C'est un petit film grotesque, fait avec trois bouts de ficelle, qu'on prend d'abord pour une parodie de La Vie de Brian, des Monthy Python, l'humour en moins. Son nom : L'Innocence des musulmans. Son auteur , au pseudonyme Sam Bacile, un obscur (dans tous les sens du termes)promoteur immobilier israélo-américain de 52 ans, originaire du sud de la Californie doublé d'un islamophobe raide. Le film n'est qu'une longue liste de dénigrements et d'insultes contre le prophète Mohamed. Au Wall Street Journal, qui a pu s'entretenir avec lui par téléphone, Sam Bacile dit avoir levé 5 millions de dollars auprès de 100 donateurs juifs pour réaliser son film insulte qui a bénéficié du soutien d'un autre islamophobe plus enragé que lui, le pasteur Terry Jones, qui avait fait tout un cinéma en appelant à brûler le saint Coran en 2010.Voilà pour le synopsis de la fiction. Mais la réalité n'est qu'escroquerie... Des acteurs parlant anglais avec l'accent américain présentent les musulmans comme immoraux et gratuitement violents - avec 60 acteurs et une équipe de 45 personnes. Mais l'équipe du film a fait part de sa colère, mercredi, dans un communiqué publié par le Los Angeles Times. «Tous les acteurs et toute l'équipe sont bouleversés et ont l'impression d'avoir été exploités par le producteur», écrivent-ils. «Nous sommes à 100% contre ce film et avons été grossièrement trompés sur ses intentions et objectifs. (...) Nous sommes choqués par les réécritures radicales du scénario et les mensonges proférés à toutes les personnes impliquées», ajoute le communiqué. «Nous sommes profondément attristés par les tragédies» survenues en Libye et en Egypte. Le doublage est parfaitement visible sur les 14 minutes du film diffusées sur Internet, où des mots sont grossièrement insérés au beau milieu de séquences. Une actrice californienne qui apparaÂŒt dans la vidéo anti-islam à l'origine de violentes manifestations dans le monde musulman affirme avoir été trompée sur la véritable nature du film. Cindy Lee Garcia, de Bakersfield (Californie), a précisé avoir répondu l'an dernier à une annonce pour un film intitulé «Desert Warrior» («Le guerrier du désert»). «Tout cela me paraît irréel, c'est comme s'il ne restait rien de ce que nous avons tourné», a-t-elle dit à Reuters dans une interview téléphonique. Le film s'appelle finalement «Innocence of Muslims» («L'innocence des musulmans»), et présente le prophète Mohamed comme un imbécile, un homme à femmes et un imposteur. Diffusé depuis plusieurs semaines sur internet, il aurait été produit par un promoteur immobilier israélo-américain qui vit en Californie, un certain Sam Bacile, peut-être un pseudonyme. Cindy Lee Garcia a précisé que le film, qui aurait coûté 5 millions de dollars en partie versés par une centaine de donateurs juifs, avait été tourné durant l'été 2011 à l'intérieur d'une église proche de Los Angeles. Les acteurs, qui étaient une cinquantaine, jouaient devant un «écran vert», sur lequel devaient être fixés plus tard les décors. «Desert Warrior» était présenté comme un film historique à petit budget se déroulant dans le désert d'Arabie. Dans la fiche de distribution retrouvée sur Backstage.com, aucun personnage n'est désigné sous le nom de Mohamed. «On m'a dit que c'était un film sur l'époque du Christ, il y a deux mille ans», a précisé l'actrice. Dans la fiche technique apparaÂŒt le nom de Sam Bassiel, proche de celui du producteur supposé. Le nom du réalisateur est Alan Roberts. Steven Klein, un assureur de Hemet (Californie) qui se présente comme consultant et porte-parole de la production du film, affirme qu'il a conseillé au réalisateur de se cacher. Selon le groupe Southern Poverty Law Center, qui combat les extrémismes, Klein est un chrétien lié à des milieux d'extrême droite. Steven Klein a évoqué une tentative de projeter le film dans un cinéma du sud de la Californie, avec un titre légèrement différent, mais qu'une demi-heure après le début de la projection aucun billet n'avait été vendu. Cindy Lee Garcia a raconté que dans le film le personnage qu'elle jouait était obligé dans une scène de remettre son enfant à un certain «MaÂŒtre Georges». La fiche du film décrit ce «MaÂŒtre Georges» comme un «dirigeant autoritaire» et un «tyran». En fait, ce personnage est censé représenter le prophète Mohamed dans la vidéo. L'actrice a ajouté que le producteur du film, qu'elle appelle Sam Bassil, était un homme âgé, les cheveux grisonnants, avec un accent. Il l'a payée avec un chèque. «Je lui ai téléphoné mercredi et lui ai demandé pourquoi il avait fait cela. Il m'a mis dans une situation affreuse, des gens sont tués à cause d'un film dans lequel je joue», a-t-elle dit.