Après avoir fermé les frontières, le gouvernement dope la vigilance avec de nouvelles mesures qui laissent augurer un retour aux restrictions. Les opérations de séquençage génomique ont démarré. En attente des résultats, les autorités augmentent le niveau d'alerte. Détails. Surgi brusquement, le nouveau variant du Covid-19, Omicron, menace de nouveau la tranquillité de la vie quotidienne des citoyens qui ont repris le goût des libertés après la levée des restrictions le 10 novembre. Partout, les gens se demandent s'ils en ont pour longtemps de jouir des balades nocturnes sans crainte du couvre-feu. Jusqu'à présent, même si le gouvernement n'a pas encore fait part de ses intentions, le retour aux restrictions demeure toujours probable comme dernier recours en cas d'entrée de la nouvelle souche au Maroc. En tout cas, l'Exécutif multiplie les gestes de précaution et les indices précurseurs sont là : le gouvernement a décidé, dans la soirée du mercredi, de réduire la tenue des cérémonies funèbres, l'Exécutif a fait le choix de limiter à dix le nombre maximum des personnes qui peuvent assister aux cérémonies des funérailles et des obsèques. Dans le communiqué du gouvernement, cette décision a été justifiée par des arguments de prudence et de vigilance qu'exige la lutte contre la propagation de la pandémie. A la recherche des cas suspects Jusqu'à maintenant, aucun cas d'Omicron n'est signalé. Ceci n'a pas empêché les autorités sanitaires de renforcer la veille génomique pour repérer le nouveau variant, au cas où il aurait infiltré le territoire national. Les opérations de séquençage ont d'ores et déjà commencé, selon des sources bien informées, l'enjeu est d'analyser tous les tests PCR effectués récemment, par les personnes qui se sont déclarées positives. Ce genre de procédés se fait au niveau du Consortium National de Veille Génomique du SARS-CoV2, qui fournit des données sur la mutation du Covid-19 au Maroc. Le Centre National pour la Recherche Scientifique et Technique est également impliqué dans cette démarche. Sur la base de ses analyses, le ministère de la Santé communique officiellement en cas d'apparition d'un nouveau variant. Le Comité scientifique reste serein En attendant les résultats, la panique traverse les esprits qui redoutent le redéploiement des restrictions. Le Comité scientifique se montre, pour sa part, rassurant, dont un membre éminent, qui a requis l'anonymat et qu'on a croisé dans une conférence, nous a rassuré que les restrictions ne sont pas à l'ordre du jour du Comité, du moins pour l'instant. Toutefois, des sources proches du gouvernement nous expliquent qu'un signal positif du Comité suffit pour songer sérieusement à revenir à la restriction de la mobilité, si la situation devient plus inquiétante qu'elle ne l'est maintenant. Ce qui complique la tâche des décideurs actuellement, c'est le manque de visibilité sur le nouveau variant qui demeure obscur en ne révélant pas ses secrets. Les études s'enchaînent au niveau international afin de déterminer son degré de dangerosité et de voir à quel point les vaccins sont efficaces contre la nouvelle mutation. En tout état de cause, le variant Omicron, qui porte le nom de « B.1.1.529 », est qualifié de "préoccupant" par l'Organisation Mondiale de la Santé l'OMS. Les experts demeurent quant à eux modérés dans leur discours, Jaâfar Heikel, épidémiologiste et expert en économie de la Santé, estime qu'il n'y pas assez de données épidémiologiques qui prouvent que le variant Omicron soit plus transmissible que Delta. "Les résultats partiels montrent des signes cliniques modérés", a-t-il écrit sur son compte Twitter, ajoutant que le virus n'a pas encore entraîné une hausse spectaculaire des cas positifs dans le monde. La moyenne quotidienne des cas positifs est passée de 542.000 cas, enregistrés le 21 novembre, à 577.000 cas observés le 1er décembre. Pour sa part, Ahmed Rhassane El Adib, Professeur en anesthésie-réanimation au CHU Mohammed VI de Marrakech, estime que la fermeture des frontières ne suffit pas pour empêcher la propagation du nouveau variant, appelant à accélérer la vaccination. Encore faut-il que les vaccins soient efficaces et adaptés au nouveau variant. Kamal Marhoum Filali nous en parle. (voir trois questions à...). Anass MACHLOUKH Trois questions à Kamal Marhoum Filali " La possibilité d'une nouvelle vague est probable avec ou sans le variant "
Kamal Marhoum Filali, virologue et chef du service des maladies infectieuses au CHU Ibn Rochd à Casablanca, a répondu à nos questions sur le nouveau variant Omicron. - Le Maroc, comme beaucoup de pays dans le monde, est menacé par le nouveau variant, doit-on craindre une nouvelle vague, en cas de son arrivée au Maroc ? - En réalité, la possibilité d'une nouvelle vague est toujours à prendre au sérieux, nonobstant la nature du variant. Comme nous sommes entrés dans la saison hivernale, les maladies virales se déploient plus fortement qu'avant. Actuellement, la situation épidémiologique demeure stable, mais si on est moins rigoureux dans le respect des gestes barrières et toutes les mesures préventives, il est probable qu'on serait moins en capacité de préserver les acquis. Avec le nouveau variant, la probabilité d'une nouvelle vague est d'autant plus sérieuse que le froid procure un climat propice à la propagation des virus. - Dispose-t-on d'assez de données préliminaires suffisantes pour découvrir le nouveau virus muté ? - Ce qu'il faut craindre le plus, c'est que la nouvelle souche Omicron, si jamais elle fait son entrée au Maroc, redéploie la pandémie, en se mélangeant aux autres variants existants. En effet, la nouvelle mutation n'est pas encore cernée scientifiquement et les études sont en cours actuellement. Mais, ce qui mérite l'attention, c'est la contagiosité du virus qui peut augmenter avec Omicron. Il est probable que le Taux de reproduction (R0) augmente comme c'était le cas avec Delta qui se transmet 2 fois plus que la version originale. Bien que cela reste des hypothèses, il faut le prendre en compte pour rester vigilant. - Concernant les vaccins, sont-ils toujours efficaces ou faudra-t-il les réadapter ? - A mon avis, je trouve qu'il faut continuer à vacciner avec les stocks dont nous disposons, puisqu'en tout cas, les vaccins restent bénéfiques même si leur efficacité pourrait diminuer, ce qui reste à vérifier. Le virus muté ne sera forcément pas complètement des souches précédentes, ce qui permet aux vaccins de procurer une certaine immunité. Je rappelle que les laboratoires ont d'ores et déjà commencé à réadapter leurs vaccins. Ce qui prendra près de trois mois.