Nous sommes lundi. Il est 9h à Casablanca. La métropole reprend du service. La circulation est infernale au niveau du nouveau centre d'affaires de Sidi Maârouf. Des jeunes cadre branchés et dynamiques se dirigent vers leurs lieux de travail. Le pas pressé, certains se dirigent vers Casanearshore, premier pôle nearshore du Maroc et le plus grand d'Afrique du Nord. Ce parc d'activités tertiaires est dédié aux sociétés spécialisées dans le développement de logiciels, la gestion d'infrastructures, le back office bancaire et de l'assurance, et la gestion de la relation client. Ces entreprises doivent opérer dans des activités liées au nearshoring et réalisant au moins 70% de leur chiffre d'affaires à l'export, à partir de la 3e année qui suit le début de leur activité ou de leur installation. Un bureau de 53 hectares Inauguré en 2008, Casanearshore est une ville dans la ville. Plus de 300.000 m2 d'espaces de travail et de services à la pointe de la technologie, composés de nombreux immeubles («shore» dans la terminologie du site) flambants neufs, six enseignes de restauration, un restaurant interentreprises de 650 places, une brasserie, un centre de fitness, une agence de voyages et plusieurs agences bancaires, prochainement un hôtel, le tout sur une superficie de 53 hectares dont une bonne partie dédiée aux espaces verts. Ce «package» veut rendre la vie offshore agréable. Situé sur le boulevard Al Qods, cet ensemble de bâtisses futuristes contraste avec le décor autour. Au milieu d'une zone résidentielle du quartier Sidi Maârouf, ce projet phare de l'offre offshoring du Maroc se distingue fortement de l'urbanisme environnant. Faute de foncier et pour rester proche du centre-ville et du nouveau centre d'affaires de Casablanca, ainsi que de l'aéroport Mohammed V, le choix a été fait de s'installer sur ce site. Ils sont 16.000 à partager «l'expérience Casanearshore». Un lieu de travail, mais surtout un lieu de vie, pour une population qui a une moyenne d'âge de 28 ans. «Casanearshore expérience» Ayman, jeune homme de 24 ans, travaille dans le parc depuis quelques jours. Cigarette au bec et café noir à la main, il nous livre lors de sa pause ses premières impressions. Il se dit «content» de pouvoir travailler dans ce cadre qu'il qualifie «d'idyllique». Il vient d'être recruté par une multinationale de la place, spécialisée dans le Business Process Outsourcing (BPO) ou externalisation des processus métiers. Le deuxième type d'opérateurs qui exerce est spécialisé en Information Technology Outsourcing (ITO) ou externalisation des processus liés aux technologies de l'information et compte trois filières : la gestion d'infrastructure, le développement de logiciels, la maintenance applicative. Ces filières demandent des ressources humaines qualifiées, formées dans les écoles d'ingénieurs. Sanaâ est ingénieur d'Etat, elle travaille à Casanearshore depuis six mois. «Certes le cadre est agréable, mais à part cela je ne trouve pas de grandes différentes entre travailler ici ou ailleurs. Le salaire est le même, c'est loin, et il y a un réel problème de transport», se plaint-elle. Omar, son collègue, ne partage son point de vue. «J'ai travaillé dans plusieurs entreprises à Casa et ailleurs au Maroc, et le cadre de ce parc est inégalable. Le problème de transport ne se pose pas pour moi, vu que je suis motorisé», explique ce cadre trentenaire. Même réaction d'Amina, future maman, qui trouve son compte grâce à la création d'une crèche au milieu du parc. «C'est un plus et ça motive mon choix de rester à mon emploi», nous dit-elle. Fadel, jeune homme de 28 ans, ingénieur, trouve son compte à Casanearshore. Entre deux coups d'œil à son Iphone, il dresse le bilan de son expérience : «hormis une clause qui nous interdit presque de nous faire embaucher par un concurrent de notre dernier employeur sur le parc, les conditions de travail sont excellentes». Samir, coéquipier de Fadel, regrette de «ne pas avoir l'opportunité de développer les compétences marocaines. Notre travail est réduit à de la sous-traitance de mini-projets dans le cadre du développement de logiciels qui se font à l'international. Au final, nous ne maîtriserons jamais tout le processus d'innovation pour pouvoir développer ces types de technologies». Le Maroc des «shore» Pour Medz Sourcing (filiale de CDG Développement), promoteur et gestionnaire de Casanearshore, le projet est «une réussite». Le top management de l'entreprise argumente son bilan par «la forte demande qui ne s'est jamais démentie sur le site». Ainsi, des multinationales ont fait confiance à «l'offre Maroc» et permettent aujourd'hui d'avoir un espace de travail occupé de 180.000 m2, le développement du site prendra fin en 2013. Devant le succès de site de Casanearshore, l'Etat continue à mener sa stratégie offshoring prévue dans le plan Emergence depuis 2006. A noter que l'offshoring vise d'ici 2015 la création de 90.000 emplois et contribuer à hauteur de 15 milliards de DH au PIB et autant dans la balance commerciale. D'autres nouveaux sites, dans quatre villes marocaines, sont en train de voir le jour. Il s'agit de Rabat, où le Technopolis a été déjà inauguré fin 2008. Les shore de Fès, Marrakech, Agadir et Oujda sont en cours de conception et de commercialisation. Ces sites comptent 598.300 m2 et demandent un investissement de 6 milliards de DH. Cette stratégie régionale permettra de faire baisser la pression sur le bassin RH de l'axe Rabat-Casa. «La RH, c'est le nerf de la guerre des métiers offshoring. Vu la tension sur les bassins de Casa et Rabat, nous avons opté pour d'autres régions où les RH sont plus frais, plus dispo», explique Abderrafie Hanouf, DG de Medz Sourcing. Et d'ajouter : «notre ambition est de réitérer le succès de Casablanca sur d'autres régions du Maroc, surtout dans un contexte de régionalisation avancée. Ainsi, permettre à ces villes d'avoir des niches de croissance, l'offshoring en fait partie». Casanearshore II est-il envisageable ? «Ce n'est pas impossible, c'est même souhaitable», annonce le DG de Medz Sourcing.