Les cours d'arabe pour les élèves des niveaux CE1 et CM2 des écoles françaises au Maroc sont passés de trois à cinq heures par semaine, renforçant ainsi l'importance de la « langue du dad » en tant qu'élément essentiel de l'identité marocaine. C'est une affaire dont les faits remontent à 2019, mais les rebondissements judiciaires, qui se prolongent jusqu'à aujourd'hui avec une nouvelle décision, constituent une avancée majeure dans le parcours d'intégration de l'arabe dans l'enseignement français au Maroc. Elle a été déclenchée lorsque l'Ecole André Chénier, établissement de l'Agence pour l'Enseignement français à l'Etranger, a décidé d'augmenter le quota des heures d'enseignement de l'arabe pour les élèves du CE1 et du CM2, passant de 3 à 5 heures, soit deux heures supplémentaires par semaine. Bien que cette décision ait été saluée par certaines familles, elle n'a pas été du goût de tous les parents d'élèves de l'école, qui ont estimé que cette augmentation des heures de cours en arabe représenterait une charge supplémentaire pour leurs enfants, affectant ainsi la qualité de leur apprentissage. En réaction, ils ont porté le différend devant les juridictions françaises pour annuler la décision prise par l'établissement. C'est dans ce cadre qu'un premier jugement du tribunal administratif de Paris leur avait donné raison, avant que le Conseil d'Etat français ne statue récemment sur cette question qui a suscité un débat énorme. En effet, le Conseil a tranché en faveur de l'ajout de deux heures d'enseignement de la langue arabe par semaine pour les élèves du CE1 et CM2 de l'école affiliée à la mission française, soulignant que ces dépassements du volume horaire hebdomadaire total « doivent être considérés comme un aménagement de l'organisation de la scolarité [...] et un moyen de renforcer la coopération avec les systèmes éducatifs étrangers ».
Les dessous de la discorde
Conformément à ce jugement, les cours d'arabe pour les élèves des niveaux CE1 et CM2 sont passés de trois à cinq heures par semaine, malgré l'opposition parentale, tout en sachant que l'ajout d'heures supplémentaires de langue arabe dans les écoles françaises au Maroc s'inscrit dans le cadre de la mise en œuvre de la déclaration d'intention signée entre la France et le Maroc en novembre 2017, visant à renforcer la coopération éducative entre les deux pays. Il est à noter que cette décision intervient dans un contexte particulier où le Maroc, à travers sa législation, insiste sur l'enseignement de la langue arabe dans les écoles étrangères présentes sur son territoire. En effet, selon l'article 31 de la loi-cadre n° 51-17 relative au système d'éducation, de formation et de recherche scientifique, les établissements scolaires étrangers au Maroc doivent enseigner les langues arabe et amazighe à tous les enfants marocains inscrits dans leurs classes. « Cette exigence vise à promouvoir la culture et l'identité nationales des élèves marocains, tout en respectant les accords bilatéraux signés entre le Maroc et certains pays, régissant les statuts de ces institutions éducatives », explique Mohamed Guedira, Professeur universitaire, expert en politiques éducatives et ingénierie des compétences, saluant la décision du Conseil d'Etat français sur le cas « André Chénier ».
Maîtriser l'arabe, une exigence culturelle et professionnelle
Soulignant l'importance du plurilinguisme dans le parcours des élèves, l'expert considère la maîtrise de l'arabe comme atout majeur pour les jeunes quel que soit leurs domaines d'activités. « Plus qu'un simple support de communication, l'arabe fait partie intégrante de l'identité marocaine et constitue une valeur ajoutée à la jeune génération qu'elle que soit son enseignement », insiste-t-il dans un ton ferme. Cela dit, l'élargissement des cours d'arabe, tel qu'envisagé par les missions françaises présentes au Maroc, vise à doter les élèves de compétences clés tout en préservant leur identité commune, selon notre interlocuteur. Cette démarche devient de plus en plus légitime, surtout lorsqu'on considère que de nombreux étudiants qui poursuivent leurs études en France retournent généralement au Maroc. Pour réussir leur insertion socio-professionnelle, ils doivent disposer des outils nécessaires pour communiquer et travailler efficacement en arabe, en plus d'autres langues étrangères, particulièrement le français et l'anglais. D'où la nécessité, selon Guedira, de déployer des mesures de sensibilisation à l'importance de la langue arabe dans les écoles et auprès des familles. Dans cette optique, le réseau OSUI – MLF Monde s'engage, en collaboration avec l'UM6P, à concevoir des programmes innovants en anglais et en français, tout en renforçant l'apprentissage de la langue arabe, qui occupera une place plus importante dans les programmes futurs du réseau, tel qu'il a été souligné par Christian Masset et Jean-Marc Merriaux, respectivement président et directeur général de l'OSUI, dans un précédent entretien accordé à L'Opinion.