Après la baisse inattendue en juin dernier du taux directeur à 2,75%, les investisseurs financiers s'attendent à un nouvel assouplissement de la politique monétaire par le Conseil de Bank Al-Maghrib (BAM), dont la troisième réunion trimestrielle de 2024 est prévue mardi prochain. Selon un sondage réalisé par Attijari Global Research (AGR) dans son récent "research report strategy, la probabilité d'une diminution de 25 points de base (pbs) du taux directeur est estimée à 83 % par un panel de 35 investisseurs majeurs du marché marocain. Cette vision se dessine dans un contexte marqué par un certain apaisement des pressions inflationnistes, bien que les incertitudes économiques persistent. Ainsi, les investisseurs s'accordent à dire qu'une baisse du taux directeur offrirait un soutien "bienvenu" à l'économie marocaine, confrontée à divers défis tant internes qu'externes, notamment liés à la production agricole et aux fluctuations des marchés internationaux de l'énergie. Baisse de -25 pbs vs statu quo Le sondage d'AGR révèle que l'ensemble des catégories d'investisseurs interrogées, qu'il s'agisse des institutionnels locaux, des acteurs de référence ou des investisseurs étrangers, considèrent majoritairement que BAM devrait opter pour une baisse du taux directeur. Les investisseurs institutionnels locaux attribuent une probabilité de 85% à une baisse de 25 pbs, tandis que les investisseurs étrangers sont unanimes à 100 % pour cette option. Cette éventuelle diminution s'inscrit dans un contexte international où des mesures similaires ont été prises. Après la Banque centrale européenne (BCE), qui a réduit son taux directeur à 3,5% le 12 septembre, la Réserve fédérale américaine (Fed) a également annoncé une baisse de ses taux d'intérêt de 0,5 point de pourcentage le 18 septembre. Cette décision vise à faire face à une inflation en recul tout en soutenant l'emploi, une dynamique susceptible également d'influencer les choix de BAM dans un contexte où les banques centrales adoptent des politiques monétaires plus souples. De son côté, BMCE Capital Global Research (BKGR) prévoit que BAM maintiendra sa politique monétaire inchangée. Une anticipation qui découle d'une volonté d'observer de plus près les effets de la décompensation du gaz butane sur l'inflation. Selon un sondage mené par BKGR auprès d'investisseurs institutionnels marocains, 71,4 % des participants jugent adéquate la politique monétaire actuelle. Cependant, les avis concernant la direction à prendre lors du prochain Conseil sont partagés : 50 % s'attendent à un statu-quo tandis que l'autre moitié envisage une baisse de 25 points de base du taux directeur. Contexte économique et incertitudes Le paysage économique actuel demeure caractérisé par des enjeux structurels majeurs, engendrant des répercussions significatives sur divers secteurs clés. Selon le récent rapport de BAM intitulé "Stratégie de Développement de la Finance Climat à l'horizon 2030 : Constats, Vision et Stratégie", la transition de l'économie marocaine nécessite des réformes profondes afin de promouvoir une croissance plus inclusive et soutenable. Cette transformation implique particulièrement l'optimisation des mécanismes de financement dédiés aux petites et moyennes entreprises (PME), un aspect crucial dans le cadre des orientations monétaires et fiscales. Le secteur agricole, vital pour l'économie marocaine, continue de quant à lui de souffrir de la sécheresse, ce qui pèse considérablement sur les prévisions de croissance pour 2024. Par ailleurs, les tensions sur les marchés internationaux de l'énergie et des matières premières maintiennent toujours une pression sur les coûts de production des entreprises. Cette situation pourrait ainsi justifier une nouvelle réduction des taux afin d'encourager l'investissement et la consommation nationaux. Les enjeux de la politique monétaire Les décisions relatives à la politique monétaire prises par Bank Al-Maghrib reposent sur une analyse approfondie des perspectives à moyen terme en matière de croissance et d'inflation. La potentielle réduction du taux directeur envisagée vise à alléger le fardeau financier des ménages et des entreprises face à des coûts de financement élevés et à une pression sur le pouvoir d'achat. Néanmoins, les options de manœuvre de BAM demeurent contraintes par les équilibres macroéconomiques et les défis budgétaires. Les résolutions de cette instance seront étroitement surveillées lors de l'élaboration du projet de loi de finances pour 2025, lequel devra intégrer les orientations économiques et financières à venir, notamment en ce qui concerne le déficit budgétaire et les investissements publics. En somme, les anticipations des marchés financiers et les tendances et dynamiques économiques semblent converger vers une baisse du taux directeur, qui constituerait une réponse appropriée aux défis économiques actuels, tout en adoptant une approche prudente sur le long terme. Il reste à voir si Bank Al-Maghrib confirmera ces prévisions lors de son attendu Conseil du mardi prochain.