La France et le Maroc tirent un trait sur près d'un an de brouille diplomatique, en rétablissant leur coopération judiciaire. La ministre française de la Justice, Christiane Taubira, et son homologue marocain, Mustapha Ramid, qui s'est déplacé à Paris, ont trouvé, samedi, un accord permettant le rétablissement "immédiat de la coopération judiciaire et juridique entre la France et le Maroc ainsi que le retour des magistrats de liaison", selon un communiqué commun. Les ministres de la Justice des deux pays ont trouvé un "accord sur un texte amendant la convention d'entraide judiciaire franco-marocaine permettant de favoriser, durablement, une coopération plus efficace entre les autorités judiciaires des deux pays et de renforcer les échanges d'informations", selon le texte. Cet amendement "très important, qui vient couronner des discussions entamées depuis plusieurs mois par les gouvernements des deux pays", a été paraphé samedi par le ministre de la Justice et des Libertés, M. Mustapha Ramid, et la ministre française de la Justice, Garde des Sceaux, Mme Christiane Taubira, qui se sont rencontrés les 29 et 30 janvier courant à Paris, précise le Communiqué conjoint. Au cours de leurs séances de travail, les délégations des deux pays "ont examiné en profondeur, les difficultés ayant conduit à la suspension de la coopération judiciaire entre la France et le Maroc. Les discussions se sont déroulées dans un esprit très constructif et un climat de confiance", souligne la même source. Ces discussions "ont été guidées par les orientations claires et l'attachement permanent des deux chefs d'Etats, Sa Majesté le Roi Mohammed VI et S.E. François Hollande, de mettre fin à cette situation et d'agir pour préserver le partenariat d'exception qui caractérise la relation entre les deux pays". Les deux ministres, ajoute le communiqué, "ont trouvé un accord sur un texte amendant la convention d'entraide judiciaire franco-marocaine permettant de favoriser, durablement, une coopération plus efficace entre les autorités judiciaires des deux pays et de renforcer les échanges d'informations, dans le plein respect de leur législation, de leurs institutions judiciaires et de leurs engagements internationaux". L'accord "constitue une contribution supplémentaire à la relation dense, forte et multidimensionnelle entre les deux pays", souligne-t-on de même source, ajoutant que "les deux gouvernements œuvreront pour sa prompte soumission aux procédures internes de ratification de chacune des parties". Le Maroc avait suspendu fin février 2014 la coopération judiciaire avec la France à la suite d'une crise bilatérale inédite provoquée par un dépôt de plaintes en France contre de hauts dignitaires marocains par des repris de justice dont la crédibilité est fortement sujette à caution, suivi d'une série d'incidents et d'impairs diplomatiques. Remise en ordre Dans une déclaration de presse, le ministre marocain des Affaires étrangères et de la Coopération, Salaheddine Mezouar a affirmé que les discussions ayant amené les deux pays à parapher un accord sur l'amendement de la convention d'entraide judiciaire ont permis de remettre les choses en ordre. "Le système judiciaire français a l'obligation de respecter le système judiciaire marocain comme, nous, on respecte le système judiciaire français", a insisté le ministre dans une déclaration à la chaîne française d'information en continu BFMTV, notant que le Maroc est "un pays du respect des droits de l'Homme, un pays qui avance dans la construction de sa démocratie sur la base des valeurs universelles et du respect des droits de l'Homme". "On ne permettra pas à qui que ce soit et dans quelle circonstance que ce soit de venir entacher la réputation des responsables marocains et de l'institution judiciaire marocaine", a-t-il tranché, relevant qu'il s'agit de l'une des principales conditions pour que les relations entre les deux pays retrouvent leur crédibilité et la confiance indispensable entre deux partenaires afin de préserver l'avenir. Dans la foulée de la brouille, la coopération sécuritaire entre les deux pays, qui ont traditionnellement des liens très étroits et échangent des informations sur les extrémistes jihadistes, avait également été affectée. Ainsi, toute la coopération judiciaire était suspendue, avec des répercussions au niveau civil et au niveau pénal pour toutes les procédures judiciaires. Et la coopération sécuritaire, cruciale entre les deux pays qui ont chacun des centaines, voire des milliers de ressortissants tentés par le jihadisme ou enrôlés au sein du groupe Etat islamique (EI), souffrait également de la brouille. Les évènements tragiques de l'attentat contre Charlie Hebdo ont remis sur la table l'urgence de reprendre les accords judiciaires et sécuritaires entre les deux pays. Cette révision rendrait d'autre part caduques les plaintes ubuesques déposées par ceux qui ont été instrumentalisés dans ce dossier pour maintenir une tension qui a trop duré entre les deux alliés traditionnels.