A lvaro Siza est l'un des plus grands architectes contemporains et pourtant, au départ, il ne voulait pas être architecte, préférant la peinture et la sculpture. Son père, qu'il qualifie d'homme remarquable et conciliant, ne voulant pas le contrarier, lui propose alors d'intégrer l'Ecole des Beaux-Arts en se disant qu'une carrière d'architecte serait plus stable que la vie de bohème d'un artiste. Au cours de ses deux premières années de tronc commun, il commence à s'intéresser à la discipline jusqu'à devenir l'un des plus grands architectes au monde. A l'époque, le régime politique imposait ses idéaux nationalistes à toutes les disciplines. Une autre caractéristique de l'époque était la prépondérance des ingénieurs sur les architectes. Pourtant dès les années 50, un vent de changement souffle sur l'architecture portugaise. Fraîchement diplômé en 1955, Alvaro Siza va tenter de trouver le chemin d'un certain modernisme en puisant aux sources locales, aux techniques artisanales et en revenant à la tradition des maisons populaires blanches et dépouillées. La révolution des Oeillets en 1976 va libérer les créateurs et permettre à Siza de s'exprimer, en faisant la synthèse de ses velléités artistiques et des contraintes techniques de l'architecture. Avec le temps, la fonction d'architecte évolue pour devenir celle de la coordination de toutes les équipes, techniques, sociologiques et urbanistiques qui président à l'édification des bâtiments, quelle que soit leur fonction. Pour Siza, encore aujourd'hui, c'est là une fonction primordiale dont il regrette le recul face à l'essor des spécialisations de plus en plus pointues qui font cohabiter sur un projet des disciplines complémentaires mais sans qu'elles dialoguent entre elles de manière fine. Pour lui, notre époque vit dans l'obsession de la spécialisation qui enferme chacun dans ses convictions, y compris les architectes qui devraient refuser cette spécialisation à outrance pour pouvoir garder ce rôle de coordinateur en mettant en avant la beauté et la fonctionnalité de tout édifice. Car penser le bâtiment dans son intégralité permet de respecter la dimension esthétique et pratique. C'est donc un chef d'orchestre qui doit faire travailler les différents intervenants de concert et dès les prémices du projet. Connu pour son style dépouillé, sobre et poétique, Siza reconnaît être sensible à tout ce qui l'entoure, tout ce qu'il a vu et tout ce qui l'a marqué un moment ou un autre. Ainsi, une chose vue quelque part, va faire son cheminement pour se mélanger avec d'autres et aboutir à une nouvelle forme, une idée nouvelle. Nous sommes tous poreux à toutes les influences de ce qui nous entoure, que nous assimilons de manière inconsciente pour les faire renaître sous une forme personnelle. La compression de l'espace avec les moyens de transport et la multiplication des voyages met à la portée de chacun un patrimoine immense où l'on va puiser des choses selon sa sensibilité et son parcours. A bientôt 77 ans, Alvaro Siza continue de sillonner le monde de donner des conférences et de construire. Il n'est donc pas près de se livrer à un bilan de son oeuvre. Au contraire, il continue de travailler chaque jour et de saisir les opportunités qui se présentent sans calcul, juste pour le plaisir de continuer à faire des bâtiments qui trouvent leur place sur le plan fonctionnel et esthétique, au Portugal, ou ailleurs. Quant à l'échelle, pour lui, elle ne représente qu'un va-et-vient qui alimente et entretient son style car pour pouvoir faire un petit bâtiment, il faut savoir en faire un grand et vice-versa. Chacun ayant ses spécificités qui vont affiner la démarche globale de l'architecte ou de l'artiste. Ce mouvement permet aussi une respiration à l'architecte qui peut se ressourcer dans une dimension et s'abreuver dans une autre. Architecte et professeur, Alvaro Siza a formé plusieurs générations qui officient de par le monde. Un de ses disciples Souto de Moura, originaire comme lui de Porto est resté très proche. Même approche et bureaux dans le même immeuble, l'héritier spirituel de Siza l'a accompagné lors de son périple casablancais ainsi que plusieurs confrères venus parler de réhabilitation de patrimoine et de la dimension historique unique de la ville de Casablanca, pas toujours connue à sa juste mesure. Le minimalisme des maisons de Ponte Lima Ces deux maisons de vacances ont été conçues en 2001 pour deux amis sur deux parcelles mitoyennes très escarpées dans le Nord du Portugal. Construites en béton, en formes de parallélépipèdes, l'une est horizontale, l'autre inclinée. Souto de Moura a choisi un terrain posant problème et propose deux solutions qui s'intègrent parfaitement dans le paysage et révèlent du minimalisme architectural.