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Fronde au Conseil régional de l'Ordre des Architectes de Rabat 13 architectes démissionnaires dénoncent des “dysfonctionnements” et demandent l'application de la loi
Le torchon brûle entre le président et plusieurs membres du Conseil régional Rabat-Salé-Zemmour-Zaër de l'Ordre des Architectes. Treize des membres sur les vingt cinq que compte ce Conseil ont présenté collectivement leur démission il y a près de deux mois et dressent toute une liste de griefs à l'encontre du président dudit Conseil, élu depuis seulement neuf mois. Vendredi dernier, ils ont même tenu un sit-in devant le siège de leur Conseil suivi d'une conférence de presse pour expliquer à l'opinion publique les tenants et aboutissants de leur mouvement de protestation. «Nous avons déjà tout fait pour régler nos différents entre nous, à travers le débat, de manière collégiale, au cours des réunions statutaires. Mais nos demandes dans ce sens ont toujours été refusées et les décisions prises à la majorité des membres du Conseil ignorées. Face aux multiples dysfonctionnements constatés et aux prises de décisions unilatérales de l'actuel président du Conseil régional de notre Ordre, nous n'avons plus eu d'autres choix que de porter cette affaire sur la place publique», explique Anouar Arradi, l'un des treize membres démissionnaires du Conseil. Suite à leur démission collective déposée par huissier de justice, les membres démissionnaires ont fait part de leur démarche par courrier au Conseil national de l'Ordre des Architectes, ainsi qu'au département de tutelle, qui est celui de l'Habitat, et du Secrétariat Général du Gouvernement, de manière à ce que d'autres élections soient organisées pour désigner un nouveau président. Sauf que du côté du ministère de l'Habitat, aucune réaction, et ce malgré plusieurs rappels. «Nous demandons tout simplement à ce que la loi soit appliquée et que de nouvelles élections soient organisées», précise Anouar Arradi. L'article 70 de la loi 16/89 relative à l'exercice de la profession d'architecte et à l'institution de l'Ordre national des architectes stipule, en effet, que «lorsque, pour quelque cause que ce soit, l'administration constate qu'un conseil régional se trouve dans l'impossibilité d'assurer son fonctionnement normal, notamment par le refus de la majorité de ses membres d'assister à ses réunions, elle désigne, après consultation du conseil national de l'Ordre des architectes, une commission composée de quatre architectes remplissant les conditions pour être éligibles, dont le président du dit conseil régional, le cas échéant, pour assumer les fonctions de ce conseil jusqu'à l'élection des membres du nouveau conseil qui doit avoir lieu dans un délai de quatre mois à compter de la date d'entrée en fonction de la commission précitée». «Le président du Conseil régional de notre Ordre a failli à toutes ces missions», s'insurge Amine Raïs, autre membre du Conseil démissionnaire. «Imaginez que nous n'avons pas la moindre idée de la situation financière de notre Conseil et nous ne savons même pas dans quelles conditions a été effectuée l'acquisition du nouveau siège du Conseil de l'Ordre des Architectes. Le président a pris toutes les décisions tout seul. Nous n'avons été associé ni dans le choix du bâtiment du siège, ni dans les procédures d'acquisitions, ni dans le montage financier. Nous ne savons même pas à quel prix s'est faîte cette acquisition». «Le président du Conseil régional va même jusqu'à se vanter dans la presse de l'acquisition de ce siège», souligne Anouar Arradi. «Ce qu'il ne dit pas aux journalistes, c'est qu'à son arrivée à la tête du Conseil régional, il a hérité d'une excellente situation financière. La trésorerie du Conseil comptait 1,5 millions de Dirhams, que le précédent bureau avait engrangés justement dans la perspective de l'achat d'un bâtiment pour abriter le siège de notre Conseil. Mais les problèmes avec cette présidence ne s'arrêtent pas là. Les nouveaux membres du Conseil régional n'ont jamais été présentés aux architectes de Rabat, aucune liste des architectes de la région n'a été dressée, il y a eu des dépassements dans le traitement de certaines affaires et des dossiers brûlants, tel le projet de décret sur les marchés publics, très important pour l'avenir de la profession, le président refuse d'en débattre. A chaque fois que nous demandions la tenue d'une réunion statutaire pour débattre des dysfonctionnements qui entravent le bon fonctionnement de notre Conseil, nous essuyons le même refus. Par ailleurs, la trésorière du Conseil régional a démissionné de son poste sans que l'on ne sache pourquoi exactement. La situation est devenue tout à fait intolérable et nous avons démissionné pour ne pas être complices de ses dépassements. Il faut tout simplement dissoudre l'actuel bureau du Conseil régional et revenir à la case de départ». Un architecte présent à la conférence de presse a tenu à rappeler que l'un de leurs confrères, Saïd Senhaji, croupis toujours en prison et au lieu de bénéficier du soutien de Conseil régional, le président a tout simplement renvoyé l'avocat du Conseil qui suivait cette affaire sans le faire remplacer, abandonnant de la sorte l'architecte emprisonné à son triste sort. «Pourtant, nous sommes tous bien placés pour savoir que notre confrère n'a commis aucun délit et que ce qui lui est arrivé peut aussi arriver à chacun d'entre nous. C'est un grave précédent judiciaire qui ne devrait pas nous laisser passifs». L'erreur des architectes de Rabat et sa région, qui sont au nombre de 1.300, aurait peut être été de placer à la tête de leur Conseil régional un architecte qui est également le directeur de l'Agence Urbaine de Rabat, d'où pas mal de conflits d'intérêts. D'ailleurs, depuis son élection à la présidence du Conseil régional de l'Ordre des Architectes, il est difficilement joignable au siège dudit Conseil, c'est le secrétariat général qui traite les affaires en cours, indiquent les architectes de Rabat. «Notre profession a été prise en otage par certaines personnes mal intentionnées qui sont entrain de la mettre à genoux», se lamente un architecte de la vieille génération qui se pose des questions sur l'avenir de cette profession si aucune solution correcte n'est apportée aux problèmes existants. «Nous en sommes déjà à constater que des architectes étrangers réalisent des projets au Maroc, ce à quoi ils n'ont absolument pas droit et Dieu sait ce que l'avenir va encore réserver aux plus jeunes d'entre nous».