Vous avez appris votre métier auprès de Fernando Tavora et Alvaro Siza. Qu'est-ce que ces deux grands architectes vous ont apporté ? Tavora était mon professeur. La chose la plus importante que j'ai apprise de lui c'est le rapport entre l'architecture et la vie. Ensuite, il nous a enseigné comment il faut passer par l'histoire pour trouver des solutions. C'était un aristocrate très cultivé, passionné de peinture, de poésie. Il aimait tout ce qui était beau. Ensuite j'ai travaillé avec Siza. Lui, c'est une locomotive. Quand il y a un problème, il travaille jour et nuit pour trouver les moyens de le résoudre. Je suis plus intéressé par le personnage que par son architecture. Je ne peux pas faire de la copie de son travail. Ce qui m'intéresse c'est de voir comment il trouve des solutions. Il a un savoir-faire. Il m'a appris à trouver une stratégie. Comment définissez-vous votre style ? Pluriel. Il n'y a pas de fil conducteur dans vos projets ? Au début j'étais plus près du mouvement moderne et d'architectes comme Mies van der Rohe. J'ai commencé à travailler après la révolution, quand il fallait redessiner le pays, construire des écoles, des hôpitaux. On avait besoin d'un instrument comme le mouvement moderne. C'était une grammaire pragmatique pour faire des choses nouvelles dans un pays en transition. Et puis les choses ont changé, la crise est arrivée. L'architecture doit être aujourd'hui plus simple, plus économique. Quels sont vos maîtres en architecture ? Mies van der Rohe, le mexicain Luis Barragau et bien sûr Alvaro Siza. Quel est le projet dont vous êtes le plus fier ? C'est le stade de Braga qui est certainement le projet le plus complexe que j'ai eu à concevoir. J'ai coupé la montagne et travaillé à très grande échelle. C'est le projet le plus fort pour moi. Je fais de l'architecture pour résoudre des problèmes. Et là j'ai été servi. Quel est votre rapport à la nature ? La nature, c'est quelque chose que je dois contrôler. Dieu a bâti le monde et les architectes doivent poursuivre le travail en construisant des ponts pour traverser les fleuves, des toits pour protéger du soleil. L'architecture a besoin de la nature. C'est un peu comme le papier : il faut ajouter quelque chose au papier, pour que cela ait un sens et ce quelque chose c'est le texte. L'architecture donne un sens à la nature. J'aime la nature manipulée, cette tension entre nature et objet fabriqué. Sur quoi travaillez-vous en ce moment ? Un laboratoire en Suisse pour Novartis, un autre en Belgique, des tours à Barcelone. Vous ne construisez plus de maisons individuelles ? Si et j'aime beaucoup ça. C'est comme un exercice. Un laboratoire ou l'on peut faire des expériences à petite échelle. On perd de l'argent quand on fait une maison mais c'est là qu'on fait l'histoire de l'architecture. Dans l'absolu et si vous n'aviez pas de contraintes, qu'aimeriez vous construire ? C'est horrible de ne pas avoir de contraintes. Sans contraintes, il n'y pas de résolution de problème et les créations sont très artificielles. Pour en savoir plus : Souto De Moura, de Giovanni Leoni et Antonio Esposito chez Electa, 2003. Les pavillons en duoAlvaro Siza et Eduardo Souto de Moura ont travaillé ensemble Alvaro Siza et Eduardo Souto de Moura ont travaillé ensemble sur le pavillon du Portugal de l'exposition universelle de 1998 qui a eu lieu à Lisbonne. L'entrée de l'édifice se fait par une large place couverte par un imposant voile de béton précontraint, qui, se basant sur l'idée d'une feuille de papier posée entre deux briques, ouvre un espace urbain pouvant héberger les divers événements qu'un espace de cette échelle peut contenir. Ils ont réitéré l'expérience en 2000 pour l'exposition d'Hanovre en réalisant un pavillon conçu à partir de matières naturelles : les carreaux de faïence jaunes et bleus que l'on appelle « Azulejos » et le liège, matériau écologique que l'on récupère sur les chênes lièges très présents au Portugal. Ce pavillon se trouve aujourd'hui à Coimbra, où il sert d'auditorium et de centre de congrès et d'exposition. Enfin, ils ont imaginé en 2005 le Pavillon de la Serpentine Gallery qui expose chaque été dans Kensington Gardens à Londres une oeuvre architecturale contemporaine. Le pavillon est formé d'une grille rectangulaire tordue pour créer une forme incurvée et dynamique. Elle est recouverte de carrés translucides en polycarbonate qui laissent passer la lumière du jour. Un projet déterminant, le stade municipal de Braga Ce stade construit en 2003 pour le championnat d'Europe de 2004 ne fait pratiquement qu'un avec le paysage qui l'entoure et se dresse à l'emplacement d'une ancienne carrière de granit, à flanc de montagne.Trois galeries circulaires coupent les gradins et permettent de les traverser facilement. Vu l'absence de tribunes sur les côtés courts, le stade est plus ouvert vers l'extérieur que les structures du même genre et offre ainsi une vue agréable sur le paysage environnant. Moura de Souto a remporté le 47e prix FAD de Arquitectura 2005 avec ce projet novateur tant au niveau de la forme que des choix liés à la construction.