroit assez effrayant, un pays assez effrayant pour les homosexuels. Mais nous ne persisterons jusqu'à ce qu'ils nous permettent d'exercer nos droits", a-t-il ajouté. Un célèbre défenseur britannique de la cause homosexuelle, Peter Tatchell, a été jeté au sol et frappé à deux reprises. Quand il s'est relevé, il a été frappé une nouvelle fois au visage et emmené par deux policiers anti-émeutes. Plusieurs centaines de policiers avaient pris position de part et d'autre de la rue Tverskaïa, dans le centre de Moscou, et des policiers en civil se sont mêlés aux journalistes russes et étrangers, présents en nombre. Contacté par téléphone au commissariat où il a été conduit, l'organisateur de la marche, Nikolaï Alexeïev, a déclaré à Reuters qu'une trentaine de personnes avaient été interpellées. La police a pour sa part évoqué une vingtaine d'arrestations. MERKEL PRIÉE DE SOULEVER LE PROBLÈME AVEC POUTINE "Nous sommes au commissariat en ce moment même. Nous avons été arrêtés devant les bureaux du maire au moment de déposer notre position", a-t-il dit. "Ils nous maintiennent en garde à vue cette nuit et nous serons présentés à un tribunal demain." Marco Cappato, un eurodéputé italien, a lui aussi été arrêté pendant la manifestation, mais il a par la suite été libéré. L'homosexualité n'est plus un délit réprimé par la loi en Russie depuis 1993, mais l'homophobie y est très répandue. "Nous pensons que ces pervers ne devraient pas être autorisés à défiler dans les rues de Moscou, la troisième Rome, une ville sainte pour tous les Russes", a déclaré à Reuters Igor Mirochnitchenko, qui s'est présenté comme un fervent orthodoxe venu soutenir la police anti-émeutes. "(L'homosexualité) est satanique", a-t-il ajouté. Un homme muni d'un crucifix a menacé de s'en servir pour frapper tout homosexuel qui croiserait son chemin. Volker Beck, un membre du Parti vert allemand et défenseur de la cause homosexuelle, a reçu des oeufs au visage avant d'être arrêté par des policiers anti-émeutes. "Nous n'avons rien fait", a-t-il dit à Reuters avant d'être emmené par les policiers. Il a par la suite été relâché. La présidente des Verts, Claudia Roth, a appelé la chancelière allemande Angela Merkel à évoquer la question des droits de l'homme avec le président russe Vladimir Poutine lors du sommet du G8 prévu le mois prochain en Allemagne. "On a vu une fois encore, aujourd'hui, que les droits de l'homme faisaient l'objet de violations systématiques dans la Russie de Poutine", a-t-elle déclaré dans un communiqué. Selon Scott Long, un militant de Human Rights Watch, ONG de défense des droits de l'homme, "ça se voit quand des gens sont arrêtés devant les bureaux du maire alors qu'ils ne faisaient rien d'autre qu'essayer de déposer une pétition pacifique". "On n'a pas vraiment essayé de séparer les deux camps et, par conséquent, des gens ont été passés à tabac. Je conseillerais aux autorités russes de protéger la liberté de réunion et la liberté d'expression, et de protéger les manifestants."