Mémorandum d'entente entre l'INPPLC et l'Autorité émiratie de reddition des comptes    COP 32. Addis-Abeba, future capitale mondiale du climat en 2027    Sahara : pour Omar Hilale, «le Conseil de sécurité a définitivement écarté toute option d'indépendance ou de référendum, considérant que ces formules appartiennent désormais à une époque révolue»    WASOP : Le Cap-Vert s'engage pour un océan plus durable    Ouganda – Rwanda. Vers une intégration régionale accrue    Chômage. Un fléau persistant en Afrique du Sud    Emploi des femmes : Talents inexploités, croissance non réalisée [INTEGRAL]    Ports, routes et barrages : Baraka trace la nouvelle carte infrastructurelle du Royaume    Bourse de Casablanca : ouverture en bonne mine    Syrie-Israël : Damas engagé dans des négociations directes avec Tel-Aviv    Barrages CDM26 Asie : Ce jeudi, Irak vs Emirats Arabes Unis : Horaire. Chaînes ?    Prépa. CDM(f) futsal : Les Lionnes s'inclinent de nouveau face aux Espagnoles    JSI Riyad 25: La nageuse El Barodi offre la première médiale d'or au Maroc    Espagne : le Real Madrid rebaptise le Santiago Bernabéu    Amicaux : Les Lions de l'Atlas achèvent leur préparation avant de rejoindre Tanger    Le Maroc partage son savoir-faire avec le Nigeria pour prévenir l'extrémisme violent en milieu carcéral    Découverte au Maroc d'un scorpion marin géant vieux de 470 millions d'années    Mariage des mineurs : moins de demandes, mais la pratique perdure (Rapport)    La MINURSO sous contrainte financière : Restructuration, coupes et départs de responsables    Laftit: La loi organique relative à la Chambre des représentants vise à moraliser la vie politique et électorale    Le temps qu'il fera ce jeudi 13 novembre 2025    Les températures attendues ce jeudi 13 novembre 2025    Les découvertes archéologiques au Maroc ouvrent de nouvelles perspectives pour comprendre l'Histoire humaine    Affaire Samuel Paty : Au Maroc, la famille d'Abdelhakim Sefrioui se mobilise    France : Poursuivie pour injure raciste, Marine Le Pen joue la politique de la chaise vide    Moroccan Karateka Chaimae El Haiti wins silver at Islamic Solidarity Games    Non convoqué, Omar El Hilali fait preuve de classe et de maturité    Marine Le Pen absent from trial over public insult as plaintiff Yasmine Ouirhane challenges claims    Amir Richardson fait ses adieux à son père, l'ancienne star de la NBA Michael Ray Richardson    Cinéma : Maryam Touzani reçoit le prix du public du meilleur long-métrage à Denver    Rachid Benzine : «Lire, c'est résister à la déshumanisation en Palestine»    Nigeria : les Super Eagles en grève avant leur barrage décisif face au Gabon    Le jour où New York a voté pour elle-même    Macron et Abbas conviennent de mettre en place un comité conjoint pour « la consolidation de l'Etat de Palestine »    Transport aérien : Royal Air Maroc renforce la connectivité nationale    Hammouchi décoré à Madrid de la Grand-Croix de l'Ordre du Mérite de la Garde civile espagnole    L'Allemagne admet la plainte du Maroc contre plusieurs journaux pour diffamation dans l'affaire Pegasus    Chambre des Représentants : adoption en commission de la 1ère partie du PLF 2026    Alerte Météo: Rafales de vent et averses orageuses de mercredi à jeudi    Espagne : Démantèlement en collaboration avec le Maroc d'un réseau de trafic de haschich à l'aide de drones    Le déficit budgétaire du Maroc atteint 55,5 milliards de dirhams en octobre    L'Allemagne fait plier Alger : une "grâce humanitaire" qui cache une capitulation diplomatique    Le partenariat entre BlueBird Aero Systems et Rabat progresse sur le plan technique, mais le lancement de l'usine marocaine reste un mystère    La Fondation Trois Cultures reconnue par l'UNESCO comme "Centre de Catégorie 2"    La FNM, la FRMJE et la Ligue régionale Rabat-Salé-Kénitra des jeux électroniques s'allient pour promouvoir la culture numérique    Du nord de l'Europe jusqu'au Maroc : Une carte numérique déterre 300.000 km de routes romaines    Artisanat: Lancement de la 3è édition du programme «Les trésors des arts traditionnels marocains»    Grammy Awards 2026 : Davido, Burna Boy et Ayra Starr en lice    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Interview – La Transe Poétique by Aziz Sahmaoui
Publié dans L'observateur du Maroc le 21 - 02 - 2019

Lorsqu'un Gnaoui blanc entremêle poétiquement les styles pour rendre hommage à la littérature africaine orale, cela donne Poetic Trance. Une œuvre universaliste résolument groovy qui fleure bon l'Afrique mélodieuse et poétique et dessine le pont jeté vers l'Occident.
