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La levée des réserves et la ratification du Protocole facultatif à la CEDAW en Afrique du Nord est primordial pour asseoir l'égalité hommes-femmes Constitutionnalisation de l'égalité, décisive pour un meilleur engagement dans le processus de la CEDAW
La Commission économique des Nations Unies pour l'Afrique, en collaboration avec le Bureau Sous Régional pour l'Afrique du Nord d'ONU-Femmes a organisé un atelier pour relancer le débat, dans la conjoncture actuelle de réformes constitutionnelle et de justice au Maroc et en Tunisie et à travers les mouvements populaires au niveau arabe, sur la CEDAW : Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes et sur son protocole facultatif. Par Bouteina BENNANI Tout d'abord, les participants, qu'ils soient marocains ou de la région d'Afrique du Nord saluent les changements opérés dans notre pays, tant au niveau économique que social, surtout le discours Royal, source de ce remue ménage et de cette idéologie naissante innovante, à concrétiser dans le futur. Mais chaque pays a ses spécificités, ses contraintes et il s'avère que, dans cette enceinte de la région MENA, on n'est pas tous sur la même longueur d'onde. Il y a un déphasage, en matière de progrès et de réalisations pour la promotion des femmes et la préservation de ses droits. En d'autres termes, on sent que les pays, en queue de file des pionniers du mouvement de promotion et de progrès des femmes, « pataugent » dans les idées, les acquis et les informations. Mais qui, tout autant, ont un terrain tout construit, plein d'expériences et de bonnes pratiques à suivre, un parcours estimé colossal mais encore insuffisant pour les têtes de fil, à savoir la Tunisie ou encore le Maroc. Les recommandations du séminaire ont été pertinentes, vu la diversité des intervenants : acteurs gouvernementaux, experts du Comité de la CEDEF de la région de l'Afrique du Nord, juges, parlementaires, représentants d'ONGs nationales et internationales régionales et sous régionales œuvrant pour les droits des femmes, médias… Contexte L'atelier rentre dans le cadre de la mise en œuvre des recommandations de la huitième Conférence régionale africaine sur les femmes (Beijing +15) qui s'est tenue en Gambie du 16 au 20 novembre 2009. On y a relevé des progrès en matière de réformes juridiques pour la promotion de l'égalité entre les sexes mais des contraintes importantes face à leur application. Dans la Déclaration de Banjul, les pays se sont engagés dans la mise en œuvre effective des accords internationaux, régionaux et sous régionaux, des Objectifs du Millénaire pour le Développement, de la CEDAW et de la plate forme Beijing. Des traités qui, quoique signés par les Etats, s'opposent à une lenteur dans leur application et aux réserves émises au niveau des articles 2, 9, 15 et 16. A savoir aussi que, depuis son adoption en 1999 et son entrée en vigueur en 2000 dans 7 pays d'Afrique du Nord, le protocole facultatif de la CEDEF n'a été ratifié que par la Tunisie et la Lybie. Objectif Ainsi, l'objectif de l'atelier, selon Mme Souad Abdennebi, Conseillère régionale pour la promotion des droits humains des femmes CEA, c'est d'appuyer et de renforcer les efforts des pays nord-africains pour la mise en œuvre de la CEDEF et de son Protocole facultatif, de réfléchir, d'analyser objectivement et de sensibiliser les Etats membres sur la nécessité de lutter contre toutes les formes de discriminations sexistes, d'échanger les expériences des différents pays et surtout, de lancer un processus régional de la levée des réserves se rapportant à la CEDEF, pour plus d'égalité et en conformité avec les engagements pris par nos Etats. Pour Mme Ben Soltane, l'objectif est d'appuyer les efforts des pays Nord-Africains pour la mise en œuvre et le suivi de la convention et de son protocole en offrant une plate forme d'échange et de partage d'expériences nationales et les points de vue entre les différentes partisanes. « On s'attend, à travers cet atelier, à des recommandations à mettre en œuvre, pour que, aussi bien au niveau des Etats membres qu'au niveau des partenaires qui les accompagnent, on puisse définir pour les mois et les années à venir, un agenda de priorités pour les actions à mener aussi bien au niveau national que sur lesquels il peut y avoir une concertation au niveau sous régional ». S'y engager pour assurer la promotion des femmes et l'égalité, et, mesurer les progrès réalisés dans certains pays. La CEDAW est une véritable charte des droits des femmes, un instrument essentiel pour défendre et promouvoir les droits des femmes, elle influence les décisions à travers le monde et contribue aux progrès, estime Mme Nouzha Skalli, Ministre de Développement social, de la Famille et de la Solidarité. Intérêt de l'ONU Femmes Dans son allocution, Mme Karima Bounemra Ben Soltane a d'abord salué la création de l'ONU femmes, lequel traduit la volonté du système des Nations Unies de rationnaliser ses activités et les ressources mis à disposition en vue de renforcer son agenda « femmes ». Les Nations Unis ont estimé que le nombre très grand d'intervenants au niveau du système des NU œuvrant dans le domaine de la promotion et du développement de la femme ne jouait pas en sa faveur et diluait l'efficacité des résultats. Ce regroupement permet un meilleur dialogue entre les aspects normatifs et les aspects opérationnels et va apporter une plus grande dynamique dans cet agenda et dans son inclusion dans tous les agendas de développement durable, de développement économique, de développement social et de développement environnemental. Progrès louables mais encore des disparités et des discriminations à différents niveaux Mme Karima Bounemra Ben Soltane a relevé par ailleurs, les recommandations de la 26ème réunion du Comité Intergouvernemental d'Experts dont