L'Union européenne va imposer des restrictions de déplacement à 19 responsables voiriens dont le président sortant Laurent Gbagbo, qui refuse de quitter le pouvoir après un scrutin remporté selon la communauté internationale par son rival Alassane Ouattara. Ce dernier a pour sa part exhorté lundi les Nations unies à renforcer le mandat de la force de maintien de la paix en Côte d'Ivoire (Onuci) pour mettre un terme à des affrontements dans le pays qui ont fait 50 morts depuis le vote du 28 novembre. "Nous nous attendons à ce que la mesure (de restriction de déplacement) soit adoptée mercredi et entre en vigueur jeudi, avec effet immédiat", a dit une porte-parole de la Commission européenne à Bruxelles, précisant qu'un gel des avoirs était en discussion. Les restrictions de déplacement devraient concerner des responsables de la sécurité, des membres du parti au pouvoir, des responsables de l'armée ainsi que Laurent Gbagbo lui-même et sa femme Simone. "Je ne pense pas que ça fera avancer la situation", a réagi Pascal Affi N'Guessan, président du Front populaire ivoirien (FPI), le parti de Gbagbo. "Cela montre juste que ceux qui sont à l'origine de ces sanctions n'ont pas une grande marge de manoeuvre". REUNION DU CONSEIL DE SECURITE A l'issue du second tour de la présidentielle, il y a trois semaines, le Conseil constitutionnel acquis à Laurent Gbagbo l'a désigné comme vainqueur tandis que la Commission électorale indépendante désignait l'ex-Premier ministre Alassane Ouattara. La victoire de ce dernier a été reconnue par la majeure partie de la communauté internationale dont l'Onu, l'UE, les Etats-Unis et l'Union africaine. Les menaces de sanctions formulées par l'Union européenne et par les Etats-Unis sont jusque-là demeurées sans effet. Gbagbo a répondu en demandant le départ des quelque 10.000 casques bleus présents dans le cadre de l'Onuci et des 950 soldats français du dispositif Licorne, une demande rejetée par l'Onu et Paris. La question d'un renouvellement du mandat des casques bleus, qui court jusqu'au 31 décembre, doit être examinée ce lundi par le Conseil de sécurité des Nations unies. "Je n'ai aucun doute sur son renouvellement", a déclaré Patrick Achi, porte-parole d'Ouattara, retranché dans l'hôtel du Golf à Abidjan. "La question est de savoir s'il vont le transformer en un mandat d'intervention pour soutenir le président, ce que nous demandons", a-t-il ajouté. Le chef de la mission de l'Onu en Côte d'Ivoire, Y. J. Choi, a refusé de faire des commentaires sur ce sujet. Il a accusé le camp de Gbagbo de mener une campagne médiatique incitant à la violence contre le personnel de l'Onu, faisant état "de jeunes hommes armés" intimidant certains employés à leur domicile. "Cependant, toutes ces actions n'empêcheront pas l'Onuci de mener à bien sa mission. Souvenons-nous de l'une des maximes de Winston Churchill: 'Si tu traverses l'enfer, ne t'arrêtes pas'", a-t-il déclaré. LA REPUBLIQUE DU GOLF Selon Navi Pillay, Haut Commissaire des Nations unies pour les droits de l'homme, des atteintes massives aux droits de l'homme ont été commises en Côte d'Ivoire où, selon elle, une cinquantaine de personnes ont été tuées et plus de 200 autres blessées au cours des trois derniers jours. Face à la pression de la communauté internationale, les partisans de Laurent Gbagbo ne désarment pas et se disent prêts à livrer un combat à mort pour le maintenir à la tête de l'Etat. "Il n'y a qu'une seule bataille: assurer notre dignité et garantir la souveraineté de notre pays. C'est à nous qu'il appartient de choisir notre président", a déclaré Charles Blé Goudé, leader des Jeunes Patriotes. Dans une interview au quotidien français Libération, il dément avoir l'intention d'attaquer l'hôtel du Golf où sont retranchés Ouattara et son Premier ministre Guillaume Soro. "Je n'ai pas pour objectif d'aller prendre l'hôtel du Golf. Messieurs Ouattara et Soro ont accepté d'aller se mettre en prison de manière volontaire dans la République hôtelière du Golf. C'est la plus petite République du monde. Ça n'engage qu'eux", dit-il. Personnage charismatique, Charles Blé Goudé avait été un acteur essentiel dans la mobilisation des Jeunes Patriotes en 2002. "Cette bataille, nous l'avons entamée en 2002. Nous sommes prêts à mourir pour elle", a-t-il lancé lors d'un rassemblement de son mouvement. Financés par la présidence, les Jeunes Patriotes s'étaient heurtés aux militaires français de l'opération Licorne en 2004, ce qui avait abouti à l'évacuation de milliers de ressortissants français. A Paris, la ministre des Affaires étrangères, Michèle Alliot-Marie, a assuré dimanche que les soldats français étaient "en capacité d'évacuer les 15.000 ressortissants si nécessaire". Charles Blé Goudé a pour sa part affirmé à Libération que les "Ivoiriens n'avaient aucune intention de s'attaquer" aux Français présents dans le pays. (Reuters)