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Le PNUD reconnaît le caractère dépassé des indicateurs actuels Le HCP expose les limites de la mesure du développement humain
"L'indicateur de développement humain: ses limites et les problématiques de sa réforme"
Dans un document relatif aux critères adoptés par le PNUD sur l'indice du développement humain (IDH), le Haut commissariat au Plan apporte un éclairage pertinent sur le caractère “sélectif” et “statique” des indicateurs actuels. Ces dernier favorisent, en effet, les pays ayant une accumulation du capital physique et humain pendant une longue période ou ceux qui disposent de ressources minières importantes et n'exprime pas la dynamique du développement humain, comme c'est le cas pour le Maroc qui est classé 130ème selon l'IDH, alors qu'il se classe 11ème en termes de performance durant les 7 dernières années. Nous reproduisons ci-après ce document, lucide et convainquant, suivi du changement de la position du PNUD à cet égard. “Précisons d'abord qu'au HCP nous ne contestons pas les statistiques des Nations Unies d'une façon générale et celles du PNUD en particulier. Les réserves que nous avons formulées depuis plus de deux ans sur l'IDH portent, cependant, sur la pertinence de la comparabilité des niveaux de développement humain sur la base d'indicateurs calculés à partir de données fournies par des systèmes nationaux d'information statistique d'inégale rigueur ou d'estimation dans plusieurs cas lorsque ces sources d'informations ne sont pas disponibles. Outre cet aspect méthodologique et quantitatif, c'est sur la pertinence des indices composants l'IDH que portent nos principales remarques. De notre point de vue, ces indices sont insuffisants ou inappropriés pour évaluer le niveau de développement humain dans les pays et le sont encore plus pour servir de base à un classement des pays dans ce domaine. Nous sommes particulièrement satisfaits de l'ouverture d'esprit et de volonté d'améliorer ce critère dont fait preuve l'Administration du PNUD dans l'objectif de définir de nouveaux critères plus expressifs des performances de développement humain dans le monde à l'horizon 2010. Nous sommes quant à nous disposés à apporter à cet effet la contribution à cette entreprise par l'apport des fruits de nos recherches et notre expérience. Quelles sont donc à ce jour quelques unes de nos remarques et de nos suggestions ? Elles portent sur l'hétérogénéité en termes de rigueur des sources statistiques des indicateurs élémentaires de l'IDH, sur les limites de ces indicateurs en tant que critères d'évaluation de performance en matière de développement humain ainsi que sur la nécessité de les enrichir pour leur donner une portée plus globale et plus appropriée. Sources de données La mesure du développement humain se base sur des données provenant de la Banque Mondiale pour ce qui est du PIB, de l'UNESCO pour ce qui est de l'alphabétisation et de la scolarisation et de la Division de la Population des Nations Unies pour ce qui est de l'espérance de vie à la naissance. Le niveau de développement des systèmes statistiques reste très variable dans le monde: * Seuls 64 pays dans le monde dont 4 pays en Afrique (y compris le Maroc) ont un système statistique qui adhère à la Norme Spéciale de Diffusion des Données du FMI (NSDD) ; * Sur les 118 pays qui ne sont pas au niveau d'être admis par cette norme, 67 sont classés entre 20 et 128ème rang. * Sur 145 pays évalués, la Banque mondiale considère que 108 pays ont des capacités statistiques inférieures à celles du Maroc qui occupe à cet égard le 36ème rang. * En matière de méthodologies statistiques utilisées, le Maroc, après la réforme de l'indice du coût de la vie, réalise un score de 100% contre un score moyen au niveau mondial de 56%. * S'agissant de la comptabilité nationale, seuls 18 pays (dont le Maroc) sur 53 en Afrique ont adopté le SCN93. Dans le monde arabe, seuls 6 pays sont dans ce