Alors qu'on l'attendait depuis plusieurs mois, la circulaire durcissant les procédures administratives relatives à la kafala vient finalement d'être publiée. Défavorables aux parents étrangers, elle ne précise toujours pas si les parents MRE sont eux aussi soumis au nouveau régime d'adoption. Une ambigüité qui inquiète le président de l'association «Kafala.fr», M. Abdel Jamil, et qui appelle à de nécessaires éclaircissements. Décryptage. C'est fait. Alors qu'on l'attendait depuis deux mois, la circulaire durcissant les procédures administratives relatives à la kafala vient finalement d'être publiée. C'est l'association «Kafala.fr», située en France, qui en a publié la première le contenu sur son site web, ce vendredi. Hélas, et comme anticipé, les nouvelles dispositions relatives à l'adoption des enfants abandonnées au Maroc ne sont pas favorables aux parents étrangers alors qu'elles restent toujours aussi ambigües en ce qui concerne les parents MRE. «Nos craintes se sont avérées être vraies. D'une part, la loi durcit clairement les procédures administratives d'adoption pour les parents étrangers ; d'autre part, elle ne précise toujours pas si les parents MRE sont concernés ou pas» nous confie M. Abdel Jamil, le directeur de l'association française. Durcissement des procédures pour les parents étrangers Pour commencer, la circulaire complexifie considérablement les procédures administratives de demande de Kafala pour les parents étrangers. Désormais, en plus de se convertir à l'Islam et d'adopter la nationalité marocaine, ces derniers vont devoir justifier d'une présence de fait sur le territoire marocain. Les procureurs auront ainsi pour charge «de vérifier à travers une enquête que le demandeur de la Kafala étranger réside habituellement sur le territoire national». Cette obligation de domiciliation vise à faciliter le suivi «du respect qu'apporte le Kafil à ses obligations légales qui, si non remplies, peuvent donner lieu à une annulation facile de la Kafala», stipule la circulaire émise par le ministre de la Justice et des Libertés, Mustafa Ramid. Le document constitue donc en soi une sacrée belle pierre d'achoppement pour les parents étrangers, et en particulier espagnols qui, comme le souligne l'agence de presse Efe, ont pris depuis 2002 (date de la promulgation de la première loi sur la Kafala) l'habitude de venir s'établir provisoirement au Maroc, de se convertir à l'Islam et de se naturaliser marocain, pour mieux repartir ensuite en Espagne, une fois l'enfant adopté. Mais quid des parents MRE ? Seront-ils soumis au même régime de Kafala que les parents étrangers ? Quid des parents MRE ? Force est de constater que la circulaire ne répond toujours pas clairement à cette question. Pourtant, la députée PJD et ex-MRE d'Italie, Nezha El Ouafi, avait été des plus claires au mois d'août à ce sujet : «Les Marocains d'ici et d'ailleurs ont toujours le droit d'entamer une procédure de kafala» avait déclarée la responsable PJDiste, ajoutant en marge que les parents MRE pourraient toujours emmener avec eux à l'étranger l'enfant marocain adopté. Qu'en est-il aujourd'hui ? Les promesses péremptoires de la députée se seraient-elles dissoutes dans le cloaque d'une circulaire alambiquée ? La seule phrase de la circulaire qui laisse entrevoir qu'un distinguo entre parents MRE et parents étrangers existe est la suivante : «Il en est autrement lorsque les postulants à la Kafala sont de nationalité étrangère ET ne résident pas au Maroc.» Autrement dit, les nouvelles dispositions de la circulaire ne semblent concerner que les parents de nationalité étrangère qui résident à l'étranger. Pour ce qui est des parents de nationalité marocaine, il semble en aller différemment, et ce qu'importe qu'ils vivent ici ou ailleurs. Cela dit, admettons qu'il est difficile d'émettre des conclusions aussi définitives sur la base de la présence d'un seul mot de liaison – «et» en l'occurrence. Eclaircissements à venir Pour obtenir plus d'éclaircissements, M. Jamil indique qu'il se frottera donc directement au ministre du parti de la Lanterne début octobre. «Les responsables de Kafala.fr seront en déplacement au Maroc du 5 au 12 octobre prochain (ndlr. Casablanca accueille le troisième salon de la petite enfance et de la Kafala le 6 et 7 octobre). Nous en profiterons pour demander à M.Ramid de vrais éclaircissements sur la question» affirme-t-il. En attendant, l'association a déjà commencé à recenser tout les couples MRE et étrangers qui se sont vus attribuer un enfant au cours des derniers mois. Elle compte en outre sur l'humanisme du ministre de la Justice dans la mise en application des dispositions de la nouvelle circulaire. Il doit faire passer les «liens affectifs» avant la volonté du législateur, indique M. Jamil. A ce propos, la circulaire ne stipule-t-elle pas d'ailleurs que : «la volonté du législateur à travers les dispositions de la kafala vise essentiellement à protéger l'intérêt supérieur de l'enfant marocain» ?