L'association de la thématique religieuse et du grand écran, ne laisse jamais indifférent, surtout, lorsqu'il s'agit d'évoquer le Prophète Mohammed. Un sujet délicat à traiter, car la problématique de la non représentation du personnage principal, se pose d'emblée. Une tentative, signée par Moustapaha Akkad, réalisateur et producteur d'origine syrienne, voit pourtant le jour en 1976. « Le Message », retrace la vie du Prophète, et le recours à la technique de la caméra subjective, grâce à laquelle on ne voit pas prophéte Mohammed, résout l'obligation de ne pas montrer son visage. Tourné en langue anglaise et arabe, avec des acteurs principaux différents selon les versions, Anthony Quinn et Irene Papas sont les protagonistes de la réalisation anglaise. A l'époque, les studios de Hollywood, qui émettent des réserves à financer un tel projet, conduisent Moustapha Akkad, à chercher des sources de financement au Maroc et en Lybie, où le film sera tourné. Aujourd'hui, l'idée d'un biopic, retraçant la vie du Prophète Mohammed, a germé à l'esprit d'Alnoor Holdings, société de production audiovisuelle qatarie. Le budget est de 150 millions de dollars et le tournage est prévu pour 2011 ! Quoi de plus normal, pour une super production nourrie au biberon du pétrodollar ? Et qui s'aligne de plus, sur les rangs des poids lourds américains au nom d'un sujet « made in Middle East ». La nouvelle est tombée lors du Doha Tribeca Film Festival, parrainé par Robert de Niro, en novembre dernier, qui a annoncé ce projet autour du Prophète Mohammed. C'est Barrie Osborne, producteur américain du «Seigneur des anneaux» qui devrait en assurer la production exécutive : « Le film devrait enseigner au public le sens véritable de l'Islam. Une production épique internationale de ce genre, c'est une façon de créer des ponts entre différentes cultures », a-t-il confié à la presse internationale. L'idée est de débuter le récit avant la naissance du Prophète et de poursuivre jusqu'à sa mort, puisqu'il faut raconter sa vie sans le représenter. « La fiction va respecter les traditions islamiques interdisant la représentation du Prophète, il n'apparaîtra dans aucune scène, souligne Raja Sharif, vice-président d'Alnoor Holdings, à la presse internationale. Nous montons le projet de façon très légale et très précise en nous adressant à des oulémas, à des intellectuels islamistes. Peut-on montrer le Prophète de loin sans dévoiler ses traits, entendre sa voix, le faire figurer de dos comme dans « Ben-Hur », suggérer sa présence avec son ombre ? Peut-on faire apparaître ses proches : femmes, enfants, califes, petits-enfants ? Nous attendons les réponses et nous en tirerons une ligne rouge que nous ne passerons pas. Même s'il n'y a pas de réelles interdictions dans le Coran, car c'est une interprétation.» Des scénaristes confirmés, issus de Hollywood, se sont rassemblés à Doha, afin de suivre des débats et des conférences sur l'islam et la représentation de prophéte Mohammed. L'équipe réunie les plus grands scénaristes d'outre-Atlantique, tel que David Franzani, reconnu pour « Amistad » et « Gladiateur ». Tous ont reçu des Oscar ou ont déjà été nominés. Autre élément surprenant, l'équipe destinée à écrire le script sera composée d'auteurs non-musulmans. L'émulation et la rencontre de talents Ouest-Est, ne serait-elle pas plus prometteuse avec une alliance de scénaristes originaires du Machrek, du Maghreb et du Pentagone ? L'ambition de Alnoor Holdings serait-elle uniquement de réunir les moyens financiers du Moyen-Orient et les compétences occidentales ? Créée en 2009, par un groupe d'hommes d'affaires influents, dont Ahmed Al-Hashemi, qui en est le président, Alnoor Holdings produit notamment des longs-métrages, des films d'animation, et des séries télévisées réalisées pour le marché régional mais également international. L'axe du bien pourrait désormais se situer du côté oriental de la planète… Et la nouvelle Mecque du cinéma, pourrait-elle être au Qatar, plutôt qu'à Hollywood ? N'oublions pas que l'histoire du cinéma indépendant américain a réellement « grandi », à l'ombre de New York City… comme Robert De Niro.