L'Agence marocaine de l'efficacité énergétique (AMEE) a signé une convention avec le ministère de l'Education nationale afin de l'accompagner dans une démarche d'exemplarité en matière d'efficacité énergétique. Quels sont les vrais enjeux ? Une convention-cadre de partenariat a été signée, mardi 9 février, entre le ministère de l'Education nationale, de la Formation professionnelle, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique et l'Agence marocaine de l'efficacité énergétique (AMEE), en vue de promouvoir l'efficacité énergétique. Paraphée par le ministre de l'Education nationale, de la Formation professionnelle, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, Saaïd Amzazi, et le directeur général de l'AMEE, Saïd Mouline, la convention vise à mettre en place des mesures d'économie d'énergie et d'actions de sensibilisation et de formation à l'économie verte, et à l'efficacité énergétique au sein du ministère. Selon un communiqué conjoint des deux institutions, cet accord « s'inscrit dans le cadre de la déclinaison de la stratégie nationale de l'efficacité énergétique, ainsi que l'exécution du plan d'action transversal relatif à la mise en œuvre de l'exemplarité de l'Etat ». Diagnostic et mise en œuvre Cet accord nécessitera une mobilisation de quatre millions de dirhams en nature par l'AMEE, a précisé M. Saaïd Mouline, directeur général de l'AMEE, qui a par ailleurs mis en avant les efforts qui seront déployés par l'Agence afin d'accompagner le ministère dans la réalisation des diagnostics énergétiques des flottes de véhicules et des bâtiments relevant des départements du ministère, ainsi que pour assurer la mise en œuvre des recommandations de ces diagnostics. Saaïd Mouline a par ailleurs indiqué que l'opérationnalisation de l'efficacité énergétique est aujourd'hui un outil privilégié de bonne gouvernance, incontournable pour la réduction de la facture énergétique et la réalisation d'un taux de croissance verte de plus en plus significatif. « L'Etat doit montrer l'exemple et mettre en œuvre, dans ses propres bâtiments et services, les mesures d'efficacité énergétique », a-t-il relevé. Un chantier à forte valeur ajoutée La mise en œuvre de l'exemplarité de l'administration est un chantier qui a été amorcé dès 2017 dans le sillage de l'institutionnalisation de la Stratégie Nationale de Développement Durable (SNDD). Cette dynamique, qui a pour objectif de conformer les divers départements aux nouveaux objectifs environnementaux, énergétiques et sociaux déterminés par la SNDD, est non seulement une façon pour l'Etat de « montrer l'exemple » mais également un moyen de normaliser les bonnes pratiques de gouvernance, et un outil efficace pour rationaliser les dépenses publiques. À l'instar de l'engagement pris par le ministère de l'Education nationale et l'AMEE, chaque département ministériel devra d'abord commencer par un audit environnemental, social et énergétique qui permettra de fixer un plan d'action approprié. « Grâce à cette dynamique de maîtrise et d'optimisation des dépenses de fonctionnement, 20% à 50% d'économie potentielle sur le budget de l'Etat pourront être atteints, ce qui est très important, surtout dans le contexte actuel marqué par la crise sanitaire et la nécessité d'une relance économique », explique pour sa part Hassan Agouzoul, expert en développement durable et en transition énergétique. Quid des autres départements ? « Aujourd'hui, il y a des départements qui ont fait les audits préalables à la déclinaison d'un plan d'action pour l'exemplarité de l'administration, mais d'autres tardent encore à le faire. Le département de l'Environnement, qui est le point focal par rapport à ce sujet, est actuellement en train d'accompagner l'ensemble des départements ministériels pour élaborer des plans qui traduisent les sous-objectifs en actions opérationnelles pour chaque bâtiment central à Rabat », contextualise Hassan Agouzoul. Si la démarche pour amorcer une transition environnementale et sociale pour les administrations centrales nécessite d'allouer un budget spécifique, qui n'est pas toujours disponible au niveau des départements ministériels, cet investissement apparaît comme insignifiant en comparaison avec les montants importants qui pourront être économisés grâce à une démarche d'efficience énergétique, environnementale et sociale. Oussama ABAOUSS 3 questions à Hassan Agouzoul, expert en développement durable « L'exemplarité des administrations ne devrait pas s'arrêter à l'administration centrale »
