C'était il y a près de 20 ans. Pharmacienne de profession, Farida Sebti apprend à travers son mari, médecin chef wà la maternité de l'hôpital Ibn Tofail, qu'il y a des enfants abandonnés à la maternité. Farida Sebti : « Les enfants abandonnés, il y en a toujours autant. C'est la prise en charge qui a changé ». L'hôpital n'était pas habilité à accueillir ces bébés, se souvient Farida Sebti, et il n'y avait d'ailleurs pas de budget dans ce sens-là. Il y avait à l'époque un seul biberon pour onze bébés. » Farida Sebti contacte alors des amis, pharmaciens et pédiatres, afin d'approvisionner ces bébés. « Une fois qu'on voit ce que c'est, on ne peut plus faire marche arrière, on s'implique forcément, déclare-t-elle. On a pris ces enfants en charge, on a installé l'eau chaude et la climatisation. Mais il y avait de plus en plus de demandes. On a été amenés à faire travailler le personnel de l'hôpital alors que nous n'en avions pas le droit ». Le groupe d'amis s'agrandit et reçoit des dons extérieurs. « À l'origine on n'a pas pensé à faire une association, c'était surtout une action de cœur, affirme Farida Sebti. Il y avait des gens qui nous faisaient des dons, et par la suite on a été amenés à créer l'association. » L'idée de créer une association s'est imposé du fait d'un besoin d'indépendance et de légitimité : « Il fallait avoir un caractère légal pour pouvoir se protéger et être efficace. Il fallait également isoler ces bébés puisqu'ils étaient avec les bébés des mamans césarisées. » Ils contactent alors une association française, l'Association Enfance Espoir, qui accepte de les aider. Lorsque l'association est créée en 1995, ils reprennent le nom de cette association qui devient Association Enfance Espoir Maroc. Objectif : faire adopterles enfants L'Association Enfance Espoir Maroc œuvre pour assurer le minimum vital aux enfants abandonnés et démunis de la préfecture de Marrakech. L'association demande un terrain à l'état, au sein de l'hôpital et construit un bâtiment en 2000. Il s'agit de l'instance de l'espoir pour bébés abandonnés, avec une capacité de 30 lits. « Ce sont soit des enfants abandonnés à l'hôpital par leur mère à la naissance, soit des enfants jetés dans la rue. Et dans ce cas, nous les recevons avec un PV de police », indique Farida Sebti. L'objectif principal de l'association est de faire adopter les enfants. « Depuis qu'on est indépendants, on peut les faire adopter. » Et d'ajouter : « Plus tôt ils partent, mieux c'est. » Il y a quelques années, l'association a aménagé un étage pour les enfants de plus de 4 ans, « mais cet espace n'est plus utilisé puisque tous ces enfants ont été adoptés ». « Le plus dur, ce sont les enfants avec un handicap ». Pour ces enfants, l'association a collaboré avec des écoles de la ville afin de créer des classes intégrées pour qu'ils puissent également aller à l'école. « Nous lançons également des opérations cartable et des distributions de médicaments, en fonction des moyens. »Farida Sebti ne manque pas de rappeler qu'il s'agit d'un « travail de groupe » et qu'il « y a de nombreuses personnes, que ce soit des donnateurs ou les membres de l'association, sans qui tout cela n'aurait pas pu se faire. » La prévention avant tout Lorsqu'on demande à Farida Sebti si la situation s'est améliorée au Maroc depuis 1995, elle répond que ce qui a changé est la prise en charge. « Les enfants abandonnés, il y en a toujours autant. C'est la prise en charge qui a changé. Avant le taux de mortalité était très élevé et beaucoup de ces enfants finissaient dans la délinquance. » « Pour améliorer la situation c'est très difficile, mais il faudrait commencer par renforcer la prise de conscience des jeunes par rapport à la contraception », conclut-elle. * Tweet * *