Des associations de parents d'élèves et fédérations syndicales font part de leurs craintes quant à la suppression annoncée de postes de professeurs et, globalement, l'organisation des écoles françaises au Maroc. «A quand les Jeux olympiques au lycée Lyautey ?», s'interroge, non sans ironie, Adil Touhami, l'un des porte-parole des parents d'élèves des établissements scolaires français au Maroc. Et pour cause, lundi 4 février leur a été annoncé le projet de construction d'une piscine olympique au lycée Lyautey, à Casablanca. S'il a de quoi séduire sur le papier, son coût fait en revanche l'effet d'une douche froide : 4,7 millions d'euros (environ 50 millions de dirhams). En réalité, cette annonce ravive les inquiétudes déjà très fortes exprimées à plusieurs reprises par les familles. Celles-ci redoutent une nouvelle hausse des frais de scolarité. «Les parents vont s'endetter sur dix ans car l'établissement va devoir faire un crédit pour financer ce projet. Les frais vont donc automatiquement augmenter, même si une partie va être payée avec les fonds de réserve que le lycée a constitués. Le tout pour quelle plus-value pédagogique ?», s'inquiète Adil Touhami, président de l'Association des parents indépendants des établissements français au Maroc. Les inspections ? «Des visites de courtoisie» Aux yeux des parents d'élèves, cette piscine olympique est loin d'être une priorité. La suppression de postes d'enseignants leur donne du fil à retordre. «Sur le pôle Rabat-Kénitra, 10 postes ont été fermés pour l'année 2018-2019. Pour 2019-2020, il faudra s'attendre à une suppression de vingt postes – 10 à Casablanca et 10 à Rabat. Déjà l'an dernier, avec la fermeture de postes d'enseignants en lettres sur Rabat, les élèves ont manqué un mois et demi de cours. Il n'y a pas de viviers de professeurs en lettres car c'est un enseignement spécifique», souligne Adil Touhami. «Les postes supprimés ne sont pas compensés par des postes de personnel de droit local (ces derniers sont entièrement pris en charge par l'établissement et ne dépendent pas de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger, ndlr). Il est de plus en plus difficile de trouver des personnes qualifiées à l'échelle locale, même pour des remplacements de congés maladie ou maternité. Par conséquent, des options et des spécialités ne peuvent plus être enseignées», confirme Hamid Laaroussi, professeur de mathématiques et président de la Fédération syndicale unitaire (FSU), majoritaire dans le réseau de l'enseignement français à l'étranger et en France. Le bât blesse également du côté de la formation des enseignants. «Quand on ferme un poste résident, on ouvre un poste local qui est à la charge des parents. Le problème, c'est que les personnes recrutées ne sont pas toujours formées et, quand elles le sont, leur formation est organisée durant les périodes de cours, plutôt qu'en amont. Or elle doit être prévue avant le recrutement, pas après», estime Adil Touhami. Autre problème : les contrats locaux ne peuvent faire l'objet d'inspections. «Ce ne sont que des visites de courtoisie, ajoute notre interlocuteur. Les inspecteurs viennent mais ne peuvent réellement contrôler la qualité du travail des enseignants car ces derniers ne dépendent pas du ministère de l'Education nationale.» Un rapport alarmant Des propos qui résonnent avec ceux de Mounya Dinar Krisni, présidente de l'association des Parents d'élèves des établissements publics français au Maroc (PEEP). «Concrètement, cette réduction du budget [de l'AEFE] va se traduire par une diminution des postes d'enseignants titulaires pour faire des économies. Par conséquent, soit le poste sera fermé dans le pire des cas, soit, dans le meilleur des cas, il sera remplacé par des contrats locaux. Les contrats locaux coûtent certes beaucoup moins cher, mais quid de la pédagogie ? Quid de la qualité de l'enseignement ? Quid de la formation ?», s'inquiétait cette responsable associative. Pour rappel, à deux mois de l'annonce d'une réforme des lycées français à l'étranger, la députée Samantha Cazebonne, ancienne chef d'établissement au Maroc et en Espagne, a remis un rapport au gouvernement, dans lequel elle préconise une réforme «en profondeur». Le système souffre notamment d'une baisse des crédits publics qu'il tente de compenser par une hausse des frais de scolarité (plus 60% en dix ans), provoquant la colère des familles. En mars 2018, quatre associations de parents d'élèves au Maroc avaient envoyé un courrier au directeur de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE), Christophe Bouchard, pour faire part des dysfonctionnements qui subsistent et proposer des solutions. Elles se plaignaient des suppressions de postes et des recrutements caducs, entre autres.