cas. Les limites du PIB par habitant comme critère de développement humain Plus un pays a un pré-acquis historique en matière de capital physique et humain ou de mannes provenant de ressources minières, et d'une faible population, plus son PIB/habitant est élevé: -Botswana: 1,9 millions d'habitants, un PIB de 13604 $PPA (grâce aux diamants) -Qatar: 1,1 millions d'habitants, un PIB de 74882 $PPA (pétrole) -Gabon: 1,4 millions d'habitants, un PIB de 15167 £PPA (pétrole) -Andorre: 83000 habitants et un PIB par habitant de 41235 $PPA - Liechtenstein: 35000 habitants et un PIB par habitant de 85382 $PPA. Le PIB diffère d'un pays à l'autre quant à la soutenabilité, un PIB provenant d'une rente minière mal utilisée est beaucoup moins soutenable à long terme qu'un autre provenant de sources diversifiées de production. D'ailleurs, selon les recommandations de la commission Stiglitz, l'épuisement de ces ressources naturelles devraient venir en déduction des PIB. *Plusieurs pays améliorent leur classement de manière significative uniquement par l'appréciation du prix du pétrole sur le marché mondial, sans pour autant que le niveau de vie de leur population s'améliore en conséquence. Le PIB par habitant ne peut servir de critère de classement. Il ne renseigne pas sur la répartition des richesses et sur le niveau de vie réel de la population: - Namibie (128ème selon l'IDH), le ratio «part des 10% les plus riches/part des 10% les plus pauvre» est de 107 fois contre 12,5 pour le Maroc. - Le Maroc est classé au rang 81 selon l'indice de GINI qui mesure la concentration des richesses. 38 pays parmi ceux qui devancent le Maroc ont un indice de GINI supérieur. L'espérance de vie L'espérance de vie à la naissance est un indicateur important de mesure du développement humain, car il reflète globalement le niveau de santé d'une population donnée. Il dépend de plusieurs facteurs tels que l'état de malnutrition et la vaccination des enfants. Ces facteurs importants ne sont cependant pas pris en considération dans le calcul de l'IDH. L'alphabétisation Les niveaux de scolarisation et d'alphabétisation d'un pays restent liés à l'espérance de vie de sa population. Le paradoxe est que l'amélioration de ce dernier indicateur se traduit par la résistance à la hausse des taux d'alphabétisation retenus également par l'IDH. A titre d'exemple, toutes choses étant égales par ailleurs, si le Maroc avait une espérance de vie limitée à 50 ans, il aurait gagné 10 points dans son d'alphabétisation. Quels sont les indicateurs importants omis par l'approche du PNUD ? Les critères importants à prendre en considération pour appréhender le développement humain dans un pays donné doivent nécessairement inclure certaines dimensions liées aux conditions de vie de la population telles que l'équité sociale de la répartition des revenus, la pauvreté, le chômage, l'accès à l'eau, à l'électricité et à la route, la jouissance des droits humains, économiques, sociaux et politiques et tenir compte des priorités et des spécificités des populations locales. La réflexion actuellement en cours sur la mesure du bonheur et du progrès illustre la difficulté de confectionner des instruments de mesure pertinents dans ce sens. Du reste, questionnés sur leurs priorités socio-économiques, 20% des Marocains résidant en milieu urbain classent l'emploi à la tête de leurs priorités socio-économiques, suivi de l'habitat social (19%) et du pavement des rues (14%). L'électricité est à la tête des priorités des ruraux (27%), suivie de l'eau potable (23%) et des routes (21%). Dans ces domaines, le Maroc a enregistré des avancées considérables entre 1999 et 2008: # le taux de chômage urbain est en baisse tendancielle depuis une dizaine d'années, passant de 22,0% en 1999 à 14,7% en 2008 ; # le pourcentage de ménages urbains propriétaires de leur logement a augmenté de 60,9% à 65,9% ; # le taux d'accès des ruraux à l'électricité a été multiplié par 3,5 fois, passant