L'étude «1,5 million leaders», réalisée par l'UM6P, met en évidence le potentiel inexploité des talents africains pour répondre à la pénurie mondiale de compétences. Détails. Une étude récente réalisée par l'université Mohammed VI polytechnique (UM6P) met en évidence un phénomène préoccupant : malgré leur potentiel, les talents africains sont largement négligés dans la résolution de la pénurie mondiale de compétences. L'étude intitulée «1,5 million leaders» révèle que les universités africaines devraient produire environ 1,5 million de diplômés hautement qualifiés pour l'année 2023, un chiffre qui devrait atteindre 1,9 million par an d'ici la fin de la décennie. Pourtant, bien que 64% des dirigeants d'entreprises mondiales reconnaissent une grave pénurie de talents au sein de leur organisation, seuls 48% d'entre eux considèrent les talents africains comme une solution viable à ce problème pressant. Cette situation souligne le besoin d'une prise de conscience accrue quant au potentiel inexploité des talents du continent. L'étude souligne également le surplus de compétences essentielles que les talents africains apportent, y compris des compétences cruciales pour atteindre les objectifs de développement durable des Nations Unies. Les talents du continent ont la capacité de répondre aux besoins croissants des entreprises mondiales dans divers secteurs, tels que l'agriculture, l'exploitation minière, les services financiers, les soins de santé, les télécommunications et les médias, les services professionnels, l'industrie manufacturière, le commerce de détail, le gouvernement/secteur public et l'éducation. Perte moyenne de 9% de chiffre d'affaires par organisation L'étude «1,5 million leaders» a été réalisée auprès de 300 dirigeants d'entreprises internationales et de 150 représentants d'universités africaines. Les résultats révèlent que la majorité des dirigeants d'entreprise (62%) ont constaté un impact négatif sur leur chiffre d'affaires en raison de la pénurie de talents, avec une perte moyenne de 9 % par organisation. Cette situation devient particulièrement préoccupante pour les entreprises opérant dans des pays où l'économie est encore en évolution. Les grandes entreprises ont en moyenne 381 postes vacants, dont 31% sont restés vacants depuis six mois ou plus. Trouver les bonnes personnes pour combler ces lacunes devient de plus en plus difficile, et de nombreuses entreprises prévoient que cette situation ne fera qu'empirer. Selon les prévisions, le nombre de postes vacants devrait passer à 564 par organisation d'ici 2025, puis à 1.312 d'ici 2030. Il est impératif que les entreprises internationales reconnaissent le potentiel des talents africains et envisagent de renforcer leur recrutement parmi les diplômés africains. Plus de trois quarts des dirigeants d'entreprise (78%) estiment que les talents qui partent étudier à l'étranger représentent l'une des plus grandes menaces pour les entreprises internationales cherchant à développer des activités durables en Afrique. Les universités africaines jouent un rôle crucial dans la formation de ces talents, mais seulement 17% d'entre elles ont actuellement établi des partenariats avec l'industrie. Il est donc essentiel que les entreprises mondiales s'associent davantage aux universités africaines afin de bénéficier du vivier de talents disponible sur le continent. Les représentants d'universités soulignent également que les startups africaines peuvent jouer un rôle majeur dans la formation des talents et dans la stimulation de l'esprit d'entreprise. Zoom sur les industries culturelles et créatives Dans le cadre des conférences « The Voice of Africa – UM6P side events », Hicham El Habti, président de l'UM6P, et Sergio Pimenta, vice-président pour l'Afrique à la Société financière internationale (IFC), ont mis en avant l'importance de l'accompagnement des talents. Hicham El Habti souligne l'importance de la synergie entre la science, la recherche, l'innovation et la créativité. Dans le cadre des industries créatives et culturelles, il met en avant le rôle des idées créatives émergeant de la combinaison des connaissances scientifiques et artistiques, ainsi que l'impact des avancées technologiques dans la création d'œuvres d'art, de produits culturels et d'expériences uniques. L'université UM6P s'engage à encourager cette collaboration interdisciplinaire et à soutenir la recherche dans les sciences humaines et sociales, afin de catalyser un avenir prometteur pour l'Afrique. Sergio Pimenta souligne que les industries créatives sont un catalyseur du développement économique, représentant plus de 2.000 milliards de dollars à l'échelle mondiale et générant plus de 50 millions d'emplois, dont la moitié est occupée par des femmes. Il souligne l'importance de stimuler la croissance de ces industries en offrant un soutien financier, des ressources, des compétences et des politiques publiques adaptées. Selon lui, l'Afrique possède un potentiel considérable dans les industries créatives, avec une population jeune et dynamique, et il est essentiel de créer des opportunités économiques pour les jeunes et les femmes dans ce secteur. Il faut dire que l'accompagnement des talents dans ces industries revêt une importance cruciale pour l'Afrique. Actuellement, le continent représente seulement environ 3% à 5% du marché mondial des industries créatives, mais des prévisions indiquent que ce secteur pourrait contribuer jusqu'à 10% du PIB mondial d'ici 2030. Ce qui met en évidence le potentiel inexploité de l'Afrique dans ce domaine. Pour favoriser le développement des industries créatives, des mesures doivent être prises. Hicham El Habti souligne l'importance des partenariats public-privé et de l'investissement du secteur privé dans ces industries. Il souligne également la nécessité de simplifier les procédures administratives, d'encourager l'accès au financement et de promouvoir la mobilité artistique. De son côté, Sergio Pimenta met l'accent sur l'importance des modèles économiques viables, des politiques publiques intelligentes et de la collaboration entre les acteurs mondiaux des industries créatives et les créateurs africains. Il souligne également l'engagement de l'IFC à soutenir ces industries en fournissant financement et expertise. Modeste Kouamé / Les Inspirations ECO