Vingt-deux jours après sa réélection pour un second mandat, Emmanuel Macron a enfin nommé son premier ministre. Ce 15 mai, le président a mis fin à trois semaines d'attente, d'impatience voire d'agacement et de spéculations de tout genre. Après un week-end dominé par l'émergence de plusieurs noms d'anciennes ministres, c'est celui de la ministre du Travail, Elisabeth Borne, qui s'est imposé. Sa nomination a été officialisé par un simple communiqué de presse vers 18h30. « Le président de la République a nommé Madame Elisabeth Borne Première ministre et l'a chargée de former un gouvernement ». La présidence a expliqué : « C'est le choix de la compétence au service de la France, d'une femme de conviction, d'action et de réalisation. Mme E. Borne, Le portrait-robot. Outre l'avantage d'etre une femme, – seconde femme premier ministre depuis Edith Cresson en 1991-, la 26ème première ministre de la cinquième République est reconnue pour son acharnement au travail et sa ténacité. Fidèle parmi les fidèles du président de la République depuis 2017, elle a fait ses preuves au gouvernent pendant tout le quinquennat, ministre des Transports puis celui du Travail en passant par l'Ecologie. Mme Elisabeth Borne a porté deux grandes réformes compliquées lors du premier mandat du président. D'abord, la réforme de la SNCF, source de la colère des cheminots dont la grève a duré plusieurs semaines. Puis la réforme de l'assurance chômage considérée alors comme reforme de droite donc impopulaire. Cette ancienne conseillère de Jack Lang et directrice du cabinet de Ségolène Royal, se distingue des autres femmes citées à ce poste (Vautrin, Touraine, Azoulay...) par son appartenance supposée ou réelle à l'aile gauche de la Macronie. Emmanuel Macron qui avait déclaré au soir de sa réélection être un nouveau président pour un nouveau peuple, devait donner un signal politique aux français et une preuve du changement annoncé. Le président a surtout misé sur l'efficacité et l'autorité selon les observateurs. La première ministre aura pour tache première la formation du gouvernement. Elle aura la tâche ingrate de proposer des personnalités sachant que le dernier choix reste celui du président, connu pour s'occuper de tout jusqu'aux dernières investitures en vue des législatives. Et puis, il faudra mener la bataille électorale du 12 et du 19 juin. Les élections législatives qui s'annoncent moins évidentes et plus difficiles à négocier pour la majorité sortante. La nomination du premier ministre est un pouvoir propre au président de la République défini dans l'article 8 de la constitution. C'est aussi un acte politique qui détermine et donne une indication sur la politique que le chef de l'état compte mener. Emmanuel Macron voulait un premier ministre avec la fibre sociale et écologique. Elisabeth Borne est une technicienne avec une sensibilité de gauche, elle maitrise les enjeux écologiques. Jugée plus « techno » que politique, fidèle au président et surtout sans ambition nationale ce qui est garantit l'entente dans le couple exécutif. Si la nouvelle première ministre réussit sa première mission, celle de porter une majorité au parlement, elle pourra s'attaquer à la mère des réformes « La retraite ». Une réforme promise par le président candidat pendant la campagne électorale et déjà attaquée par les opposants, les syndicats et une partie de la population. Mme Elisabeth Borne doit alors trouver l'Energie suffisante pour tenir bon devant les députés- avec une assemblée qui sera probablement beaucoup plus plurielle que celle de la dernière législature- mais aussi tenir face aux syndicats et surtout face à la rue. Mme Borne est le troisième premier ministre de l'actuel locataire de l'Elysée. Emmanuel Macron avait choisi Edouard Philippe, homme de droite issu du parti « Les Républicains », après la victoire de 2017 pour des raisons purement politiques. Il lui a fait porter les réformes que la droite n'a jamais pu ou osé faire. Faisant de l'ombre au président à l'approche des élections, Edouard Philippe a démissionné pour laisser Matignon Jean Castex en juillet 2020. Le président vient de nommer une femme à poigne, redoutable négociatrice et maitrisant le langage syndical dans la perspective d'un quinquennat à risque. A peine nommée la première ministre est l'objet de critiques acerbes. Pour Jean-Luc une femme « soi-disant » et « en pointe sur la brutalité sociale et écologique ». « Face à une catastrophe écologique hautement prévisible », le président de la république « a choisi de nommer Première ministre une catéchumène du néolibéralisme » a dénoncé le leader de la France insoumise Lors d'une conférence de presse. Pour la gauche Madame Elisabeth Borne est une femme de droite, pour la droite, elle est de gauche. Peut-être qu'en nommant l'ancienne ministre du Travail Première ministre, le président de la République a visé juste. Pari gagnant ? Les résultats des élections législatives seront un premier indicateur.