Moncef Marzouki, qui n'a jamais caché sa proximité avec le Maroc, a toutefois affirmé qu'il n'est pas partisan de l'ouverture d'un consulat tunisien à Laâyoune. «Cela compliquera davantage le problème du Sahara», a-t-il expliqué. Moncef Marzouki était l'invité virtuel d'une conférence, organisée ce samedi à Tanger par la Fédération marocaine des éditeurs de journaux (FMEJ). Une occasion pour le médecin, qu'il est, d'ausculter le corps malade du Maghreb. L'ancien président a attribué l'échec de l'intégration maghrébine au «facteur politique». Un diagnostic qu'il a déjà formulé à maintes reprises. Néanmoins, c'est à l'occasion du débat avec l'assistance que Marzouki a mis de côté son lexique habituel. En témoigne sa réponse à une question portant sur une éventuelle ouverture d'un consulat tunisien au Sahara. L'ancien chef d'Etat a, dans un premier temps, botté en touche l'interrogation, suggérant à son auteur de la poser plutôt à l'actuel président Kaïs Saïed qui est habilité à parler au nom de la Tunisie. «C'est un sujet dangereux pour moi de par ma qualité d'ancien président et de citoyen tunisien. Et pour cause certaines de mes déclarations ont soulevé des protestations de la part de parties officielles y compris au sein de l'Etat tunisien alors que je n'ai fait qu'exprimer mon opinion en tant que citoyen», s'est-t-il excusé au milieu des rires de la salle. Moins virulent envers l'Algérie Pour mémoire Marzouki a déjà pointé du doigt, dans ses interventions, la responsabilité de l'Algérie dans l'avortement de la révolution en Tunisie, l'échec de l'édification maghrébine et la prise en otage de l'avenir des Sahraouis. Le Parti Ennahda, majorité gouvernementale dont le chef occupe la présidence du Parlement, avait réagi dans un communiqué à ces accusations les qualifiant d'«insultantes envers l'Algérie soeur et d'irresponsables et insensibles aux relations fraternelles qui lient les deux peuples». En décembre, l'ambassadeur algérien à Tunis avait protesté auprès du ministre des Affaires étrangères, Othman Jerandi, pour des propos contre son pays tenus par Marzouki et Ahmed Ounaies, un ancien de chef de la diplomatie. Malgré la sensibilité du sujet, et après un moment d'hésitation, Marzouki a finalement crevé l'abcès. «Si j'étais encore président de la république, ma réponse serait non» à l'ouverture d'un consulat à Laâyoune, expliquant qu'il est partisan «d'ouvrir à nouveau le débat sur la gouvernance locale et l'espace maghrébin. Ce qui permettra à nos frères Sahraouis d'avoir une patrie dans le cadre de la gouvernance locale, une autre moyenne au Maroc et une grande au Maghreb. Ils vont ainsi gagner trois patries au lieu de rester à Tindouf». «Il faut être extrêmement vigilant à l'heure de traiter avec les Algériens. Je les connais très bien et j'en connais leur sensibilité ou ce qu'ils appellent le "Nif" (…) Pour ces raisons, je ne suis pas partisan de l'ouverture d'un consulat tunisien à Laâyoune. Les Algériens vont l'assimiler à un défi lancé contre eux. Cela compliquera davantage le problème du Sahara.» Moncef Marzouki Dans l'ensemble, l'ancien président tunisien s'est montré moins virulent envers l'Algérie que lors de ses précédentes participations à des conférences ou interviews accordées à des médias.