Les Echos quotidien : Vous avez récemment animé une conférence à Casablanca sur «le présent et le futur proche du marché publicitaire de la radio au Maroc». Comment voyez-vous ce futur proche du secteur ? Pierre Benoît : Je crois qu'on est au début d'une aventure. L'éditorial est en place, là dessus nous n'avons pas de problème. Le socle de base existe et le marché dispose d'une vraie audience. Maintenant, il faut passer à la prochaine étape. C'est à dire la monétisation de cette audience. C'est là où nous rentrons dans un autre environnement. Auparavant, nous étions dans une relation entre une station et des auditeurs. A présent, nous nous situons dans une relation entre une station et plusieurs annonceurs. C'est un autre registre qui répond à d'autres règles, un autre type de marketing...c'est totalement autre chose. Pour moi, c'est une nouvelle ère qui commence pour ce média et cette nouvelle ère, il faut la réussir parce qu'il ne faut pas oublier que la radio est à 100 % financée par la publicité. Une nouvelle ère qui doit se base sur une mesure d'audience uniforme pour l'ensemble des opérateurs, c'est bien cela? Oui en partie. Il faut toutefois rappeler que l'audience sert à deux choses : d'abord fixer un prix et puis ensuite répartir les budgets. Autrement dit, il s'agit du gâteau publicitaire et de la part que chaque opérateur réussira à en décrocher. Tant que ces éléments ne seront pas disponibles, on ne pourra pas travailler sur un sujet pareil, sachant qu'il faut également une audience qui soit porteuse de consensus. Il faut que chacun reconnaisse l'existence ou la création d'une sorte de monnaie commune. A mon sens, l'audience doit absolument être transparente, rigoureuse et efficace pour servir le marché et les opérateurs. C'est indiscutable ! C'est à partir de ce point de vue là que la CIRAD doit se mettre en route pour pouvoir clairement mettre en place des choses très professionnelles et dignes de la situation du marché radio marocain actuellement. Au delà de la mesure d'audience, le marché national a-t-il encore besoin de se structurer, particulièrement au niveau commercial? La monétisation coûte de l'argent, c'est un investissement humain et technique, car il faut constituer des équipes commerciales et un marketing solide et efficace. C'est à ce niveau qu'il est, à mon sens, temps de trouver des économies d'échelle et d'effectuer des rapprochements ou des partenariats pour pouvoir commercialement être plus fort. C'est quelque chose d'assez naturel. Il faut savoir que dans le monde entier, on distingue les pôles éditoriaux des pôles publicitaires et plus encore qu'en radio que dans un autre média. Pensez-vous que les opérateurs doivent commencer à se diriger vers le numérique? Pour l'instant, je pense que les stations n'ont pas encore toutes atteint leurs potentiels en termes de couverture du territoire. Nous n'avons pas d'urgence technique ou technologique, mais nous sommes face à une urgence professionnelle. Pour que les stations vivent, il faut qu'elles soient en mesure de monétiser leur audience et savoir comment la monétiser efficacement. L'audience existe, le public a répondu présent avec la libéralisation du paysage radiophonique et on en connaîtra réellement le niveau bientôt, mais là dessus il est indispensable de développer des approches marketing sérieuses. S.A