C'est un évènement que personne ne tient à fêter, pas même les intéressés : les Croates deviennent membres de l'Union européenne, le 1° juillet. Les 27 deviennent 28. L'élargissement se fait sans enthousiasme, en douce. Le 1° juillet, on se contentera à Zagreb d'illuminer les bâtiments en les bariolant d'étoiles. Au printemps, les trois quart des électeurs croates ne s'étaient même pas déplacés pour élire leurs représentants au Parlement européen. Le parti nationaliste HDZ arrivé en tête cultive un discours volontiers eurosceptique. Explication : l'Europe a bonne réputation dans les sondages mais plus personne ne compte sur sa croissance atone, son économie déprimée pour relever le défi du chômage. L'adhésion de la Croatie semble ainsi clore un cycle d'élargissement sans frein, lancé il y a dix ans et qui aura épuisé le projet européen. Du coup, les pays qui négocient encore risquent d'attendre longtemps à la porte: avec la Turquie, les palabres sont en panne et la répression de la place Taksim relance les questions sur les droits de l'homme. Le Monténégro restera au point mort, tant qu'il ne se résoudra pas à réformer justice et police pour lutter contre les mafias. La Macédoine et la Serbie ont obtenu un statut de pays candidats mais aucun délai n'étant fixé, c'est un lot de consolation. L'adhésion du reste des Balkans et des anciennes républiques soviétiques d'Europe orientale est renvoyée au long terme. Autrement dit, au troisième millénaire. La Croatie est la nouvelle frontière de l'Europe et le restera longtemps. C'était déjà le cas au temps des Romains, le palais du dernier empereur Diocletien dans le centre de Split en témoigne. Est-ce que le rêve européen finit en Croatie comme l'empire romain ?