A six mois des élections présidentielles en France, l'UMP met les bouchées doubles pour gagner des voix et attirer dans ses filets les électeurs du Front National. Le parti a annoncé hier vouloir faire ressurgir une loi de 1993 signée Charles Pasqua, une loi rendant plus difficile l'acquisition de la nationalité française pour les enfants nés en France, de parents étrangers. C'est autour d'un atelier intitulé "La Nation dans la mondialisation" à l'Assemblée Nationale que les membres de l'UMP se sont retrouvés hier pour préparer le programme de Nicolas Sarkozy, en vue des élections présidentielles de 2012. L'occasion d'annoncer leur souhait de ressusciter la loi Pasqua de 1993 et de supprimer le droit au sol. Contexte historique Cette année-là, en 1993, la droite vient de remporter les élections législatives. Le ministre de l'Intérieur qui n'est autre que Charles Pasqua met en place une nouvelle réglementation pour limiter l'immigration. Il réforme ainsi le Code de la Nationalité qui demande à tous les enfants nés en France et de parents étrangers de faire une demande écrite et volontaire pour avoir la nationalité française, lorsqu'ils ont entre 16 à 21 ans. Cela veut tout simplement dire que l'obtention de la nationalité à la majorité n'est plus automatique, une obtention qui existe depuis 1889. En réalité, c'est en 1851 que les conditions d'acquisition de la nationalité françaises sont assouplies et qu'est instauré le droit du sol : est Français à la naissance tout individu né en France d'un parent qui est lui-même né en France. Nous sommes en pleine révolution industrielle. La population de la France diminue. Le pays décide donc d'attirer plus d'étrangers sur son territoire. Ce sont surtout les Belges, les Suisses et les Allemands qui débarquent sur le sol français pour travailler dans les usines françaises. Ensuite, la guerre éclate entre la France et l'Allemagne. En 1871, les Français perdent l'Alsace-Lorraine. Une défaite difficile à avaler. Pour augmenter ses troupes dans l'armée et éviter que les étrangers n'échappent au service militaire, le gouvernement français décide donc de faire évoluer la loi de 1851. C'est à ce moment qu'il déclare Français toute personne née en France et qui y réside. "Des CDD de la nationalité française" Il faudra attendre 1998, avec le gouvernement socialiste de Lionel Jospin pour que la loi de Pasqua, concernant la démarche volontaire de nationalité soit supprimée avec la loi Guigou. C'est justement cet élément précis que veut faire revivre l'UMP aujourd'hui. Un étranger né en France devra, dès ses 18 ans faire une demande écrite pour avoir la nationalité française. Alors, qu'"actuellement, en vertu du droit du sol, tout enfant né en France de parents étrangers devient, sauf refus de sa part, automatiquement français à sa majorité, s'il vit en France ou à vécu en France pendant cinq ans depuis ses 11 ans", rappelle le Monde. De plus, l'UMP souhaite mettre également en place, ce qu'il appelle, "une cérémonie d'entrée dans la vie citoyenne en mairie" dédiée à tous les jeunes de 18 ans qui souhaitent avoir la nationalité française. Pourtant, redonner vie à la loi Pasqua ne crée pas l'unanimité chez les membres de l'UMP, indique Le Monde. Jeannette Bougrab, la secrétaire d'Etat à la Jeunesse qui a participé à l'atelier, "s'est élevée contre certains mots qui blessent" et qui ont été prononcés par certains des intervenants. Elle a réagi surtout lorsque l'historien Dimitri Casali et l'écrivain Malika Sorel-Sutter, avaient dans leur exposé, parlé de "déficit d'intégration, une mauvaise maîtrise du français et une ghettoïsation des immigrés plus voulue que subie". Par ailleurs, Arno Klarsfeld, proche du Président Sarkozy et président de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a prévenu que cette loi pouvait "faire des jeunes qui ont toutes leurs attaches en France, des CDD de la nationalité française". Du côté des socialistes, la première à avoir fait part de son mécontentement, via un communiqué de presse, est Najat Vallaud-Belkacem, la secrétaire nationale du PS. Elle a dénoncé "l'inexorable dérive de la droite républicaine. Le Front national et la Droite populaire peuvent se réjouir: ils viennent de remporter une victoire idéologique et politique majeure au sein de l'UMP qui renonce, dans l'élaboration de son programme présidentiel, au droit du sol dans l'acquisition de la nationalité française". Enfin, le comble dans ces réactions, est que le Front National a également critiqué l'intention de l'UMP de remettre à jour la loi Pasqua. "Il y a là une tentative désespérée du président de la République, un cheval en bout de course, qui court après les électeurs du Front national à l'approche de la présidentielle", a déclaré à Europe 1, Gaël Nofri, l'un des collaborateurs de Marine Le Pen. "Si l'UMP tenait vraiment à ce projet, pourquoi ne pas l'avoir fait appliquer ces dix dernières années. On a à faire à un effet d'annonce", conclut-il.