Produit par Martin Meissonnier, le 3e album de Aziz Sahmaoui et de son University of Gnaoua, interprété sur fond de grondement du gembri, est un mix parfait entre musiques gnawa, musiques d'Afrique de l'Ouest, rock, jazz et blues. Une belle invitation à la transe euphorisante qui exhibe le génie rythmique des Afriques en dessus et en dessous du Sahara.
L'Observateur du Maroc et d'Afrique : Votre 3e album Poetic Transe est un mix divin de Poésie et de Transe?
AzIz SAhMAOUI : Transe, parce qu'il y a cette transe dans notre musique, dans nos codes africains, dans nos pays : le Maroc,leSénégal,l'Algérie,leMali,ce noyau qui fait l'University of Gnaoua. Je lui apporte une richesse rythmique, musicale, linguistique…chaque musicien s'exprime dans son langage, on chante en arabe, en tamazight, en Wolof, en Bambara,… L'album est en même temps poétique parce qu'on a veillé à soigner l'image, le texte, les métaphores. On retrouve cette poésie dans les cordes, l'harmonie : dans notre culture, on connait tous cette « Jedba », cette transe qui nous fait danser et oublier notre entourage et qui aide à exprimer sa souffrance et sa douleur.
Cette transe « hal », est une expression de mal être dans une société qui nous rend parfois malade ! On la trouve aussi dans ces arrangements calmes et tranquilles de certains morceaux comme : « la peur » ou d'autres balades comme « Absence ». On a souvent tendance à associer la transeàJedbaetàlaviolence,alors
qu'il y a d'autres façons d'être en transe, qu'on retrouve par exemple dans nos chœurs d'Ahouach ou Houwara. Cette forme de transe calme apaise et me fait énormément de bien, du coup, j'essaie de la partager avec les autres. Elle se trouve aussi dans le fait d'associer plusieurs sons et de voler dans cet espace harmonieux, embrasser d'autres cieux et découvrir un monde parallèle au nôtre. La transe surprend, elle ne prévient jamais. Elle introduit à l'invisible, à l'au-delà. Elle est en quelque sorte liée au groove qui libère l'âme tourmentée.
Ça a un effet thérapeutique tout comme la musique gnaoua?
Oui, c'est la magie de la musique qui dure. On a toujours besoin de ce souffle divin qui s'installe dans notre oreille et nous fait voyager, qui apaise nos cœurs.
C'est un album plus mature avec un son plus abouti ?
Les albums précédents ont plu alors on a continué ! On reflète un peu ce qui nous entoure, et en tant qu'artistes, notre rôle est de suivre ce feeling et rester vrais, clairs et traduire tout cela sous forme de poésie, d'images avec des métaphores qui touchent l'autre. Parce que finalement,
on vit la même chose, et bien qu'on soit différents, nous sommes UN, nous consommons les mêmes produits, parlons le même langage, …nous sommes les mêmes !
La musique fédère toutes les cultures, le langage des émotions est universel finalement?
Oui, c'est vrai, un chanteur flamenco peut nous toucher même si on ne comprend pascequ'ildit!Unson,unjeuouune danse peut nous bouleverser…ça apaise la difficulté, adoucit l'amertume de la vie et rapproche les gens, c'est cela la magie du tambour, de la musique ! Dans le morceau « La Peur », je parle d'un mal contemporain, cette peur de l'autre nous empêche d'aspirer à des lendemains meilleurs. C'est pour cela qu'on veut rassembler les gens autour des sons des tambours et partager avec eux cette joie de vivre qui nous anime tous.
« Janna Ifrikia, Janna Maghribiya» est un hymne au Maroc et à l'Afrique. Croyez-vous vraiment au pouvoir du métissage?
Oui, tout à fait. Ce métissage est peut-être la solution pour une paix future, c'est notre africanité à tous. Mon album appelle au pardon et à la réconciliation. Il faut partager, donner pour élargir notre cercle de pouvoir. Je suis ravi que ces échanges culturels me permettent d'atteindre
un équilibre musical et humain entre l'Afrique et l'Europe.
C'est un album groovy très métissé qui mélange musiques gnawa, musiques d'Afrique de l'Ouest, rock, jazz et blues. Est-ce que c'était voulu?
Ce mélange est naturel. On crée des mélodies, des arrangements et on joue tout simplement ! On fait des concerts tout au long de l'année, un peu partout, on aime la scène, c'est une passion en nous
et ce groove est important, parce que sans groove, il n'y a rien. Dans notre culture, tout le monde est groover !
Que représente le gembri pour vous?
