Les promoteurs immobiliers sont en colère. Leur dernier coup de gueule concerne la décision prise par le ministre de l'Habitat, Taoufiq Hejira, il y a un mois, de lancer un appel d'offres international pour réaliser des programmes de logements au Maroc. En fin de semaine dernière, les membres de la Fédération nationale des promoteurs immobiliers (FNPI) ont clairement expliqué qu'ils ne voient pas d'un bon œil l'arrivée d'opérateurs étrangers. «Je ne vois pas l'intérêt de ramener, encore une fois, des opérateurs étrangers», indique Youssef Ibn Mansour, président de la FNPI. Pour lui, le secteur est en difficulté et en temps de crise, il faut «donner la priorité aux entreprises nationales». Les promoteurs avancent un autre argument pour défendre leur thèse. Celui de l'emploi. Rappelons que le ministère de tutelle avait affirmé que les investisseurs étrangers pourraient faire appel à leurs propres architectes ou à leurs propres ingénieurs. Un détail qualifié par certains promoteurs d'«inquiétant». Leur Fédération joue aussi la carte de l'emploi pour défendre sa position. Le secteur emploie en effet presque un million de personnes. Un bras de fer s'annonce Pour ce promoteur, le ministère doit faire attention à ne pas dupliquer les mêmes expériences vécues dans certains pays africains en verrouillant ces futurs contrats. Ces «inquiétudes» sont balayées d'un revers de la main par le ministère de tutelle. «Le secteur n'a pas encore atteint sa vitesse de croisière. Nous voulons accroître les capacités de production», explique Mounia Lahlou, directrice de la promotion immobilière au ministère de l'Habitat. En clair, il y a encore à boire et à manger pour tout le monde. La représentante du ministère de tutelle a indiqué que la préoccupation majeure du département de l'Habitat est de remettre en selle la production du logement social. À ce propos, on annonce que le cahier des charges pour le logement social est en cours de réalisation. Il devrait être finalisé dans une semaine ou dix jours, une fois adopté par l'ensemble des intervenants, à savoir le ministère des Finances, le ministère de l'Habitat, l'administration des impôts et les promoteurs immobiliers. Il est à signaler que depuis 2 ans, aucune convention n'a été signée pour la production de ce segment, sachant que les avantages fiscaux qui lui ont été accordés ont été abrogés. Pour un observateur, l'arrivée d'investisseurs étrangers dans le secteur représente une véritable mise à l'épreuve des opérateurs locaux. L'ensemble des intervenants du marché (architectes, bureaux d'études et de contrôle, promoteurs...) devront composer avec de nouveaux critères de compétitivité. Le premier test aura lieu dans quelques semaines, lors de l'ouverture des plis de l'appel d'offres international pour la construction de logements sociaux à Sahel Lakhyayta, dans la banlieue sud de Casablanca. Etrangers et nationaux auraient soumissionné pour ce projet. Les arguments de Hejira C'est en décembre dernier que le holding d'aménagement Al Omrane a lancé un appel d'offres international pour la réalisation de programmes intégrés comprenant des logements à 140.000 dirhams l'unité et les équipements publics nécessaires. Une première. Le programme, dont la première tranche porte sur 107 hectares, vise également la réalisation de logements pour la classe moyenne. Taoufiq Hejira avait indiqué à l'époque que le gouvernement marocain avait fait appel aux promoteurs étrangers à cause du manque d'intérêt des opérateurs nationaux pour le secteur du logement social. Hejira a parlé d'un «glissement d'intérêt» des promoteurs immobiliers vers d'autres segments de logements. «L'Etat a l'obligation de produire le plus grand nombre de logements possible. Il ne peut donc se priver de faire appel à des opérateurs étrangers s'ils sont compétitifs», avait-il déclaré lors d'une sortie médiatique. Selon nos sources, une commission interministérielle accordera une notation pour chaque soumissionnaire. La sélection tiendra notamment compte des références professionnelles et techniques, de la qualité urbanistique et architecturale, des délais proposés par les soumissionnaires...