Près de 500 détenus, essentiellement des talibans, se sont évadés de la prison de Kandahar dans la nuit de dimanche à lundi grâce à un tunnel long de 300 mètres, que les insurgés affirment avoir mis cinq mois à creuser depuis l'extérieur. L'évasion grâce à un tunnel d'environ 500 talibans détenus à la prison de Kandahar, la grande ville du sud afghan, est un "désastre" qui "n'aurait pas dû se produire", a indiqué lundi le porte-parole du président afghan Hamid Karzaï. "C'est un coup. C'est quelque chose qui n'aurait pas dû se produire", a déclaré ce porte-parole, Waheed Omar, interrogé au sujet de cette évasion lors d'une conférence de presse à Kaboul. "Maintenant que cela s'est produit, nous cherchons à découvrir ce qui s'est passé exactement et ce qui doit être fait pour réparer le désastre qui a eu lieu à Kandahar", a-t-il ajouté. Berceau de l'ancien régime des talibans (1996-2001), Kandahar est l'un des bastions de leur rébellion contre l'Otan et les forces afghanes, qui y ont multiplié les opérations militaires pour les en déloger depuis deux ans. Il s'agit d'un nouveau camouflet pour le gouvernement de Kaboul et ses alliés des forces de l'Otan, qui ont multiplié les opérations depuis deux ans dans cette région du sud afghan, bastion des talibans et considérée comme cruciale pour stabiliser le pays. "Un tunnel long de plusieurs centaines de mètres a été creusé (...) et 476 +prisonniers politiques+ se sont échappés", a déclaré le directeur de la prison, le général Ghulam Dastageer Mayar. Le gouverneur provincial de Kandahar, Tooryalai Wesa, a de son côté annoncé dans un communiqué que 474 "prisonniers politiques" et un criminel s'étaient évadés, grâce à un tunnel creusé durant plusieurs mois. Les autorités afghanes désignent par "prisonniers politiques" des commandants ou militants talibans présumés qui n'ont pas été arrêtés lors de combats ou d'attaques. Selon une source sécuritaire qui a requis l'anonymat, le tunnel faisait 300 mètres de long. Les talibans ont revendiqué cette évasion, affirmant être parvenus à faire sortir de la prison 541 des leurs, dont 106 "commandants". Les autorités afghanes n'ont pas fourni de précisions dans l'immédiat sur l'identité des évadés. Les rebelles ont affirmé dans un communiqué avoir mis cinq mois à creuser un tunnel long de 320 mètres, débouchant à l'intérieur du quartier des "prisonniers politiques" de la prison. "Le tunnel a touché au but la nuit dernière. Les moudjahidines prisonniers ont été conduits à l'extérieur par cette voie par trois détenus préalablement informés", ont ajouté les talibans. Selon eux, l'opération a duré quatre heures et s'est terminée à 03H30 (23H00 GMT dimanche) lundi matin, et les détenus ont été récupérés par des véhicules. Les talibans affirment également qu'un commando-suicide avait été posté à proximité de la prison, mais n'a pas eu besoin d'agir. Le gouverneur de Kandahar a assuré que certains évadés avaient été repris sans en préciser le nombre, ajoutant que "de vastes opérations de recherche ont été lancées à Kandahar et dans ses faubourgs". Selon lui, les données biométriques de tous les prisonniers sont enregistrées, ce qui les rend facilement identifiables. Mais il a également admis que cette évasion était un échec pour les forces de sécurité et services de renseignement. La prison de Kandahar avait déjà été le théâtre d'une spectaculaire évasion le 13 juin 2008. Un commando de talibans l'avait prise d'assaut, et près d'un millier de prisonniers, dont une moitié de talibans, avaient pris la fuite. Dans un rapport publié en novembre, le centre d'étude ICG (International Crisis Group) estimait que l'insalubrité et la surpopulation des prisons en faisaient "un terreau fertile pour l'insurrection". Kandahar est le berceau de l'ancien régime des talibans (1996-2001), chassés du pouvoir par une coalition internationale à la fin 2001, et qui mènent depuis une sanglante insurrection contre le fragile gouvernement de Kaboul et l'Otan. Le 15 avril, le chef de la police provinciale avait été tué dans un attentat suicide perpétré à l'intéreur du quartier général de la police de la ville, en principe très sécurisé. Les talibans ont mené récemment plusieurs audacieuses attaques contre des cibles très sensibles et très protégées, menées par des hommes en uniforme, qui laissent craindre une infiltration croissante des forces afghanes par les insurgés, qui ont gagné du terrain ces dernières années.