Expert spécialisé en développement durable et en transition énergétique, Hassan Agouzoul a répondu à nos questions sur la dynamique d'exemplarité des administrations marocaines. - Les départements ministériels sont-ils légalement obligés de s'engager dans une dynamique d'exemplarité ? - Il y a plusieurs références juridiques qui encadrent actuellement la dynamique d'exemplarité de l'administration : la SNDD, la réglementation marocaine en matière de protection de l'environnement et d'efficacité énergétique, la réglementation liée aux marchés publics, à la lutte contre la corruption et aux normes sociales encadrées par le code du travail, les principes de Gouvernement Ouvert adoptés dans le cadre du OGP (Open Government Partnership de l'OCDE), sans oublier les normes NM développées par l'IMANOR qui accompagnent et facilitent la mise en œuvre de cette réglementation. - Ce cadre est-il suffisant pour accélérer la dynamique d'exemplarité de l'administration ? - Il y a bien sûr moyen de passer à un niveau supérieur. Le rehaussement du niveau d'engagement de l'administration pourrait par exemple se matérialiser dans le management des ressources humaines via des objectifs annuels des responsables hiérarchiques de chaque département ministériel, et dans le cadre de la budgétisation de chaque ministère à travers une rubrique dédiée qui fixe les budgets, mais également les indicateurs et objectifs chiffrés. Il y a enfin le mécanisme de la commission nationale de développement durable et le comité de suivi de mise en œuvre de la SNDD qui pourrait inciter chaque département à faire le compte-rendu de l'atteinte des objectifs assignés du pacte de l'exemplarité de l'administration devant le chef du gouvernement. - Et au niveau régional ? - Je pense que l'exemplarité des administrations ne devrait pas s'arrêter à l'administration centrale dans la capitale et aux bâtiments des ministères à Rabat. L'objectif ultime serait qu'elle soit également déclinée au niveau régional et au niveau des bâtiments des collectivités territoriales. Recueillis par O. A. Encadré Bilan : 21 départements ministériels engagés dans la dynamique d'exemplarité À ce jour, « quelque 21 départements ministériels ont réalisé ou sont en train de réaliser leurs Plans ministériels de l'exemplarité de l'administration dans le cadre de la mise en œuvre de la stratégie nationale de développement durable », a indiqué le ministère de l'Energie, des Mines et de l'Environnement dans un récent communiqué. Cet engagement a permis à plusieurs ministères de réaliser des économies réelles en matière de ressources, étant donné que certains départements ont pu réduire leur consommation en eau de 50% et produire 22% de leurs besoins en électricité à partir des énergies renouvelables, tandis que d'autres ont pu atteindre 32% de véhicules propres au niveau de leur parc automobile et réaliser un taux de recyclage des déchets d'environ 35%. Afin d'accompagner les départements ministériels dans le processus de préparation de leur Plan ministériel de l'exemplarité de l'administration (PMEA), le Département de l'Environnement a mené plusieurs actions, notamment l'élaboration et la diffusion d'un guide méthodologique sur l'exemplarité de l'administration, des fiches d'orientation par thématique (eau, déchets, mobilité, efficacité énergétique, etc.), et des termes de référence standardisés sur l'audit environnemental au niveau des bâtiments publics. Une assistance technique a, par ailleurs, été mise à la disposition des départements ministériels dans le cadre de la coopération internationale pour accélérer la cadence de réalisation et généraliser ces mesures au niveau des établissements publics et des collectivités territoriales. Repères Formation et sensibilisation À travers cette convention-cadre signée avec le ministère de l'Education nationale, qui s'étalera sur quatre ans, l'AMEE compte sensibiliser des milliers d'étudiants à l'entrepreneuriat vert afin de former un véritable écosystème favorable à l'émergence et au développement des projets durables. Cet accord portera également sur la réalisation des actions d'assistance technique, de formation et de sensibilisation au profit des formateurs du ministère pour la création de nouveaux modules de formation en relation avec l'efficacité énergétique. Pacte de l'exemplarité de l'administration Adopté par le Comité national de développement durable sous la présidence du chef du gouvernement en février 2019, le Pacte de l'exemplarité de l'administration (PEA) institutionnalise l'engagement de l'administration marocaine dans le domaine du développement durable. Le 30 mai 2019, le chef du gouvernement avait envoyé une circulaire à tous les ministères en leur demandant de mettre en œuvre les mesures nécessaires pour commencer les audits préalables nécessaires pour l'élaboration de plans d'action adéquats.