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Domaine Public Maritime: Des pertes financières considérables pour l'Etat Les autorisations d'occupation deviennent permanentes
Les permissionnaires se convertissent en promoteurs immobiliers
Les chiffres exprimés en plusieurs dizaines de milliards de dirhams revenant à l'Etat, mais que celui-ci ne perçoit pas du fait de la mauvaise gestion de certains services publics, montrent l'importance de la gouvernance et l'impératif de hâter la réforme dans ce cadre, en particulier lorsqu'on sait les difficultés financières du Maroc qui l'obligent à emprunter et à faire des ponctions sur les réserves de changes, menaçant l'économie d'étouffement. Les deux institutions marocaines, à savoir la cour des comptes et le conseil économique et social ont rendu comptes dans plusieurs de leurs rapports de situations prévalant dans plusieurs domaines qui ont révélé ces pertes énormes que l'Etat subit et continue de subir. Nous en avons présenté quelques unes dans les parties de rapports de ces institutions que nous avons publiés dans notre supplément économique et les autres pages de notre journal. Ces rapports sont assez édifiant et plus que suffisants pour tirer la sonnette d'alarme sur les catastrophes financières que voilent et entretient la mauvaise gouvernance et qui appellent à des réactions de la part de l'Etat et des autres organisations concernées, et ce dans l'intérêt du pays. En introduction au rapport sur le domaine public maritime, la Cour des comptes rappelle qu'en vertu de l'article premier du Dahir du 1er juillet 1914 sur le DPM tel qu'il est complété par le dahir du 8 novembre 1919, le domaine public maritime est constitué : - du rivage de la mer jusqu'à la limite des plus hautes marées, ainsi que d'une zone de six mètres mesurée à partir de cette limite ; - des phares, fanaux, balises et généralement tous les ouvrages destinés à l'éclairage et au balisage des côtes et leurs dépendances. Selon les dispositions de l'article n°4 du Dahir du 1er juillet 1914 susmentionné, le domaine public est inaliénable et imprescriptible. La gestion et la protection du DPM sont du ressort du Ministère de l'équipement et du transport (MET), et ce en vertu d'une délégation permanente prévue par l'article 6 du Dahir du 1er juillet 1914 susvisé. Selon les dispositions de l'article 11 du décret n°2-06-472 du 4 août 2008 portant attributions et organisation du ministère, deux directions interviennent dans la gestion du DPM. Il s'agit de la direction des affaires administratives et juridiques et de la direction des ports et du domaine public maritime (DPDPM) qui sont responsables, chacune en ce qui la concerne, de la mise en place d'une politique destinée à protéger, préserver et contrôler ce domaine. Au niveau régional, des directions régionales et provinciales de l'équipement et du transport (DRET/DPET) ont pour mission la gestion opérationnelle de la préservation et la valorisation du DPM. La mission de contrôle de la gestion menée par la Cour des comptes, ayant porté sur la gestion du DPM, a permis de relever les observations exposées dans ce qui suit. Cadre juridique dépassé et non adapté Le DPM est resté soumis et géré par les textes généraux relatifs au domaine public de l'Etat. A l'exception du Dahir du 30 novembre 1918 relatif à la police du DPM, modifié et complété par la loi n° 10-96 promulguée par le dahir n° 1-97-04 du 25 janvier 1997, le Maroc ne l'a pas encore doté d'une législation spécifique afin de traiter les problèmes posés lors de sa définition, de sa délimitation et de son exploitation. Le cadre juridique régissant le domaine public, et par conséquent le DPM, est ancien et la plupart des textes datent du protectorat, et par conséquent, deviennent en déphasage par rapport à la réalité actuelle. Il s'agit des textes suivants ; -Dahir du 1er juillet 1914 sur le domaine public tel qu'il a été modifié par le dahir du 8 novembre 1919 -Dahir du 30 novembre 1918 relatif aux occupations temporaires du domaine public, tel qu'il a été modifié par le dahir du 03 mars 1951 et la loi n°17-98 promulguée par le dahir n° 1-99-296 du 10 décembre 1999 - Dahir du 2 novembre 1926 relatif à la police du DPM, modifié et complété par la loi n° 10-96 promulguée par le dahir n° 1-97-04 du 25 janvier 1997. La législation régissant le DPM reste insuffisante et inadaptée pour assurer la gestion et la préservation de ce domaine. A titre d'illustration, l'examen des textes a permis de faire ressortir des insuffisances. Les textes en vigueur donnent plutôt des indications sur les éléments constituant le DPM et non une définition précise. Celle-ci ne contient pas certaines composantes de ce domaine, notamment les lais et relais de mer, les falaises en contact avec la mer, les îles et les îlots situés dans les eaux intérieures ou la mer territoriale, les plages jusqu'aux limites des sables marins, les ouvrages de protection des côtes, les plages artificielles. Dans les faits, les limites du rivage sont arrêtées en fonction des constatations opérées sur les lieux à délimiter ou des informations fournies par des procédés scientifiques et techniques permettant de connaître avec précision le niveau maximum atteint par la mer pour des périodes de retour données. Toutefois, le Ministère tarde à élaborer un guide explicitant ces procédés. Comme conséquence, les éléments devant composer le DPM ne sont pas tous prévus par la réglementation en vigueur et l'absence d'un cadre juridique approprié expose le DPM à des risques afférents à la délimitation, à l'occupation temporaire, aux concessions et aux empiétements. Malgré l'existence de dispositions régissant les modalités d'occupation et les conditions d'exploitation du DPM, les permissionnaires ne les respectent pas systématiquement. Ceci a causé une surexploitation, voire une dégradation de ce domaine. A titre d'illustration, on peut citer les exemples suivants : - Très peu de permissionnaires respectent la nature des matériaux devant être légers utilisés dans la construction. En effet, plusieurs cabanons d'estivage autorisés à occuper le DPM sont transformés en villas de luxe et lieux de commerce se vendant parfois à des prix élevés. Devant cette situation, le Ministère se trouve dans l'incapacité de faire respecter les conditions prévues par les arrêtés d'autorisation d'occupation temporaire et les cahiers des charges y afférents. Ceci a eu des conséquences négatives sur le littoral notamment la dénaturation du paysage des plages. Celles-ci deviennent de plus en plus occupées par des résidences secondaires, principales, des villas et des résidences de luxe et dans certains cas, elles deviennent, de fait, des sites à accès réservé ; - Certaines dispositions des textes régissant l'occupation temporaire ont eu des conséquences négatives sur le DPM notamment celles relatives au transfert des autorisations d'occupation. En effet, ce transfert est, dans plusieurs cas, réalisé sur la base d'actes de vente des droits de jouissance liés aux domaines occupés avec des montants qui atteignent parfois des millions de dirhams. Ceci a rendu les autorisations d'occupation du DPM permanentes. Par ailleurs, certains permissionnaires se sont convertis en promoteurs immobiliers dans la mesure où ils construisent des villas et des immeubles pour les revendre, réalisant ainsi des plus-values importantes. L'exemple en est le DPM relevant de la direction de Benslimane.