L'Italie et le Maroc comptent renforcer leur coopération pour permettre aux enfants thalassémiques une prise en charge et le bénéfice d'une greffe de la moelle osseuse. Trois H : healt, hunger, humanity (santé, faim, humanité). En trois mots, le projet de coopération que mènent le Maroc et l'Italie résume une grande ambition, celle de sauver des millions d'enfants marocains souffrant de thalassémie. Sous ce nom rébarbatif se cache une maladie chronique qui se présente sous différentes formes d'anémies héréditaires associées à une hémoglobinopathie : déficience dans la synthèse d'une ou de plusieurs des quatre chaînes formant l'hémoglobine des globules rouges. A en croire l'Association marocaine de thalassémie et des maladies de l'hémoglobine, environ 5.000 Marocains seraient touchés par cette maladie héréditaire du sang qui peut, en l'absence de traitement, être mortelle pour les enfants avant qu'ils n'aient atteint l'âge de 8 ans. Alors oui, le projet «3-H» s'inscrit bel et bien dans l'urgence. Des centres d'excellence Soutenu et financé par la Fondation du Rotary, ce projet est géré par le club Rotary Genova Nord (Italie), le club Rotary Chellah (Rabat) et l'Association précitée. «Nous avons commencé ce travail à Rabat et nous sommes en train, en ce moment-même, de l'élargir aux autres CHU du Maroc, à Casablanca, Fès et Marrakech», déclare au Soir échos Paolo Gardino, qui représente le Rotary Genova Nord, en marge d'une visite effectuée au Maroc du 5 au 8 janvier par une délégation de rotariens et médecins italiens spécialistes dans les maladies du sang, notamment la thalassémie. A l'ordre du jour : tracer les lignes du renforcement de la collaboration avec leurs homologues marocains. «Nous avons rencontré les représentants des quatre CHU. Il est question de créer un lien entre ces différentes structures par le biais d'un réseau informatique permettant l'échange de données sur les malades thalassémiques», indique Paolo Gardino. Pour ce dernier, l'intérêt de ce système informatique, gratuitement offert par un groupe suisse, est d'assurer un meilleur suivi des malades et donc une prise en charge plus efficace et plus rapide. Ainsi, le projet «3-H» fera de sa première expérience à Rabat, ayant donné naissance au centre d'excellence de la thalassémie au CHU Ibn Sina, le début d'une aventure. Un comité de pilotage veille sur l'extension du programme d'éducation des patients et une meilleure accessibilité aux traitements médicamenteux et aux transfusions sanguines. A Casablanca, Marrakech et Fès, l'on procède aussi à l'identification de référents rotariens et médicaux, qui constitueront les plateformes pour la prise en charge de la thalassémie dans leurs régions, selon un plan d'action annuel qui se prolongera jusqu'à 2013. Des coordinations régionales et nationales seront mises en place. Ultime espoir «Ce projet représente un énorme espoir pour les malades. A Rabat, 9 enfants sont actuellement en thérapie et beaucoup d'autres en ont bénéficié au cours des trois dernières années. Nous sommes également en phase d'étude des possibilités de réaliser des greffes de la moelle osseuse mais nous ne pensons pas cela possible dès le mois de février comme prévu», reconnaît Paolo Gardino. Ce n'est pas une question d'enthousiasme, mais de moyens et de précautions qui se pose dans ce cas précis. Les deux partenaires entament donc la recherche des enfants malades pouvant en profiter. «Nous avons commencé l'inventaire des ressources sanitaires dans les hôpitaux et à dresser une liste d'éventuels candidats à ce type de greffe», ajoute notre interlocuteur. Entre 500 et 700 patients figurent déjà sur cette liste, mais seuls ceux présentant le plus de chance de succès de la greffe y auront droit. Au CHU de Rabat, les préparatifs vont bon train pour accueillir un centre spécialisé. Sur un plan stratégique et grâce au lobbying des clubs rotariens de Casablanca «un programme thalassémie Plus» sera mis en place grâce à un soutien effectif de l'Initiative nationale pour le développement humain, avec un objectif, une bonne maîtrise de cette maladie héréditaire qu'est la thalassémie du point de vue thérapeutique et préventif. Souvent, au Maroc, ce n'est ni la structure ni le personnel qui posent problème. C'est plutôt le manque de décision politique, administrative et centrale pour faire démarrer effectivement la greffe de la moelle osseuse qui freine la volonté médicale. Des laboratoires de cryobiologie, d'immunohistochimie, de cytologie et de cytogénétique ont été même équipés ces dernières années afin de permettre à ce type de greffe de connaître un réel essor au Maroc. La greffe de la moelle osseuse est donc actuellement réalisable dans des délais courts, car le terrain est propice. Il reste seulement que le ministère de la Santé prévoit pour cela une dizaine d'infirmiers. En attendant, rappelons que le coût de la technique est très élevé à l'étranger, en particulier en France : de 2 à 3 millions de DH par malade. Pour traiter les thalassémiques au Maroc, nous aurons beaucoup à gagner de la greffe de la moelle osseuse. En tout cas, les professionnels comptent énormément sur cela.