Hier mardi dans l'après-midi, devait avoir lieu à New York le vote du Conseil de Sécurité concernant le mandat de la MINURSO. Ce vote qui était initialement programmé pour le lundi, intervient ainsi au dernier jour avant l'expiration du mandat de cette mission onusienne chargée de la surveillance du cessez-le-feu dans le Sahara marocain. Officieusement, il a été retardé de vingt-quatre heures pour permettre au porte-plume américain de l'ONU dans ce dossier, d'y apporter d'ultimes retouches se rapportant surtout, et entre autres, à la durée du mandat et la définition de la mission de la MINURSO. Pour la durée du mandat des casques bleus au Sahara marocain, deux tendances s'opposent. Celle de la France et celle des Etats-Unis d'Amérique. Paris veut qu'on renoue avec l'ancienne pratique d'un mandat de durée annuelle. Tandis que Washington s'obstine à vouloir limiter cette durée à six mois. L'argument des Américains est que cette durée de mandat raccourcie est synonyme de pression sur les parties pour qu'elles restent à la même table, dans l'objectif de parvenir à un règlement le plus rapidement possible. Un argument qui n'a plus de raison d'être depuis que l'ensemble des protagonistes du dossier, en l'occurrence l'Algérie, la Mauritanie, le Maroc et les séparatistes du Polisario, ont consenti de participer aux tables rondes de négociations à Genève, organisées sous les auspices de l'ONU et son envoyé spécial, Horst Kohler. Toutefois et pour que ces rencontres soient fructueuses, le monde a compris que l'ensemble des parties impliquées doivent faire preuve de pragmatisme. Le tandem Algérie-Polisario fragilisé par la crise politique et social qui sévit depuis plusieurs mois chez le voisin de l'Est, est donc sommé de revenir à la raison et au réalisme. Notamment en abandonnant sa vieille et sempiternelle rengaine sur le désormais chimérique « référendum d'autodétermination ». Pour la simple raison que personne n'y croit plus. Ceci même au sein des camps de Tindouf théâtres depuis plusieurs semaines d'un mouvement de contestation qu'on tente tant bien que mal d'étouffer, ainsi que parmi des parties participantes aux tables rondes de Genève. Mohamed Ould Abdel Aziz, le président mauritanien sortant dont le pays reconnaît pourtant le Polisario, n'a-t-il pas déclaré récemment qu' «il était impossible qu'il y'ait un Etat séparant géographiquement la Mauritanie et le Maroc» et que «tout ce que vous entendez, en dehors de ce cadre, est faux». Plusieurs années avant Ould Abdel Aziz, un précédent envoyé personnel du Secrétaire Général de l'ONU pour le Sahara, l'Allemand Peter van Walsum, pour le citer, avait souligné lui aussi en 2008 devant le Conseil de Sécurité que l'indépendance du territoire récupéré par le Maroc en 1975 n'était pas, à ses yeux, un objectif atteignable. Et deux années plutôt, en 2006, le même van Walsum qui s'attirera à cause de cela les foudres des ennemis de notre intégrité territoriale, estimait que l'option d'un «Sahara occidental indépendant n'était pas une proposition réaliste». Pour le diplomate allemand réputé pour sa droiture, les négociations devaient être relancées sur de nouvelles bases, avec l'abandon de toute notion ou référence à une «fantasmatique» option de référendum pouvant mener à l'indépendance. La proposition marocaine consistant en un plan d'autonomie élargie pour les provinces du Sud, viendra en parallèle entériner cette orientation favorisant une solution politique pour ce conflit fomenté par l'Algérie et qui n'a que trop duré. C'est cette même réalité qui a continué à dominer l'ambiance des deux tables rondes organisées récemment sous l'égide de l'ONU. Et elle dominera les éventuelles prochaines réunions. Car si le Maroc devait participer à de nouvelles tables rondes initiées par Horst Kohler, il est plus que temps pour que les autres protagonistes apportent quelque chose de nouveau ou, à défaut, êtres réceptifs à la proposition marocaine. Proposition qui a rallié le suffrage de la communauté internationale comme étant une solution juste et réaliste. Tout le reste n'étant que spéculation et brassage de vent. Il en est ainsi du vœu pieu formulé par l'Afrique du Sud qui occupe actuellement le siège de membre non permanent du Conseil de Sécurité, et consistant à insérer dans le rapport du SG de l'ONU sur le Sahara l'élargissement de la mission de la MINURSO à la surveillance des Droits de l'Homme. Des bruits ayant été démentis par la suite faisaient même état d'une concordance des points de vue sur ce sujet des Droits de l'Homme, entre Américains et Sud-Africains. Mais il s'avère aujourd'hui que ces thèses et ces rumeurs relèvent plus du canular que du fait diplomatique. Qu'à cela ne tienne, Rabat se devait de contrecarrer une telle démarche conformément à la position traditionnelle du Maroc résolument opposée à une implication de cette mission de maintien de la paix, dans des domaines qui relèvent de la stricte souveraineté du Royaume. En ce mardi 30 avril et comme par le passé, le Conseil de Sécurité devait certainement reconduire, automatiquement et sans changements notables, la mission de la Minurso pour une durée de 6 mois tout en continuant à miser sur la dynamique des tables rondes initiée par Horst Kohler et basée sur la recherche d'une "solution politique mutuellement acceptable". Et comme il n'y a jamais deux sans trois, après les premières tables-rondes qui ont eu lieu en décembre 2018 et en mars 2019 avec la présence notoire de trois figures de l'Istiqlal en tant que représentants des populations sahariennes, une troisième est prévue pour le mois de juin ou juillet prochains. Espérons, cette fois-ci, que les autres protagonistes fassent enfin preuve de réalisme et de pragmatisme. Il en va de la stabilité de toute une région déjà gravement secouée par les spasmes de l'instabilité et de l'insécurité, ainsi que de l'avenir de ses populations, principalement jeunes et complètement déconnectées de ce conflit d'un autre âge. Ali BENADADA