les recommandations ont mis l'accent sur la centralité du développement social, mais surtout sur l'importance de la prise en compte systématique de la dimension genre dans les politiques publiques. Mettant en exergue les mouvements populaires des pays d'Afrique du Nord, exprimant ainsi leurs attentes et le changement vers de nouvelles formes de gouvernance, plus d'équité et de transparence. Pour ce qui est de la Déclaration et de la Plate-forme Beijing, on y parle de protection des droits fondamentaux des femmes. La situation des femmes en Afrique du Nord, à des degrés divers, est en progrès en matière de parité pour l'accès au système éducatif, la baisse de la fertilité, l'allongement de l'espérance de vie des femmes, mais, des disparités et discriminations persistent entre les filles et les garçons, plus aigue entre le milieu urbain, rural et périurbain. Les filles sont plus nombreuses à abandonner l'école et peu nombreuses sur le marché de l'emploi, elles ont un faible accès aux postes de prise de décision, sont plus vulnérables économiquement, marginalisées malgré tous les efforts consentis et ont subi l'impact le plus accru des crises financière, économique et alimentaire ces dernières années. De plus, les stéréotypes et images négatives des femmes dans les médias persistent et il n'y a pas encore reconnaissance de la violence à l'égard des femmes en tant que droit humains et de développement. Il est donc essentiel de continuer à œuvrer pour plus d'égalité entre les femmes et les hommes. Le Maroc, en phase d'institutionnalisation des acquis et de constitutionnalisation de l'égalité L'agenda femme au Maroc évolue grâce à une volonté politique, à l'engagement de toutes les parties concernées qui s'activent à développer ce secteur et grâce à une société civile responsable et positivement agissante, souligne Mme Ben Soltane. Nous suivons avec beaucoup d'intérêt ce qui se passe au Maroc. Une initiative comme la régionalisation permet d'aller beaucoup plus prêt des besoins de l'individu et donc servira l'agenda femme et la promotion de la femme en augmentant sa participation, en lui permettant de mieux appréhender ses besoins et en lui donnant la possibilité de s'exprimer. L'installation du Conseil économique et social a été accueilli avec beaucoup d'espoir, puisque nous préconisons depuis plusieurs années un lien solide et plus systématique entre les composantes économiques et sociales du développement. Jusqu'à présent, l'économie prévalait. Ce conseil sera très probablement de nature à lier les développements sociaux aux développements économiques où les avancées sont intéressantes. Il y a beaucoup à apprendre et à analyser et nous souhaitons que le Maroc qui s'est engagé dans une voie résolument ouverte et démocratique bénéficie et sorte gagnant de toutes ces réformes qui ont été mises en place et voulues au plus haut niveau. Pour Mme Skalli,le Maroc vit une dynamique exceptionnelle et un débat de société autour de grands chantiers de réformes articulés autour de la mise en œuvre d'une régionalisation avancée ainsi qu'une révision globale de la Constitution. Cette révision annoncée dans le discours du 9 mars 2011 par Sa Majesté le Roi Mohammed VI place la question de l'égalité au centre des réformes, à travers l'appel à la constitutionnalisation de mesures garantissant l'accès des femmes aux mandats électoraux. « La réforme constitutionnelle lancée vise la consolidation de la démocratie et de l'Etat de Droit et des institutions, l'élargissement du champ des libertés individuelles et collectives et la garantie de leur exercice, ainsi que le renforcement du système des droits de l'homme dans toutes leurs dimensions, politique, économique, sociale, culturelle, environnementale et de développement. Le parachèvement de l'adhésion aux instruments internationaux et de la levée des réserves sur la CEDAW et l'adhésion à son protocole facultatif se trouve au centre de ces chantiers ». Mme la ministre a, par ailleurs mis en exergue les réalisations du pays, en matière de réformes : Code de la Famille, Code de la Nationalité, stratégies et programmes : TAMKINE, budgétisation sensible au genre, l'agenda gouvernemental en matière d'intégration de l'approche genre.... L'évaluation de la communauté internationale, lors du 30ème anniversaire a montré que, malgré les efforts déployés, aucun pays au monde n'a atteint la pleine égalité entre les sexes. Pour ce qui est de la levée des réserves et de son protocole facultatif, relève Mme Skalli, sujet que SA Majesté le Roi a levé dans le cadre des réformes qu'a connu le pays, nous sommes dans la mise en œuvre de la convention. A travers le discours Royal, les femmes sont vraiment au cœur des réformes constitutionnelles, Sa Majesté Mohammed VI a trouvé nécessaire de constitutionnaliser les droits des femmes, notamment en matière de droits politiques et de droits de participation à la gestion publique, donc de les placer dans la constitution et d'en faire un élément majeur de ses grandes réformes. Comptabiliser le travail des femmes, une tâche ardue Pour ce qui est de la comptabilisation du travail des femmes, nous manquons cruellement de données désagrégées par genre au niveau international. Essayer d'analyser ce qui se fait en termes de promotion de la femme, en termes d'avancées est souvent une tâche ardue. Et quand ces statistiques existent, elles sont dispersées, ce qui fait que l'évaluation reste approximative. C'est pour cela que, explique Mme Ben Soltane, les initiatives de certains pays pour plus de clarté dans ce domaine est à saluer. Au niveau du Maroc, le Haut Commissariat au Plan est dynamique dans ce domaine. Aussi, la budgétisation sensible au genre, adoptée par niveau du Ministère de l'économie et des Finances, est un modèle, une expérience et une bonne pratique, actuellement partagés dans le monde entier.