de 23.2% à 80,5% ; # le pourcentage de ruraux qui accèdent à l'eau potable a augmenté de 15.5% à 44.5%. Conclusion De tout cela, il résulte que l'indicateur actuel est très sélectif, favorise les pays ayant une accumulation du capital physique et humain pendant une longue période ou ceux qui disposent de ressources minières importantes. Il est par ailleurs statique et n'exprime pas la dynamique du développement humain. Le cas du Maroc est flagrant, il est classé 130ème selon l'IDH, alors qu'il se classe 11ème en termes de performance durant les 7 dernières années. Aussi le HCP se considère-t-il partie prenante dans les débats ouverts par le PNUD sur l'IDH et adhérera à toute réforme qui reflèterait le Développement humain dans son acception la plus large. C'est le cas qui nous semble le plus pertinent des OMD sur lesquels le Maroc, comme tous les pays membres des Nations Unies se sont engagés à réaliser à l'horizon 2015. A cet effet, le PNUD et le Maroc se sont engagés à organiser en partenariat une rencontre dédiée à ces questions”. Notons à cet effet qu'une rencontre a eu lieu, jeudi 8 octobre 2009, entre M. Ahmed Lahlimi Alami, Haut commissaire au Plan, et Madame Alison Kennedy, Directrice de l'Unité des Statistiques, Bureau du Rapport Mondial sur le Développement Humain à New York, en sa qualité de porteuse du message du PNUD relatif au Rapport sur le Développement Humain publié par cette institution des Nations Unies au titre de l'année 2009. La rencontre a été suivie d'un point de presse articulé autour du thème: "L'indicateur de développement humain: ses limites et les problématiques de sa réforme" auquel a pris part Mme Alia Al Dali, Représentante Résidente du PNUD par intérim. Mme Alisson Kennedy a ainsi affirmé que les indicateurs de développement humain utilisés aujourd'hui par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) datent de plus de 20 ans et devraient être actualisés. Les critères actuels "ne sont pas les meilleurs", a-t-elle souligné précisant que son institution a déjà commencé à réfléchir sur les moyens de revoir ces critères en impliquant notamment les experts des pays concernés. Mme Kennedy a évoqué à cet égard la possibilité d'introduire ou de supprimer des critères et d'adopter une nouvelle méthode d'évaluation des progrès enregistrés par les pays concernés. Pour sa part, M. Lahlimi a fait part de certaines réserves sur les sources sur lesquelles l'institution onusienne se base pour élaborer son classement, lesquelles "ne reflètent pas de manière exacte la réalité de développement du pays et les efforts consentis en matière de développement humain". "Nous n'avons jamais contesté les chiffres présentés par le PNUD mais nous avons des réserves sur les sources de ses statistiques", a noté M. Lahlimi, appelant à revoir les critères retenus pour l'évaluation de l'indice du développement humain. M. Lahlimi a donné l'exemple du PIB par habitant qui est un critère qui n'est pas "très expressif" de la réalité du développement humain. Le Haut commissaire au plan, qui a salué l'excellence des relations de coopération entre le Maroc et le PNUD, a exprimé la disposition du Royaume de contribuer à l'enrichissement du débat autour de la réforme du système d'évaluation du développement humain de l'institution onusienne. Il a fait part dans ce sens de la volonté des deux parties d'organiser au Maroc une rencontre sur ce thème qui sera l'occasion de jeter les bases d'une nouvelle approche en la matière. Mme Alia Al Dali, représentant résident-adjoint du bureau du PNUD à Rabat s'est pour sa part félicitée de l'intérêt et de l'engagement du Maroc en matière de développement humain. "Le Maroc est le seul pays de la région qui a relevé de nombreux défis en matière de développement humain ", a-elle déclaré, formant le souhait de voir la coopération se renforcer davantage avec le Royaume notamment pour approfondir la réflexion sur les indicateurs de développement du PNUD.