Toute l'efflorescence de l'art traditionnel et contemporain se niche là, dans l'esprit créatif de l'Institut national des Beaux-Arts de Tétouan, née sous l'impulsion audacieuse du grand peintre espagnol, Mariano Bertuchi, qui décide de fonder, en 1945, une classe dédiée à l'art moderne et à l'art contemporain. C'est avec une attention particulière que Youssef Raihani se délie au sujet de la genèse de l'Institut national des Beaux-Arts de Tétouan, où il est directeur des écoles depuis 2007. « En 1957, Mariano Bertuchi fonde ensuite l'Ecole nationale des Beaux-Arts, la première à voir le jour au Maroc. Ses premiers lauréats sont de grands noms de la peinture comme Melehi, Chabaâ mais également Ouazzani, Bouabid, Drissi, Kahfai. En 1984, éclot la mue des premières classes de feu Bertuchi, en Institut national des Beaux-Arts de Tétouan (INBA) », précise-t-il, dans son bureau, qui fait office d'un espace artistique à ciel ouvert, tant les nombreuses et chatoyantes toiles et sculptures fleurissent les murs et le moindre recoin. Il poursuit en évoquant son parcours, et revient sur les traces de ses premières amours, le théâtre : « J'ai étudié la mise en scène à Séville et j'ai préparé mon doctorat sous le thème Art performance et critique d'art, à Fès ». En 2006, Youssef Raihani, répond à un concours lancé par le ministère de la Culture, qui le mène à enseigner l'histoire de l'art et la philosophie de l'art à l'INBA de Tétouan. Son goût de la transmission le conduit finalement au poste de directeur des écoles de cet établissement. Sur les planches Aujourd'hui, cette plongée en totale immersion avec l'expression artistique actuelle, incarne, avec brio, l'ancienne et la nouvelle école de talents marocains et propose trois branches d'étude. La première consacre l'art, avec la peinture, la gravure, la sculpture et le dessin. La seconde, s'applique au design graphique et multimédia, assorti d'un programme lié à la 3D autour de la technique de réalisation. Enfin, la troisième désigne l'enseignement de la bande dessinée et du cinéma d'animation. Elle suscite un vif engouement, et assure pour la première fois au Maroc, une formation entièrement dévolue au 9e art. Pour Aziz Oumoussa, lauréat de la branche bande dessinée, cette spécialité est une façon de renouer avec sa ville natale, Essaouira, car « j'ai été influencé par les dessinateurs, les peintres, les aquarellistes de cette ville. J'aime la BD, elle me permet d'allier les histoires de mon enfance au trait universel et à la dimension des mythes marocains ». Ce jeune auteur, passionné des planches à dessin, a déjà signé deux albums Les yeux de l'avenir et Les aventures au royaume des reptiles, en lien avec le Nord marocain. Face au manque d'intérêt pour le 9e art au Maroc, Aziz Oumoussa, s'est tourné vers le cinéma d'animation, il est actuellement au plus fort d'un projet de film. Le budget total de l'INBA de Tétouan, octroyé depuis peu, par le ministère de la Culture représente 900 000 DH par an. Le coût annuel pour un étudiant est de 1500 DH par mois, quand sa bourse est de 1300 DH tous les trois mois. La toile et la peinture coûtant chers, certains étudiants vendent leurs travaux, pour financer leurs années d'étude. « L'art et la création humaine sont universells. La création appartient à tous, elle est démocratique ; même les plus pauvres sont de grands créateurs », souligne Abdelkrim Ouazzani, directeur de l'Institut national des Beaux-Arts de Tétouan, également peintre et sculpteur. Très actif, l'Institut national des Beaux-Arts, de concert avec ses étudiants et ses lauréats, présentera du 14 au 26 mai prochains, le Festival international de la bande dessinée de Tétouan. Durant ce mois, différents ateliers BD et cinéma d'animation se tiendront en amont, au bénéfice des jeunes de Tétouan. Un festival de fresques en bandes dessinées, stigmates de ces journées dédiées à l'art, réalisées par les étudiants de l'INBA, habillera les murs de six écoles de la ville. 20 heures d'ateliers scénario et BD seront dispensées par un professeur de renom, à 15 étudiants. Le thème de ces ateliers étant la citoyenneté et les droits humains, ainsi que le Printemps arabe, une résidence d'artistes réunira, autour de la création d'un album, du 13 au 22 mai : Bartlomé Segui (Espagne), Slim, dessinateur de presse et bédéiste algérien et Mohamed Ghazala, (Egypte). Beaux desseins d'humanité.