Cette fois, la pression a été, semble-t-il, trop forte, plus que pour la Une sur "le péril noir" parue en 2012. La direction de Maroc Hebdo a donc été poussée à retirer de la vente et du web son numéro consacré à l'homosexualité et barré en couverture par un sonore "faut-il brûler les homos ?". La question est plaquée sur une photo de deux hommes en train de discuter à la piscine, où l'on devine que la main de l'un touche le visage de l'autre. Et cette précision : "Le ministère de la santé appelle à la dépénalisation de l'homosexualité au Maroc. Certes, c'est un droit individuel. Mais, quid de la morale et des valeurs religieuses ?". Le positionnement de Maroc Hebdo est donc clair, mais il a valu au périodique une pluie de critiques et de commentaires plus rudes les que les autres. Le magazine fait référence à une récente étude commandée par le ministère de la Santé et concluant sur une recommandation visant à dépénaliser l'homosexualité. L'étude avait été reprise par l'ensemble des médias marocains. Le projet de Code pénal, en effet, criminalise les relations homosexuelles et des peines privatives de liberté sont prévues pour les homos. Le numéro de Maroc Hebdo intervient à une période où le débat, à défaut de battre son plein, est alimenté par une récente action des Femen à Rabat, par un chanteur du groupe Placebo sur la scène du festival de Mawazine arborant sur son torse un X barrant l'article 489 (contre l'homosexualité) et, enfin, par l'arrestation d'homosexuels et la diffusion de leurs photos par le ministère de l'Intérieur. La société marocaine reste en grande partie rétive à cette orientation sexuelle, mais la constitution interdit l'incitation à la haine, que le titre de Maroc Hebdo semble pourtant promouvoir. Dans son communiqué annonçant le retrait, le directeur de la publication Mohamed Selhami explique que : "Notre publication n'a pas pour politique éditoriale de céder à un certain sensationnalisme de mauvais aloi ni de se distinguer par des sujets provocateurs pouvant heurter les sensibilités de l'opinion publique. En l'espèce, elle a voulu montrer un certain nombre de facettes d'un fait social : celui de l'homosexualité et en prolongement celui de son statut dans notre société. Un débat est à l'ordre du jour. Maroc Hebdo a voulu à cet égard rendre compte de ce débat. Mais compte tenu des réactions particulièrement vives à travers les réseaux sociaux, Maroc Hebdo a décidé de retirer de la vente et de ses sites sur le net, cette édition. Il présente en même temps ses excuses à tous les lecteurs qui ont pu être choqués par ce thème…". Le Collectif Aswat, qui défend les droits des homosexuels au Maroc, et qui vient d'annoncer sa distance avec l'action des Femen sur l'esplanade de la mosquée Tour Hassan, s'est en revanche déclaré satisfait de ce retrait de la vente de Maroc Hebdo, annonçant également que le combat pour les droits des minorités sexuelles est loin d'être fini.