La plupart des chefs d'entreprise ne préparent pas ou préparent mal leur succession. C'est Ahmed Réda Chami qui l'affirme. Le ministre de l'Industrie, du commerce et des nouvelles technologies estime que cette situation est due au manque d'informations sur le sujet, notamment sur les différentes manières de procéder à une transmission. Il ajoute que des raisons psychologiques profondes incitent certains patrons à retarder la transmission de leur entreprise au-delà de l'échéance normale. Une étude réalisée par l'Agence nationale pour la promotion de la petite et moyenne entreprise (ANPME) confirme le constat du ministre. Elle révèle que 61% des entreprises familiales n'ont jamais pensé à la transmission d'entreprise. Dans les meilleurs des cas, la plupart des dirigeants (les 2/3) préfèrent passer la main à leurs proches, selon le baromètre réalisé par la même agence, le cabinet BDO et C&O Marketing. Du reste, dans 44% des cas, on se fie aussi à des connaissances. Ces éléments réunis expliquent l'inexistence d'un marché de la transmission des PME au Maroc. Pourtant, d'après Zakaria Fahim, expert associé du cabinet BDO, les opportunités existent dans ce domaine du fait de l'arrivée de la première génération d'entrepreneurs à l'âge de devoir passer le relais. Quand on sait que le tissu économique est composé surtout de PME, on peut bien imaginer l'étendue de ce marché si peu exploité au Maroc. Culture de la transmission D'après Latifa Chihabi, directeur de l'ANPME, la transmission n'est pas un simple fait de rachat, mais il s'agit de tout un processus. La même responsable rappelle que dans ce cadre, le repreneur récupère l'ensemble du bilan et également tout l'existant dans l'entreprise. C'est-à-dire, les locaux, les salariés et les machines. Afin de pouvoir fixer le prix d'une PME devant être transmisse, cette entreprise doit être évaluée selon différents aspects : son passé, son présent et même ses possibilités futures, conseille Chihabi. Des aspects souvent occultés par les cédants qui font souvent preuve d'un optimisme parfois démesuré. Voilà pourquoi certaines transmissions ont été sanctionnées par un cuisant échec. Comment réussir alors ce processus qui est difficile par nature? Parmi les recommandations préconisées par l'ANPME, il y a la création de banques de données informatisées facilitant les recherches et le partage d'informations, l'institution d'un taux de financement assimilé au taux d'un crédit d'investissement et non pas à celui d'un prêt personnel, la mise en place d'un dispositif d'appui aux PME dans le domaine de la transmission, la reconduction au-delà de 2009 de l'exonération fiscale sur l'IS en cas d'introduction en bourse par session ou encore la mise en uvre d'un texte de loi régissant la transmission des entreprises qui fait défaut aujourd'hui. Concernant le domaine fiscal, S. Kadmiri déclare qu'en pénalisant les entreprises qui veulent transmettre leur patrimoine dans le cadre familial, le système juridico-fiscal actuel risque de porter atteinte à la croissance des PME et de favoriser la concentration et l'effilochage du tissu des entreprises. D'où sa conclusion : «le projet de loi de Finances 2010 n'est pas favorable à la transmission d'entreprise puisqu'il instaure un nouveau droit d'enregistrement de 3% sur la cession d'entreprise ainsi qu'une hausse de l'imposition sur la plus-value sur cession de parts sociales». Ce sont là des freins parmi tant d'autres à l'instauration de la culture de transmission des PME au Maroc.