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Faouzi Bensaïdi : «La finance a fait élargir une base de sous-prolétariat» [Interview]
Publié dans Yabiladi le 19 - 03 - 2018

Le 19e Festival national du film de Tanger s'est clôturé en beauté pour Faouzi Bensaïdi. Le réalisateur de Volubilis y a remporté pas moins de sept prix. Entretien avec un artiste qui a su imager avec brio la déshumanisation d'un monde où la finance est légion.
Là où il est présenté, le dernier opus de Faouzi Bensaïdi séduit. Après une avant-première très remarquée à la Mostra de Venise (août 2017) et une distinction aux Journées cinématographiques de Carthage (JCC – novembre 2017), Volubilis a bien conquis le jury du 19e Festival national du film de Tanger, clôturé samedi dernier.
Ainsi, Volubilis a remporté le Grand prix du jury, les prix du scénario, du premier rôle féminin, du premier rôle masculin, de la musique originale, ainsi que les prix de la critique et des ciné-clubs dans la catégorie long-métrage. Cette récompense septuple vient quelques mois après la distinction du film par le Tanit de bronze aux JCC.
Volubilis est l'histoire des vestiges d'une vie rêvée, qui a été avortée avant son éclosion. D'un monde où tout est régi par la finance (rythme quotidien, vie professionnelle, relations humaines…), Faouzi Bensaïdi peint ici le tableau désolant des répercussions de ce système sur la vie de couple, dans les bas-fonds de la vie ouvrière marocaine. Un chef-d'œuvre qui questionne l'humain – ou ce qu'il en reste – en chacun.
Votre film raconte une histoire très actuelle. Pourquoi avoir choisi de lui donner le nom d'une cité antique ?
Il y a plusieurs niveaux de lecture qu'on peut faire de ce choix. En effet, l'histoire est très réaliste et actuelle. Elle part de choses quotidiennes de la vie. Abdelkader, vigile dans un centre commercial à Meknès, est fou amoureux de Malika, employée de maison. Au lendemain de leur mariage, ils restent sous-payés mais rêvent d'avoir leur propre toit pour se créer un nouveau cocon familial. Leur situation financière les contraint de vivre chez leurs parents.
Par ailleurs, Volubilis est une cité romaine antique que traversent Abdelkader et Malika, à un moment du film. La séquence est charnière et prend une dimension presque mythique. Le couple fait une visite anodine à Volubilis et quelque chose bascule dans sa vie. On rentre alors dans la tragédie, dans sa dimension la plus universelle.
Vous abordez la question de la violence économique et notamment cet appauvrissement des classes ouvrières. Comment traduisez-vous cette problématique dans votre film ?
Je montre des émotions, pour voir comment cette réalité financière, sociale et politique influe sur la vie intime des personnes. J'essaie de montrer quel en est l'impact sur la vie d'un couple, qui ne demande finalement qu'un minimum : un toit, une dignité, une vie descente. Cette économie politique et cette manière de façonner le monde ont réduit ce dernier à l'argent et au profit.
Ce profit se fait sur le dos d'individus, des ouvrier, des «masses populaires». Cette économie du profit laisse à la marge beaucoup de gens. C'est une problématique mondiale à laquelle le Maroc n'échappe pas. Tous ces licenciements partout dans le monde nous disent qu'au moment où les sociétés gagnent le plus d'argent, ils licencient de plus en plus pour baisser le coût de production. Cette spirale infinie laisse aujourd'hui s'élargir cette base de gens sous-payés, un sous-prolétariat si j'ose dire. Avec mes outils de cinéma que sont la beauté, la fiction et l'humanité de mes personnages, je parle de toutes ces problématiques.
La finance a-t-elle donc fini par avoir raison de la vie privée des individus ?
Tout à fait. Sans parler de mes personnages, ces deux amoureux magnifiques, je peux donner plein d'exemples. J'ai fait ce film parce que j'ai vu autour de moi des divorces à cause du licenciement et du chômage. Des couples où le niveau de vie baisse, les reproches fusent, le sentiment d'humiliation et de culpabilité grandit… Tout cela a fait exploser des gens qui se sont aimés au départ. J'ai fait un film sur des ouvriers, mais ils ne sont pas en lutte syndicale dans leurs usines. Ils vivent les conséquences de leur situation professionnelle dans leur vie la plus intime, d'où peut-être l'originalité de ce film.
Par ailleurs, un amour n'est pas éternel. Il a besoin d'entretien, d'un terrain propice où il peut évoluer, s'émanciper, s'épanouir. Ce ne sont pas des choses acquises. Le film montre qu'à un moment, ce n'est pas de l'intérieur d'une relation que cet amour risque de disparaître. Elle fléchit sous le joug de ce système financier qui use petit à petit, façonne les attitudes des gens, leurs manières de penser, leur peur de l'avenir, du lendemain… Tout le monde sécurise contre tout le monde et l'explosion de certains petits métiers l'illustre parfaitement : les vigiles travaillent partout et sont souvent sous-payés, ce qui crée un fossé s'élargissant de jour en jour entre les individus d'une seule et même société.
Serions-nous, ainsi, dans un cercle fermé ?
J'ai une croyance absolue en la capacité de l'humain à changer, à s'améliorer et à rebondir. Si on accepte le principe du partage équitable pour faire sortir des gens de la misère, le monde ira mieux. Nous sommes à un moment où il existe plus que jamais des milliardaires, mais où il n'y a jamais eu autant de gens pauvres. Je pense que même pour que les gens riches vivent bien, ils doivent accepter la notion selon laquelle l'accès au minimum rendu possible à tous créera un univers plus égalitaire, permettant à toutes les personnes d'avoir un toit, de bénéficier de santé et d'éducation.
Dans Volubilis, on peut entrevoir une certaine continuité de vos trois longs-métrages précédents. Vous concevez vos œuvres comme une sorte de traits d'union composant une fresque universelle ?
Je pense que mes films sont tous, d'une manière ou d'une autre, dans un certain engagement. Je ne suis pas dans un engagement primaire qui porte des slogans, des paroles, sans toujours apporter une valeur ajoutée. Je pense qu'un artiste doit s'engager d'abord par ses œuvres, pas par la création de discours en occupant à outrance les médias, les réseaux sociaux… Il existe un lien justement entre tous mes films, qui sont du côté des laissés pour compte.
Dans une autre interview, vous estimez que «ce qui sauvera le monde arabe, ce sont les femmes». Pensez-vous que le contexte politique et social actuel le permettra ?
Ce n'est pas facile. Il faudrait que les hommes le comprennent et acceptent de laisser l'énergie et l'intelligence des femmes irriguer un peu plus le monde. Je pense que tout le monde s'en portera mieux. Cela s'illustre dans Volubilis, où Malika est un personnage pétillant. Je crois qu'elle arrivera à sauver son mari, finalement.


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