L'immigration Subsaharienne au Maroc prend une nouvelle ampleur au fil des années et les migrants en situation irrégulière sont de plus en plus nombreux. Cependant, la loi ne suit pas cette évolution. Il n'existe pas de statistiques officielles sur le nombre de Subsahariens sans papiers au Maroc. Les associations de droit de l'homme et les sources policières les estiment entre 10 000 et 20 000 personnes. Mais d'après une récente étude sur la migration irrégulière subsaharienne au Maroc, réalisée conjointement par le Conseil de la communauté marocaine de l'étranger (CCME), l'Institut de recherche sur les politiques publiques (IPPR, institut britannique) et l'Union Européenne, le nombre de Subsahariens sans papiers n'excède pas les 10 000, rapporte La Vie éco. Un chiffre «dérisoire» comparé aux 32 millions d'habitants que compte le Maroc, indique cette étude dont les résultats finaux seront révélés en décembre prochain. Arrivant généralement du Cameroun, de Guinée, du Sénégal, du Nigéria, du Ghana et bien d'autres, ils viennent soit pour transiter vers l'Europe, soit pour se réfugier, soit pour chercher du travail. C'est le cas d'Abdoulaye, un sénégalais de 21 ans, arrivé au Maroc en 2011 : «On nous disait que les Sénégalais sont bien traités au Maroc et y trouvent facilement du travail, je n'ai pas hésité», raconte-t-il. Mais depuis qu'Abdoulaye est arrivé, il ne s'est occupé qu'à de petites bricoles. Arrivés et refoulés à la frontière avec l'Algérie La majorité des migrants économiques rejoignent généralement le royaume via la frontière avec l'Algérie. Et c'est également à cette frontière que la police marocaine procède aux refoulements lors des rafles. En effet une série de rafles a lieu récemment et plusieurs subsahariens ont été reconduits aux frontières. Une action dénoncée par l'AMDH en juin dernier, puisque, selon l'association, les migrants refoulés «subissent des traitements inhumains, avec des coups et des insultes à connotations racistes et discriminatoires». Une situation dont la communauté sénégalaise s'est plainte à voix haute en mai dernier. Les lacunes de la loi Le Maroc n'est pas officiellement reconnu comme un pays d'immigration, mais il semble l'être devenu par la force des choses. En effet, le comportement des Subsahariens qui arrivent sur les terres du royaume depuis les années 2000, montre qu'ils sont de plus en plus nombreux à venir avec l'intention de s'installer. Au vu de cette tendance, le pays s'est doté d'une loi régissant l'entrée et le séjour des étrangers, ainsi que la migration irrégulière : La loi 02-03. Celle-ci prévoit en l'occurrence des amendes et des peines d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à six mois. Et même si elle est conforme aux engagements du Maroc au niveau international, le contenu de cette loi est principalement axé sur la sécurité : détention, expulsion et criminalisation de l'entrée ou du séjour irrégulier de migrants. Aussi, il existe un «fossé énorme» entre les dispositions de cette loi et son application, estime Issam Lahlou, avocat, secrétaire général de la section de l'Organisation marocaine des droits de l'homme (OMDH) de Rabat, et coordinateur du Centre d'assistance juridique aux réfugiés et demandeurs d'asiles. La loi «protège bien en théorie les mineurs et les femmes enceintes qui ne peuvent être expulsés, mais cette obligation n'est pas souvent appliquée», souligne-t-il. L'immigration de cette catégorie de personnes étant de plus en plus importantes, les avocats et les ONG de défense des droits humains estiment que le gouvernement marocain devrait mettre en place des mesures qui permettraient un meilleur traitement des immigrés subsahariens, «surtout avec la nouvelle Constitution de 2011». D'autant que le ministère de la Justice n'a toujours pas répondu aux doléances de ces ONG, en l'occurrence ABCDS et l'Association Rif. Celles-ci avaient demandé des éclaircissements sur la noyade en janvier dernier de trois Subsahariens près de Nador, «alors que des éléments des Forces auxiliaires étaient sur les lieux».