Un coup de force contre un président qui n'en a pas et dans un pays à l'économie à bout de forces… le scénario est idéal, et la probabilité est élevée. Personne n'a de véritable certitude sur ce qui s'est produit au palais présidentiel d'Alger vers le 10 juillet, sauf les protagonistes de ces coups de feu échangés lors des festivités de la fête nationale et de l'aïd al-Fitr. Ce qu'on sait, en revanche, c'est que le général-major Ahmed Moulay Meliani, chef de la Garde républicaine, le général-major Djamel Medjdoub, responsable de la Direction générale de la sécurité et de la protection présidentielle (DGSPP), et le général-major Bendaoud, patron du service de contre-espionnage et de la Sécurité Intérieure ont été démis de leurs postes. Ils ont été remplacés, respectivement, par le général de corps d'armée Ben Ali Ben Ali (ex-commandant de la 5ème région militaire) et le général Nacer Habchi et le colonel Abdelaziz. « Changer, subitement, deux semaines après le 53ème anniversaire de l'indépendance, les responsables de trois services de sécurité aux missions à la fois délicates et sensibles, ne peut pas se faire sur un coup de tête. Qu'est-ce qui a motivé de tels changements en ce moment précis ? Que s'est-il passé qui aurait pu coûter à trois généraux-majors leur poste ? », s'interroge le quotidien algérien el Watan. La présidence n'a pas communiqué, mais l'état de santé fragile, voire précaire du chef de l'Etat, la lutte sourde pour la succession et la chute des cours du pétrole, et donc le tarissement de la manne pétrolière, permettent d'alimenter toutes sortes de rumeurs. On parle aussi à Alger de l'implication de Saïd Bouteflika, M. Frère, qui agit en coulisses pour préserver certains avantages en cette période de fin de règne de son frère. Ainsi, une raison évidente est la proximité entre le général-major Djamel Medjdoub et le chef du DRS Mohamed Médiène dit Tewfik, contre lequel Saïd Bouteflika mènerait une «guerre d'usure ». Officiellement, l'ancien patron de la sécurité présidentielle a été relevé de ses fonctions pour « insuffisance de résultats »… mais de quels résultats parle-t-on? Comment pourrait-on reprocher de « mauvais résultats » à un officier qui a introduit les nouvelles technologies dans l'accomplissement de ses fonctions ? Les médias et l'opinion publique évoquent donc une tentative de coup d'Etat pour accélérer le départ d'Abdelaziz Bouteflika, mais dans un pays où les supports d'information sont muselés, ou appartiennent par groupes et par grappes, à des proches du premier cercle de pouvoir, il est difficile de séparer le bon grain de l'information de l'ivraie (et l'ivresse) de la désinformation.