Le sommet de Riyad a voulu remplacer la « feuille de route » par un plan stipulant l'évacuation de tous les Territoires occupés. LE SOMMET de la Ligue arabe s'est terminé hier à Riyad par une main tendue à Israël. Les pays membres demandent à l'État hébreu d'accepter le plan de paix arabe de 2002 : la normalisation des relations en échange d'un État palestinien dans les frontières de 1967, avec Jérusalem-Est pour capitale, et une solution au retour des réfugiés. Le plan de paix comporte aussi un projet d'accord avec la Syrie sur le plateau du Golan, occupé par Israël depuis 1967. Le numéro deux israélien, Shimon Pérès, a refusé immédiatement la proposition arabe, car alors « des négociations n'auraient plus de raison d'être ». Les dirigeants arabes sont restés fermes tout en laissant la porte ouverte. « Nous leur disons : acceptez l'initiative de paix d'abord, puis venez à la table de négociations afin que l'on puisse parvenir à un règlement juste », a déclaré le secrétaire général de la Ligue arabe, Amr Moussa. Les Arabes se sont contentés de remettre sur la table leur plan initial, élaboré en 2002. Mais cette nouvelle offre solennelle est lancée dans un contexte différent, où les États-Unis, seul arbitre admis jusqu'ici par les deux parties, sont affaiblis par leur échec en Irak, et où le premier ministre israélien atteint des records d'impopularité. L'offre arabe est en outre soutenue par le gouvernement d'union nationale palestinien, même si son premier ministre Hamas, Ismaïl Haniyeh, n'a dit oui que du bout des lèvres, acceptant de « ne pas s'opposer » au plan de paix commun. Le président palestinien, Mahmoud Abbas, issu du Fatah de Yasser Arafat, s'est montré plus enthousiaste, saluant « l'offre la plus importante depuis 1948 », date de la création d'Israël. Compensations pour les réfugiés palestiniens Le plan de paix arabe est appuyé par les grands pays musulmans représentés à Riyad par leurs dirigeants, comme le président pakistanais Musharraf et le premier ministre turc Erdogan. Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a déclaré avoir « exhorté (ses) amis israéliens à envisager sous un nouveau jour cette initiative ». La réaction israélienne délimite les deux positions en présence. Les Israéliens, qui ont fait un pas en proposant des négociations régulières avec les Palestiniens, refusent de se voir fixer à l'avance le but à atteindre. Les Arabes veulent eux aussi des négociations entre Israéliens et Palestiniens, mais sur la base de leur plan de paix. Cela ne signifie pas qu'il n'y a rien à négocier, a dit le secrétaire général Amr Moussa, qui propose aux deux parties de débattre sur les portes laissées ouvertes par le texte. Ce dernier permet des aménagements de détail sur les frontières, et des arrangements sur le problème des réfugiés. Sur ce point, le plan arabe se contente de citer la résolution 194 de l'ONU, assez vague. Amr Moussa a mis les points sur les «i». Les réfugiés de 1948 et leurs descendants pourront choisir des compensations au lieu de revenir en Israël. Ce compromis avait déjà été accepté officieusement par Yasser Arafat. Les Israéliens refusent jusqu'ici cette solution, qui à leurs yeux consacrerait « l'illégitimité » de l'entreprise sioniste. Pour les Arabes, et en particulier les Saoudiens, à l'origine du plan de paix de 2002, l'objectif diplomatique est de taille. La Ligue arabe ne vise rien de moins que de remplacer le seul plan de paix admis officiellement par toutes les parties, la « feuille de route » présentée en 2003. Cette dernière avait justement le tort, selon les Arabes, de tracer le chemin vers le règlement final sans préciser son contenu. Pour la première fois, la diplomatie saoudienne prononce le constat de décès de ce plan soutenu par le quartette (États-Unis, Europe, Russie et ONU). « »La feuille de route* ? Quelle feuille de route ? », s'est exclamé le ministre saoudien des Affaires étrangères, le prince Saoud al-Fayçal, devant le correspondant du Figaro. Pour le prince, la route n'existe pas « car on n'en voit ni le début ni la fin ». Le plan de paix arabe était pourtant mentionné, mais en passant, dans la «feuille de route» de 2003. Les Arabes y voient une preuve supplémentaire de l'incohérence du document du quartette. En le dénonçant, l'Arabie saoudite se démarque de son allié américain. Après avoir été à l'origine du gouvernement d'union palestinien, récusé par Israël et Washington, le roi Abdallah cherche désormais à se poser en leader du monde arabe et musulman.