Comment, sans grand changements dans les textes, aboutir à pointer un peu plus du doigt les immigrés en Allemagne ? Le dernier projet de loi du gouvernement allemand en donne un exemple : Quelques formules, avec beaucoup de sous-entendus, suffisent. Insister sur l'obligation de participer aux cours d'intégration, par exemple, alors que ces cours sont encore loin de donner les résultats espérés. Autre moyen : Ressasser le sujet des mariages forcés et les mariages en blanc. Jeudi 17 mars, le parlement allemand a voté un projet de loi relatif aux mariages forcés et au droit de séjour des étrangers et des demandeurs d'asile. Avec les voix de la coalition gouvernementale des conservateurs (CDU/CSU) et des libéraux (FDP), le Bundestag a décidé, entre autres, de mettre en place une législation spécifique aux mariages forcés. Autre mesure : réussir les examens des cours d'intégration est une condition pour obtenir une carte de séjour permanente, et être «bien intégré» peut permettre à des jeunes étrangers (16-21 ans) tolérés en Allemagne d'obtenir un titre de séjour. Mariages forcés, mariages en blanc «Pour protéger les concernés, le combat contre les mariages forcés doit être renforcé», stipule le texte. L'opinion publique doit également être sensibilisée à «l'injustice qui est inhérente à tout mariage forcé». Mais à part instaurer le mariage forcé comme délit à part, alors qu'il relevait auparavant de la catégorie de l'abus de force, les moyens juridiques pour protéger les victimes n'ont pas beaucoup évoluées. Notamment, la peine maximale reste inchangée (5 ans); raison pour Josef Winkler, député des Verts au parlement allemand, de qualifier ces mesures de «purement symboliques». En revanche, le texte prévoit de rallonger la durée minimale qu'un étranger ou une étrangère doit être marié(e) avec un(e) Allemand(e) à 3 ans avant de pouvoir obtenir un titre de séjour allemand. L'abaissement en 2000 de cette période à 2 ans aurait «augmenté l'invite» pour faire des «mariages blancs». Pour Josef Winkler, cette mesure va à l'encontre même de l'objectif affiché, de protéger les victimes de mariages forcés. Participer aux cours d'intégration, une obligation nouvelle ? Le projet de loi contient également l'obligation de participer aux cours d'intégration et de passer les examens pour pouvoir prétendre à un titre de séjour permanent. Comme l'explique cependant Özlem Topçu, des mesures très strictes étaient déjà appliquées aux personne ne participant pas à ces cours. Selon cette journaliste de l'hebdomadaire Die Zeit, la seule réelle nouveauté consiste dans la restriction à un an des titres de séjours que l'on peut avoir tant que l'examen des cours d'intégration n'a pas été obtenu. Une nouvelle fois, cette loi semble relever plus de la symbolique que de réels changements sur le fond. Mais le symbole est fort. «L'impression que ce projet de loi doit évoquer, est : Les migrants prennent pas mal de temps à apprendre l'allemand», estime Özlem Topçu. Une autre mesure consiste à établir aux jeunes étrangers entre 15 et 21 ans un droit de séjour spécifique. Ils pourront avoir un titre de séjour permanent, mais à condition qu'ils prouvent leur «bonne intégration» en Allemagne. Devoir prouver l'intégration, voilà qui, aux yeux de Aydan Özoguz, député socio-démocrate (SPD), tend plutôt à empêcher l'intégration des jeunes en Allemagne. Le discours sur l'immigration pointe de plus en plus du doigt les migrants venus en Allemagne. Des sous-entendus évoquent leur manque de volonté de s'intégrer. Ce discours ne se cache même plus : un niveau d'intégration sera même mesuré par les autorités allemandes pour autoriser ou non aux jeunes étrangers de s'établir durablement en Allemagne. Le discours s'enfonce ainsi davantage dans l'idée d'une intégration à sens unique.