Quelques semaines après l'inauguration de l'usine de dessalement d'El Hamma à Alger, c'est maintenant au tour d'Oran de se doter d'une station de dessalement d'eau de mer de calibre international. En effet, la station, qui sera construite par le groupe singapourien Hyflux, est appelée à devenir la plus grande usine de dessalement au monde. Avec une production anticipée à 500 000 m3 par jour (m3/j) pour un coût de 468 millions de dollars (contre 200 000 m3/j et 248 millions de dollars pour celle d'El Hamma), le méga-projet qui sera construit à Magtaa, en banlieue d'Oran, est considéré comme le projet de dessalement le plus ambitieux au monde, selon Amenallah Sari, le PDG de l'Algerian Energy Company (AEC). L'usine sera réalisée sur un site de 18 ha et l'eau sera destinée à Oran et ses environs. Le financement sera assuré à 70% par des banques locales avec comme chef de file la Banque nationale d'Algérie. Cette initiative fait partie d'un plan clairement établi par les autorités algériennes visant à accroître les ressources nationales en eau. En effet, l'Algérie a prévu de réaliser d'ici à 2011 treize stations de dessalement d'eau de mer pouvant produire plus de 2 millions de m3/j afin de mettre fin à la pénurie d'eau potable dans le pays. La production de chaque unité varie entre 50 000 et un demi-million de m3/j. Ainsi, le 7 avril dernier, le consortium composé du britannique Biwater, de l'américain Toray et de l'algérien Arcofina a remporté le marché situé à Oued Sebt, dans la wilaya de Tipaza, d'une capacité de 100 000 m3/j. Dans la région de Ténès, à l'ouest d'Alger, le groupe espagnol Befesa Agua a signé début avril un contrat de 291 millions de dollars pour la réalisation d'une usine de dessalement qui sera opérationnelle en 2010. L'usine fournira 200.000 m3/j aux habitants de cette région et sa construction débutera en juillet 2008. L'AEC procède actuellement à la dernière ouverture des plis pour les projets restants qui comptent 2,3 millions de mètres cubes et notamment celui d'El Tarf d'une capacité de 50 000 m3/j, et le projet d'Oued Sebt de 100 000 m3/j. Ainsi, l'usine de Kahrama à Arzu qui produit actuellement 88 800 m3/j, l'unité de Skikda, d'une capacité de 100 000 m3/j qui sera mise en service en juin prochain, celle de Beni Saf qui commencera à produire 200 000 m3 par jour dès la fin de l'année, et celle d' El Hamma, assureront pour l'année 2008 une production de près de 600 000 m3 par jour d'eau potable. « Le projet d' El Hamma subviendra aux besoins pressants en eau du quart de la population de la capitale, soit plus d'un million de personnes » a dit Smail Bouderba, directeur général de GE Oil & Gaz en Algérie, à OBG. Néanmoins, les spécialistes sont divisés sur la question du dessalement d'eau de mer, notamment au niveau des coûts et de l'impact sur l'environnement. Un rapport consacré aux usines de dessalement réalisé par le Fonds Mondial pour la nature (WWF) ne cache pas son inquiétude. « Extraire le sel de l'eau de mer pour pallier au manque d'eau potable est en train de devenir une panacée et cette solution représente une menace pour l'environnement ne faisant qu'aggraver les changements climatiques » avançait le rapport. De plus, les scientifiques appréhendent que le dessalement soit non seulement un processus dispendieux mais aussi extrêmement consommateur d'énergie, rejetant des tonnes de gaz à effets de serre dans l'atmosphère. Le prix de revient du m3 en eau dessalée est élevé en raison de l'usage plus important de réactifs chimiques et les scientifiques s'inquiètent de la mauvaise qualité de l'eau captée par mauvais temps. Les autorités gouvernementales et le directeur général de Hamma Water Dessalination, Georges El Haddad, assurent toutefois les usagers que la qualité de l'eau traitée peut être classifiée comme eau minérale et qu'il n'y aurait aucun risque pour la santé des usagers. « De plus, avec l'arrivée de cette station, on aura sécurisé définitivement la capitale et cette alimentation en eau potable sera entièrement assurée grâce au raccordement des réseaux algérois avec le barrage de Taksebt qui dottera quotidiennement la capitale de 160 000 m3 supplémentaires » a précisé le ministre des ressources en eau, Abdelmalek Sellal, lors de la Conférence de presse qui suivit l'inauguration de la station El Hamma. Il a ajouté qu'il n'y aura aucun changement au niveau du prix de l'eau, puisque le produit transformé est subventionné par l'?tat à travers une garantie de la Sonatrach. C'est d'ailleurs cette dernière qui achètera l'eau de l'usine de dessalement d'El Hamma pour la revendre à l'ADE (Algérienne des Eaux), qui la cèdera à son tour au consommateur au même prix que l'eau conventionnelle. Toutefois, si l'unité d'El Hamma est supposée alimenter les quartiers de la capitale en eau potable, Alger et ses environs doivent toujours face à des coupures d'eau fréquentes.