Vladimir Poutine accueille à partir de jeudi ses partenaires africains à Saint-Pétersbourg pour un second sommet Russie-Afrique, un moyen d'afficher une entente malgré le conflit en Ukraine et la fin de l'accord céréalier, source d'inquiétude pour le continent. Isolé sur la scène internationale depuis le lancement de son offensive militaire en Ukraine, Vladimir Poutine peut toujours compter sur son partenaire chinois, mais aussi sur le soutien – plus ou moins vocal – de nombreux pays africains. «Aujourd'hui, le partenariat constructif, confiant et tourné vers l'avenir entre la Russie et l'Afrique est particulièrement significatif et important», a souligné le président russe dans un article publié lundi sur le site du Kremlin. À Saint-Pétersbourg, l'ancienne capitale impériale, plusieurs chefs d'Etat africains sont attendus, dont le président sud-africain Cyril Ramaphosa, pour la deuxième édition de ce sommet après une première en 2019 à Sotchi, sur la mer Noire. Le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov, a accusé mardi les Occidentaux d'avoir tenté de dissuader les Africains d'assister à ce sommet. «Pratiquement tous les Etats africains ont été soumis à une pression sans précédent de la part des Etats-Unis, et les ambassades françaises n'ont pas été inactives (…) pour empêcher ce sommet d'avoir lieu», a-t-il affirmé. Les céréales au menu «Aujourd'hui, plus que jamais, il est important que nous nous réunissions avec les Africains et que nous parlions, notamment de l'accord sur les céréales», a encore déclaré le porte-parole du Kremlin aux journalistes. Le sujet brûlant du sommet sera en effet l'abandon par Moscou d'un accord crucial qui permettait depuis l'été 2022 à l'Ukraine d'exporter, y compris vers l'Afrique, ses céréales par la mer Noire, malgré le blocus russe des ports ukrainiens. En un an, cet accord avait permis de sortir près de 33 millions de tonnes de céréales des ports ukrainiens, contribuant à stabiliser les prix alimentaires mondiaux et à écarter les risques de pénurie. Ces derniers jours, Moscou a tenté de rassurer ses partenaires africains, disant comprendre leur «inquiétude» sur le sujet. Le Kremlin a assuré que la Russie était «sans aucun doute» prête à exporter ses céréales gratuitement vers les pays africains qui en ont le plus besoin. De son côté, Vladimir Poutine s'est déclaré d'accord pour revenir à l'accord à l'avenir mais uniquement à condition que ses demandes, concernant les exportations russes qui souffrent des sanctions, soient acceptées «dans leur totalité». Wagner, le gros point d'interrogation Depuis le début de son offensive en Ukraine en février 2022, la Russie a cherché à renforcer ses liens diplomatiques avec l'Afrique, faisant concurrence dans certains pays à la France, notamment via la présence du groupe paramilitaire Wagner. Signe de cet intérêt, le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, a déjà effectué deux tournées sur le continent depuis le début de l'année, s'efforçant de l'attirer dans le camp de Moscou, dressé en rempart contre «l'impérialisme occidental». «Nous avons constamment soutenu les peuples africains dans leur lutte pour la libération de l'oppression coloniale, aidé à la formation des Etats, au renforcement de la souveraineté et des capacités de défense», a souligné le président russe lundi. Dans les faits, la poussée de l'influence russe se matérialise notamment par des contrats de coopération militaire et de campagnes de communication sur les réseaux sociaux, selon les experts. Mais la rébellion avortée de Wagner en Russie fin juin laisse planer un doute sur le futur de ses opérations sur le continent. Et si le président français Emmanuel Macron a estimé que Moscou jouait en faveur de «la déstabilisation» de l'Afrique par ses activités, le Kremlin a assuré «développer» avec les pays africains «des relations amicales, constructives, basées sur le respect mutuel». Les dirigeants africains ont tenté de peser dans la recherche de la paix en Ukraine. Une délégation de chefs d'Etat s'est rendue mi-juin à Moscou et à Kiev, prônant la fin des hostilités devant Vladimir Poutine et Volodymyr Zelensky, sans grands résultats. Le grand raout prévu à Saint-Pétersbourg intervient un mois avant le sommet des BRICS en Afrique du Sud, auquel le président russe, visé par un mandat d'arrêt de la Cour pénale internationale (CPI), a renoncé à se rendre, mettant fin à des mois de spéculations. Sami Nemli avec agences / Les Inspirations ÉCO