C'est une forme de tambour mélodique avec une technique extraordinaire, un son qui nous repose et qui nous fait traverser l'invisible. Sa « Tsserssira » nous emporte et adoucit l'amertume et la dureté de notre vie. C'est un instrument magique qui a une histoire doublement séculaire qui est amené à se développer. D'ailleurs, l'art
des Gnaouas est une culture qui s'ouvre sur le monde, actuellement, beaucoup
de musiciens étrangers s'intéressent àTagnaouite, ils la prennent, la développent ou la mélangent à d'autre styles et le rendu est juste incroyable !
C'est aussi l'ancêtre de la bassecomme l'a si bien résumé Marcus Miller. Quel souvenir gardez-vous de votre collaboration avec lui?
Marcus Miller m'avait invité à jouer avec lui à l'Olympia en France et lorsqu'il m'a demandé de jouer au gembri, il a dit aux autres : « regardez, ce n'est le gembri qui n'est pas bien, c'est plutôt moi qui joue mal » ! J'ai aimé cette modestie, il venait souvent nous voir aux concerts et j'étais très honoré de vivre cette expérience avec lui. Cet esprit de partage entre musiciens est juste incroyable!
Vous êtes un peu le Gnaoui blanc qui entremêle les musiques ?
Je suis blanc mais mon sang est noir !
Je pense qu'il y a un noir en nous tous, moi, j'ai grandi à Targa, à Marrakech, j'ai grandi dans cette culture africaine, parfois, on a tendance à oublier qu'on est africains. Nous sommes des êtres humains, ni homme ni femme !
Vous aviez toujours su que vous alliez faire carrière dans la musique?
Non, pas du tout ! En fait, depuis tout petit, j'aimais la musique et le rythme mais ça m'a attrapé lorsque j'ai entendu
le son du tambour pour la 1ère fois. J'ai eu la chance d'assister à des concerts mythiques comme ceux de Nass El Ghiwane, du temps où ils se produisaient à Ksar Badii, j'allais dans les loges discuter avec les musiciens, c'était magique,
une vraie bénédiction pour moi. Par la suite, je voulais savoir comment faire parler, cet instrument (Gembri, Banjo, Ribab, ou n'goni) ? Alors, j'ai acheté mes instruments, j'ai cherché mes partitions, je voulais comprendre cette magie, le son, la note, une gamme mineure, majeure, je voulais avoir un langage musical pour communiquer avec l'autre. D'ailleurs, c'est mon éducation musicale qui m'a emmené à jouer dans les plus hautes sphères du jazz dans le monde.
Le jazz se marie bien avec les rythmes gnaouis?
Oui, quand on a cette conscience de la profondeur de l'art et du jeu de l'autre. Un musicien étranger doit être capable de comprendre Tagnaouite, ses mélodies, ses rythmes, ses phrasés très précis. C'est plus facile pour nous parce que cette musique fait partie de notre culture, mais quand tu invites un jazzman européen ou un Bluesman américain, ils sont sensés comprendre tout cela pour trouver cet équilibre, pour séduire et rendre service à la musique. Il faut laisser l'autre s'exprimer, il faut qu'il y ait un langage, une discussion, des moments de silence, des moments chargés, et c'est cela un musicien, quelqu'un qui sait vivre un espace, qui le maîtrise…
Vous excellez également dans l'art de l'improvisation?
J'adore cela, je fais partie de cette école d'improvisation, de Joe Zawinul Syndicate et pas seulement. Ça existe aussi dans notre culture, dans les échanges de poésie de Ahouach par exemple, dans l'art de griots ! Improviser c'est créer et produire quelque chose.
Racontez-nous un peu votre rencontre avec le pianiste et claviériste de jazz autrichien Joezawinul, l'un des pionniers du métissage cosmopolite.
Oui, tous les musiciens du monde voulaient jouer avec Joe, c'était une star, une référence au niveau international,
et travailler avec lui a été une école formidable, au niveau de l'écoute, de la vitesse d'exécution et de l'endurance. Lorsqu'il m'a invité à jouer avec lui, j'ai enregistré un double album du 1er coup, par la suite, il m'a proposé de rejoindre son groupe. Je crois qu'il a aimé mon expression, mes interventions, mon énergie car ce n'est pas facile de jouer dans des formations de cette envergure avec des virtuoses africains qui jouent à une vitesse incroyable. Le tempo est très rapide et si tu n'as cette énergie, ce pacte avec la scène, tu ne tiendras pas !
Est-ce que c'est facile pour un groupe de durer dans le temps?
Non mais le chemin est encore long. On essaie de raconter notre histoire, de telle façon à être là. On prend les choses comme elles viennent, on vit l'instant présent et si ça prend 5 ans pour faire un disque, ce n'est grave. Entre temps, on joue, on adore la scène. D'ailleurs, j'ai toujours le trac avant de monter sur scène ! ✱


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.