Les Etats-Unis et l'Egypte tentent de mettre en place un nouveau plan sécuritaire pour faire face à l'aggravation de la situation sur la Péninsule du Sinaï, où 16 soldats égyptiens sont morts dimanche dernier après une embuscade près de la frontière avec Gaza et Israël, a rapporté le New York Times samedi en fin de journée. Citant des sources anonymes, le quotidien américain affirme que le ministère américain de la Défense discute avec les Egyptiens d'une série d'options visant à partager les renseignements avec l'armée et la police égyptiennes au Sinaï. Ces renseignements incluent des conversations interceptées de militants par téléphone portable ou radio, et des images aériennes fournies par des avions, des drones et des satellites, indique l'article. «Nous continuons à discuter des moyens d'augmenter et d'améliorer la maîtrise de la situation des Egyptiens», a déclaré un représentant du Pentagone cité par le quotidien. Selon le New York Times, les discussions ont lieu au sein des milieux militaires et de renseignement, ainsi qu'avec le gouvernement du président Mohamed Morsi. La secrétaire d'Etat Hillary Clinton, qui était en tournée en Afrique la semaine dernière, a parlé au téléphone avec le nouveau Premier ministre égyptien Hesham Qandil pour négocier une assistance, relève le quotidien. La date de la conversation n'a pas été révélée. Les militants islamistes qui ont perpétré l'attentat de dimanche sont soupçonnés d'affiliation avec l'Armée d'Islam, un groupuscule d'islamistes radicaux que l'Egypte a tenu pour responsable de plusieurs attentats ces dernières années. Dans le Sinaï égyptien, la vérité aussi insaisissable que les activistes Le soleil se couche sur un village du Sinaï et Abou Asma s'apprête à rompre le jeûne du ramadan lorsque des tirs se font entendre du poste militaire voisin. Il n'y prête pas grande attention, jusqu'à ce qu'une balle vienne frapper sa maison. Les coups de feu s'arrêtent au bout de quelques minutes. Mais lorsque les voisins se rendent à la frontière avec Israël, ils découvrent les corps sans vie d'une douzaine de soldats, dont certains ont été atteints à la tête. «Ceux qui ont fait ça étaient très bien formés», dit Abou Asma. Le massacre de dimanche, comme l'ont décrit les villageois, a fait 16 morts et a envoyé des ondes de choc dans toute l'Egypte, provoquant une opération sans précédent de l'armée pour «nettoyer» le Sinaï des extrémistes islamistes à qui l'attaque a été attribuée. Depuis quelques jours, des hélicoptères quadrillent le ciel de la péninsule tandis que des chars arrivent vers la frontière avec Israël et la bande de Gaza pour une confrontation que les militaires veulent décisive avec les activistes. L'armée et la police se sont déjà vantées d'avoir remporté plusieurs «succès», comme la mort de 20 activistes dans des frappes aériennes - les premières dans le Sinaï depuis des décennies - et l'arrestation de six «terroristes» présumés. Mais les villageois se disent sceptiques, affirmant que les forces de sécurité ont raté leur cible qui s'est tout simplement évanouie dans la vaste étendue désertique et montagneuse du Sinaï. Au lieu de cela, affirment-ils, les autorités sont revenues aux méthodes de l'ère Moubarak. Une lourde répression s'était en effet abattue sur certains clans bédouins après la vague d'attentats sanglants perpétrés entre 2004 et 2006, augmentant l'hostilité des résidents de la péninsule envers les autorités centrales. Les familles des six hommes arrêtés nient ainsi catégoriquement qu'ils soient des terroristes, et la femme de l'un d'eux, Eid Saïd Salama, 72 ans, a assuré que son mari était en train de donner à manger à sa chèvre lorsqu'il a été arrêté. A Toumah, un petit village aux maisons de brique où les forces de l'ordre affirment avoir mené les frappes qui auraient tué 20 activistes mercredi, les habitants accusent l'armée de propagande. Il y avait bien un site, dans les environs du village, que des islamistes ont utilisé pour s'entraîner, mais ces derniers étaient partis longtemps avant que les blindés n'arrivent sur place, appuyés par des hélicoptères, selon un habitant, Eid Sawarka. «Il y avait 45 blindés et des véhicules de la police, et deux hélicoptères. Ils ont tiré deux roquettes mais elles n'ont rien touché», assure Abou Mohammed, un autre villageois. Non loin de là, à al-Joura, des résidents montrent le site d'une frappe. «C'était fait complètement au hasard», estime Mohammed Youssef, en expliquant qu'une roquette a touché un entrepôt de bois et qu'une autre a atterri dans le sable.