Le tribunal de 1ère Instance de Zagora a condamné à une peine de 2 mois de prison avec sursis deux hommes qui travaillaient comme manutentionnaires au marché de fruits et légumes de la ville. Les faits se sont produits dimanche 12 juin, ils ont été arrêtés et conduits devant le procureur, le 13, et ils ont comparu en liberté provisoire le 16, et condamnés. Bonne ou mauvaise nouvelle ? La constitution dit que nous sommes un pays musulman et que l'islam est religion d'Etat et le Code pénal dit en son article 222 que « celui qui, notoirement connu pour son appartenance à la religion musulmane, rompt ostensiblement le jeûne dans un lieu public pendant le temps du ramadan, sans motif admis par cette religion, est puni de l'emprisonnement d'un à six mois et d'une amende de 200 à 500 DH ». Les deux hommes, portant des marchandises pesantes par une quarantaine de degrés ce jour-là, ont jugé bon de mettre fin à leur jeûne et de boire, pour s'hydrater et éviter l'évanouissement, au mieux. Ils ont besoin de leurs forces pour continuer de travailler et subvenir aux besoins de leurs familles. Mais ils ont été dénoncés par les témoins, arrêtés, jugés et condamnés. Selon Hammou Zarrah, président du bureau local de la Ligue marocaine pour la défense des droits de l'Homme (LMDDH), les deux hommes ont nié avoir une quelconque appartenance militante ni d'avoir bu en défense d'une cause ou au nom d'une association. C'est sans doute pour cela qu'ils ont été laissés en liberté. Mais devaient-ils pour autant être jugés ? Aux termes de la loi, oui. Dans l'esprit de la religion, que la loi pense prolonger, non. En effet, le 4ème pilier de l'islam dit expressément que « le jeûne doit être observé par celui qui peut se le permettre ». Ces deux hommes ne pouvaient manifestement pas, et ils ont bu. Devaient-ils être condamnés ? Aux termes de la loi, non, car celle-ci condamneceux qui rompent leur jeûne « sans motif admis par cette religion ». Faire un travail harassant, par une température caniculaire, et avoir besoin de s'hydrater, n'est-il pas « un motif admis par la religion ». Ceux qui répondraient non auraient le droit de le faire au nom de la liberté d'opinion, mais auraient aussi le devoir de réfléchir à leur réponse. On peut également reconnaître au procureur de les avoir laissés en liberté, dans un pays où l'incarcération est un réflexe. Et on peut aussi louer le juge de ne pas les avoir condamnés à la prison ferme. Mais on peut discuter aussi les deux mois, alors que la loi prévoit de 1 mois à 1 an. La mauvaise nouvelle est donc cette condamnation, même clémente au regard de l'environnement social plus crispé pour les questions religieuses depuis quelques années. Mais la bonne est, précisément, la relative clémence du verdict. Faut-il supprimer l'article 222 du Code pénal ? La population ne le comprendrait pas, mais on pourrait l'assouplir et, surtout, les juges devraient être plus réfléchis et mesurés. Le débat reste ouvert, mais la raison serait la bienvenue, alors…